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Il était plutôt satisfait, une fois encore. Mais, il n’avait pas le temps de se glorifier et encore moins de se reposer.

Sa petite mise en scène devrait donner une image différente de cette chère Emma. Lui savait  de quoi elle était capable. Cela ne méritait peut-être pas la mort, mais la fin justifiait les moyens : Salir sciemment son image pour intriguer la police.
Quand ces policiers découvriront les films pornos, certaines photos et vidéos, les doutes sur un jeu sexuel ne seront plus permis. Et il restera la piste du parfum.

...

Installé confortablement dans son véhicule ou à la terrasse d’un bistrot, il guettait. Avec cette cible-là, la moindre erreur serait fatale. L’homme, sans être une montagne de muscles, semblait être balaise. Sous sa chemise, ceux-ci étaient facilement discernables.

La localisation de sa maison allait être une difficulté supplémentaire. Trop de voisins et donc plus de précautions à prendre. Quelle idée de vivre dans cette résidence pavillonnaire pour un homme comme lui ! Il allait devoir trouver une autre possibilité.
              

Après plus d'un mois de filature, il avait enfin trouvé la solution. Ce cher Édouard allait bientôt tirer sa révérence.

Le lieu était découvert, il l’avait préparé avec beaucoup d’attention. Restait à y acheminer son invité pour son dernier voyage. Et pour être tout à fait honnête, il en était tout excité.

Certaines anciennes relations lui avaient appris toutes les manières d’ouvrir une voiture. Si le chauffeur avait utilisé son véhicule de fonction, il lui aurait bien compliqué la vie, mais l’homme, consciencieux, n’utilisait que la sienne pour sa vie privée. Imaginer Dasnet dans ce vieux Berlingo le faisait d’ailleurs sourire.

Garé dans cette petite rue adjacente à la salle de bowling,  toujours au même endroit,  le véhicule l’attendait.

En cinq minutes chrono, le temps de déverrouiller la portière passager avec le bon vieux porte- manteau, il était installé sur la banquette arrière.

Un coup d’oeil sur l’heure l’informa que normalement son attente devrait être courte. Tous les mardi soir, Édouard venait au bowling...Et en repartait  invariablement vers 22h30. Les personnes routinières étaient des cibles parfaites pour les hommes comme lui.

Personne de l’extérieur ne pouvait l’apercevoir, vêtu de noir de la tête au pied comme il l’était. Et justement, sa cible arrivait. Celle-ci,  après avoir ouvert la porte, s'installa derrière le volant et stoppa net en voyant sa tête dans le rétroviseur. Juste comme il  l'avait prévu ! La double compresse imbibée de choroforme qu'il lui appuya immédiatement sur le nez, le laissa vite telle une poupée de chiffon. L'homme le poussa, non sans difficultés sur le fauteuil à côté, puis sans tarder démarra la voiture. Dès qu'il lui fut possible de le faire sans risque, il injecta une dose de somnifère. Il n'avait pas envie de le voir se réveiller de suite. L'effet de surprise serait gâché !

Une demi-heure plus tard, après avoir transporté sa victime, dans l'entrepôt désaffecté,  il l'avait attachée au moyen des chaînes accrochées au mur. Debout face à lui, il attendait qu'il se réveille.

Tout à l'heure, il avait été tenté de lui coller une balle dans la tête.  Mais cela aurait mis en péril tout son plan. Cet homme représentait ce qu'il détestait le plus. Il avait été le bras servil de Dasnet. Et pour ce qu'il en savait, n'avait eu aucun remords à mettre en place les éléments du piège. Il voulait voir la frayeur dans ses yeux. En attendant, il savourait le spectacle, imaginant l'image à la une de la presse.

Les bras de l'homme, maintenus à l'horizontal par des chaines, les pieds touchants à  peine le sol , le bâillon... Tout ceci plairait, il en était certain. Et pour être assuré que cette image ne soit pas censurée par les forces de l'ordre, il avait immortalisé la scène lui même  sous différents angles. La touche finale, il la mettrait au tout dernier moment..

Les bras croisés sur la poitrine, dans l'ombre, il eut tout le temps d'apprécier le réveil de l'homme, sa frayeur en constatant qu'il était entravé, et sa tentative grotesque pour se délivrer. Les grognements dûs au bâillon étaient plaisants à entendre. Un peu trop puisque son ricanement stoppa immédiatement toute gesticulation. L'inquiétude prit place sur le visage du prisonnier.
Et sa stupeur quand il sortit de l'ombre fut une récompense.

- Hé oui, tu n'as pas rêvé tout à l'heure ! Tu as la mémoire des visages, c'est bien. Je t'avais mis en garde, tu t'en souviens ? T'inquiète pas ce sera pas long. Mais je voulais être certain que tu me reconnaisses avant. Tout se paye !

Et sous ses yeux effrayés, il lui planta son couteau en plein coeur.

Après avoir vérifié qu'il était bien mort, il peaufina les détails. Tout ceci avait un but, et il ne devait rien laisser de côté. 

A ses pieds, après l'avoir aspergé un peu, il posa la bouteille de parfum : Opium. Et il prit une photo de l'ensemble.

Juste avant de partir il prévint la police . Un simple appel d'un téléphone banal acheté il y a quelques jours, qu'il jeta au sol avant de l'écraser de son talon.

****

Le corps vient de partir pour l'autopsie.  les photos ont été prises, les empreintes relevées mais le policier est à  peu près certain que cela ne donnera rien. La scène de crime a été bien préparée,  le corps exposé pour qu'on le voit. L'appel anonyme n'avait qu'un but : nous amener ici. Et la bouteille de parfum au pied du corps m'inquiète. Cela ne peut pas être un hasard. Ni l'identité de la victime. Il est trop tard pour m'y rendre maintenant . Et Monsieur Dasnet est quelqu'un de trop important pour être dérangé sans une bonne raison à  presque minuit. Mais sa secrétaire particulière puis son chauffeur, victimes de meurtres violents en quelques temps d'intervalle demandent des précisions.

SUIS MA TRACEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant