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Le voyage avait été long mais sans aucun problème. Il avait préféré s'installer dans un petit hôtel. Il lui fallait être sûr qu'il n'était pas recherché. Sous sa fausse identité et avec du fric, il allait pouvoir vivre tranquille. Pour les jours à venir, son seul objectif était de dormir. Tous ces préparatifs, tous ces meurtres l'avaient épuisé. Il avait transféré sur son compte suffisamment d'argent pour être peinard un moment sans attirer l'attention.

Après quelques jours où il n'était sorti de sa chambre uniquement pour manger, il se sentait enfin reposé.  Il se promena dans le périmètre immédiat de l'hôtel, regardant distraitement les commerces. En voyant un salon de coiffure, il sourit et y entra. Une heure après,  il en ressortait avec les cheveux coupés courts et noirs corbeau. Non pas que cela changeait grand chose, mais il trouvait qu'ainsi il ressemblait un peu plus à Thomas.

....

La porte s'ouvrit devant elle, et elle eut l'impression d'enfin revivre. Elle avança sans se précipiter vers l'arrêt de bus. Gladys savait que personne ne l'attendrait à sa sortie de prison. Le seul qui aurait pu faire cela était ou mort ou très loin.

Un peu à l'écart, dans une voiture, quelqu'un regardait avec beaucoup d'intérêt cette femme. Francis Griot avait quitté la police depuis presque un an. L'envie n'était plus là depuis un moment déjà.

L'affaire de l'homme aux parfums n'avait fait qu'accentuer la chose.

Il avait investi ses économies dans une petite affaire de box à louer. Il n'avait pas beaucoup de temps à y consacrer, aussi avait-il embauché un employé, Ludovic Martin.
Celui-ci gérait les box et les locataires avec succès.  Francis lui avait promis qu'il le rejoindrait très vite. Avant cela, il désirait s'assurer de quelque chose.

Quand le bus arriva et qu'il vit la femme monter dedans, il le suivit. Il devait savoir où elle se rendait. Il ne faisait plus partie de la Police mais son instinct était toujours là. Et celui-ci lui soufflait que Gladys Feraud irait un jour ou l'autre rejoindre l'assassin.

L'adresse était sans grande surprise celle inscrite dans son dossier. En était-elle propriétaire ou juste locataire ? Qui l'avait géré pendant son incarcération ? Lucas Bosc ? Son avocat ?

Résoudre cette affaire était devenu une véritable obsession. Sans être un défenseur de la morale,  il y avait au minimum un tueur dans la nature.

Quelqu'un avait tué mademoiselle Lévi, Edouard le chauffeur, et Monsieur Dasnet. Pour le quatrième meurtre, rien ne prouvait un lien avec les trois autres, excepté le parfum et le nom de Bosc.
C'est ce qui avait d'ailleurs provoqué son départ !  Le commissaire préférait taire ces informations. Même le nom de Thomas Lust n'était pas sorti du rapport qu'il avait fait.  Pour lui, flic intègre, cela demandait au minimum de mettre ce rapport en pièces jointes. Son supérieur hiérarchique l'avait accepté avec difficultés.

*****

Gladys ouvrit la porte de son appartement avec une certaine appréhension.

Presque trois ans qu'elle l'avait quitté. Tout d'abord, elle aéra la pièce en grand, respirant à grandes goulées l'air. C'est une des choses qui lui avait manquée le plus en prison. En cellule, la toute petite fenêtre ne lui semblait jamais assez grande. Et le calme.

Elle se dirigea vers la salle de bain, se déshabillant au fur et à mesure, sans avoir à se préoccuper du regard parfois lourd de ses codétenues. Un véritable plaisir !  Puis, elle fit couler de l'eau dans la baignoire. Le temps que celle-ci se remplisse, toujours dans le plus simple appareil, elle attrapa des vêtements dans son armoire. Elle n'avait pas encore réfléchi de ce qu'elle ferait des quelques habits qu'elle ramenait. Les garder ou les brûler pour exorciser cette période de sa vie.

Elle profita longuement de son bain, puis elle enfila un jean simple, un petit pull et une paire de ballerines et elle sortit de son appartement.  Son avocat l'attendait dans un petit restaurant à quelques minutes de marche. Celui-ci vint à sa rencontre et la guida vers une table discrète.

- Comment allez-vous ? s' inquiéta-t-il

- Bien. Merci pour la maison, je n'aurai pas eu la force de nettoyer...

- Je n'ai fait qu'obéir aux volontés de Monsieur Dasnet à votre égard. Il avait pris en charge votre loyer, comme je vous l'avais expliqué dès notre premier entretien. Ce n'est pas courant, il faut l'admettre.

- Gaspard était tout sauf quelqu'un d'ordinaire, admit-elle. Et puis, peut-être s'en voulait-il de m'avoir entraînée dans cette affaire.

- Sûrement. Rien d'illégal de toute manière. Qu'allez-vous faire, maintenant ?

- Je ne sais pas. Trouver du travail, je suppose. Avez-vous des nouvelles de l'enquête ?

- Il ne m'est pas facile d'avoir des informations depuis le départ de l'inspecteur Griot. Je crois qu'elle est au point mort, de toute façon.  Je peux vous prêter un peu d'argent, Gladys, si vous le désirez.

- Cela sera peut-être nécessaire, oui. Je vous le dirais.

Après le repas, Gladys rentra chez elle tranquillement. Son avocat n'avait pas à s'inquiéter, elle savait très bien que faire. Il avait tout prévu. Elle n'avait plus qu'à suivre les consignes qu'il lui avait données à sa seule visite.

Tu as bien compris, Gladys ? Quand tu seras dehors, préviens-moi. 

Le moment était venu de vérifier tout cela. Elle avait besoin d'être certaine que, contrairement à ce que pensait la police, Lucas Bosc n'était pas l'homme brûlé.

Elle alluma son ordinateur, et sans réfléchir un instant, écrit le message : elle le connaissait par cœur à force de se le répéter tous les jours. 

- Bonjour. Je suis sortie ce matin. J'attends de tes nouvelles.

*****

Comme tous les jours,  son premier geste était de vérifier sa boîte mail. Cette boîte mail.  Et il lut le court message, auquel il répondit .

SUIS MA TRACEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant