T3 - Chapitre 4

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— Monsieur Sherlock Holmes ! S'exclama le policier. Ça, pour un honneur, c'est un honneur ! J'essaie toujours d'appliquer vos méthodes, avec des succès moindres, vous vous en doutez bien ! Si seulement j'avais pu faire comprendre à mes supérieurs qu'une police utilisant la science serait au moins trois fois plus efficace... Je n'aurais pas été muté dans ce trou à rat... Il ne se passe jamais rien, ici...

— Et pourtant, souris Holmes, un loup-garou !

— Oui, j'avoue, celle-là m'a quelque peu surpris ! Je suppose que c'est la raison de votre venue ici ? Vous n'adhérez pas à l'hypothèse de la bête sauvage ? Croyez-moi, monsieur Holmes, moi qui aie vu les corps...

Il frissonna...

— Ça ne pouvait pas être humain...

— Certes, mais aucune hypothèse n'est à exclure pour le moment ! Je suppose qu'il n'y a pas eu d'autopsie ?

— Malgré mes demandes, non. Mais j'ai fait des rapports précis de l'emplacement et la taille des blessures, si vous voulez...

— Excellent ! Vraiment, mon brave, la police de Londres à fait sa pire bévue en se débarrassant de vous !

Le jeune homme rougis du compliment.

— Watson, vous devriez vous en inspirer, au lieu d'écrire des comtes rendus toujours plus fantaisistes de mes enquêtes !

Le docteur, vexé, lui lança une œillade meurtrière qu'il ignora superbement.

— Quel est votre nom, déjà ? Lança distraitement Holmes en se saisissant du dossier que lui tendait le policier.

— Pitt Aberline, monsieur Holmes.

Mais l'autre ne répondit pas, déjà plongé dans les rapports.

~

— Alors, Holmes, qu'en pensez-vous ? Demanda finalement le docteur, n'y tenant plus.

— Ce que j'en pense, mon cher Watson, répondit un Holmes songeur, c'est que la créature qui a fait ça devait mesurer au moins deux mètres de haut, posséder des crocs de la longueur de la main, et se déplacer sur les pattes arrières.

— Un monstre ?

— Sans aucun doute, Watson, mais un monstre animal... ou humain ? Ça me paraît jusqu'à présent la thèse la plus plausible.

— Mais les marques de crocs...

— Un simple outil de jardinage peut faire l'affaire.

— Les traces de pas de loup géant...

— Un leurre facile, Watson ! Il suffit de coller sous ses chaussures une forme prédécoupée, et de laisser traîner ici et là quelques poils de loups ou de chien. Les empreintes n'ont été vus que de nuit, et la pluie les a effacés sans attendre.

— La bête vue par les témoins ?

— L'imagination ! Vous avez déjà oublié le chien des Baskervilles ? Et, dites-moi, qu'auraient bien pus faire trois jeunes filles, la nuit, à l'orée de la forêt ?

— EH bien... un rendez-vous galant ?

— Les trois ? Pourquoi aucun amant ne s'est manifesté ? L'une était marié, l'autre fiancée... Non, quelqu'un les as attirés là. Un homme. Si ça avait été une bête, Watson, elles auraient fui !

— Présenté comme ça, Holmes...

Le docteur baissa la voix pour ne pas être entendu par le policier, dans la pièce d'à côté.

— Et si c'était véritablement un loup-garou ?

— Alors nous assisterons à un duel inédit, plaisanta le détective, vampire contre loup-garou !

— Très drôle, Holmes...

~

— Vous avez trouvé quelque chose d'intéressant ? Intervint Abberline en entrant dans la pièce, trois tasse de thé fumant à la main.

Ce qui désola le docteur Watson, qui regrettait immensément de ne plus pouvoir boire de thé. Devoir se méfier du soleil, soit. Se nourrir de sang, d'accord. Être poursuivis par Moriarty et sa bande de vampire belliqueux, certes. Mais ne plus pouvoir boire du thé, pour un Anglais, vraiment !

— Peut-être, répondit Holmes. Abberline, que pouvez-vous me dire sur les habitants du manoir ?

— Les De Salle ? Ma foi... Madame De Salle, de son vivant, était très apprécié. Elle est décédée l'année précédant mon arrivé, j'en sais donc assez peu sur les circonstances de sa mort, si ce n'est qu'elle n'était pas naturelle. Un accident, il me semble. Les gens d'ici n'aiment pas trop en parler. À sa mort, son mari, déjà peu apprécié, est devenu complètement misanthrope. J'ai dû le voir une fois ou deux depuis mon arrivé, et encore, en passant. Il reste cloître dans sa bibliothèque, pour faire des recherches sur on ne sait quoi. On dit qu'il correspond beaucoup, et qu'il reçoit régulièrement des paquets de l'étranger. Il laisse l'aîné, Édouard De Salle, régler les affaires courantes. Méfiez-vous : il n'est pas commode.

— Nous nous en sommes aperçut, commenta Watson.

— Oui, il n'est pas très accueillant... et il a horreur qu'on mette son nez dans ses affaires. Il déteste son demi-frère, James, et sa demi-sœur, Violet.

— Parlez-nous de James, demanda Holmes.

— Ma foi, il n'y a pas grand-chose à dire... Tout le monde l'aime bien. Il est pas condescendant pour deux sous, il travaille sans rechigner, en filant un coup de main ici et là au besoin, et il se fiche pas mal des conventions, ce qui, vous vous en doutez, ne plaît ni au père ni au frère.

— Et sa sœur ?

Aberline rougit violemment.

— Elle, elle est formidable, monsieur Holmes ! Courageuse, belle, généreuse...

— Vous pouvez vous arrêtez là, ria le détective, je crains que vos informations n'aient perdu de leur objectivité !

Le policier rougi de plus belle.

— Fiancés ? Demanda Watson gentiment.

— J'aimerais bien... nous nous fréquentons depuis quelque temps déjà... mais je n'ose pas. Un policier, demander la main d'une noble ? Ridicule, n'est-ce pas ?

— N'attendez pas trop, lui conseilla Watson, un air triste sur le visage. On croit que les gens sont immortels et qu'on a tout le temps devant nous... et puis un jour, toujours plus tôt qu'on ne l'attendait, la réalité nous rattrape...

Un cri l'interrompit. Un hurlement de femme.

— Vite, Watson ! S'exclama Holmes en se précipitant à l'extérieur.

Le cri venait de la forêt. Les trois hommes s'y engouffrèrent sans hésiter.

Une ombre était penché sur une femme, qui hurlait encore. Une ombre animale, une ombre gigantesque... Ils eurent à peine le temps de l'apercevoir avant qu'elle ne se fonde dans les arbres.

— Abberline, la fille ! Cria Holmes sans ralentir.

Obéissant par instinct, le policier s'arrêta pour aider la jeune femme, tandis que les deux compères prenaient en chasse la bête.

Débarrassé de la présence du policier, Watson commença à accélérer, encore, encore, jusqu'à atteindre une vitesse qui n'avait rien d'humain...

— Watson, soyez prudent ! Entendit-il Holmes hurler dans son dos.

Le docteur ne répondit rien. Il était déjà loin.

Là ! Il commençait à entendre la bête, ou quoi que ce fut, devant lui !

Il l'avait... il l'avait presque...

Et soudain, le manoir De Salle.

De la créature, nulle trace.

Sherlock Holmes & John Watson - Les Vampires de LondresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant