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Son collègue le regardait, impassible et visiblement il ne comprenait où il voulait en venir. Pourtant, en grosses lettres sur la feuille A4, il y avait la réponse. Enfin, une partie de la réponse.

- Je n'ai jamais été très doué pour les énigmes, tu le sais. Alors, si tu pouvais éclairer ma lanterne, cela ne me dérangerait pas, ironisa celui-ci.

- Lire à haute voix, tu sais faire ?

- Tu m'ennuies. Blue pour Mademoiselle Levi, commença-t-il. Le nom du parfum, c'est cela ?

- Continue.

- Opium pour Édouard, Shalimar pour Dasnet, récita-t-il. Et cela devrait m'expliquer quoi ?

- Concentre-toi sur l'initiale du nom de chaque parfum. Ça y est, tu vois ? M'impatienté-je.

- B.O S.

- Tu le fais exprès, ce n'est pas possible ! m'énervé-je. Tu oublies celui d'aujourd'hui. Le C de Chloé. BOSC, triple buse. Comme le nom du propriétaire de la voiture.

- Et qu'est-ce qui te dis que cela a un rapport. Cette voiture n'a peut-être rien à voir avec le mec brûlé.

- Pourtant, ce Lucas Bosc a un rapport avec cette histoire. Il a été le petit ami de la fameuse Gladys. Allons voir cette voiture.

Pendant le trajet, il lui expliqua ce que lui avait dit la femme. Malgré cela, il le sentit peu convaincu. Au point que lui même en arrivait à douter. Les deux agents attendaient près d'un véhicule. Il ne chercha pas à en découvrir la marque, cela n'avait aucune importance. Le véhicule était répertorié comme appartenant à Lucas Bosc. L'adresse indiquait la ville de Nice. Bien loin de Paris, mais l'agent auprès duquel il s'en étonnait, ne sembla pas être surpris. Beaucoup de cartes grises n'étaient pas à jour concernant l'adresse.

- De toute façon, avec les papiers trouvés dans l'habitacle, il y a peu de doute. Le permis de conduire et le courrier trouvé dans la boîte à gants sont à son nom.

- Quoi ? s'énerva-t-il. Et vous y avez envoyé du monde, j'espère !

- Et pour quel motif pourrais-je aller questionner cet homme ? Parce que sa voiture a été trouvée stationnée à une cinquantaine de mètres d'un crime ? Ce n'est pas suffisant, tu le sais bien.

Oui, il le comprenait. Trois morts, peut-être quatre et quasiment rien. Oh, aucun d'eux n'était dupe. Sans la mort de Dasnet, les journalistes auraient fait juste un petit article. La secrétaire avait intéressée un moment car sa photo était excitante. Le chauffeur n'avait même pas eu droit à une photo quand il avait été découvert. Seule la mort de Dasnet avait tout fait ressortir. L'homme était riche, connu dans le secteur. Le commissaire l'avait convoqué et sommé d'accélérer l'enquête.

Et bien, demain à une heure convenable, il irait sonner à cette adresse. Il espérait qu'elle s'ouvrirait sur un Lucas Bosc qui lui expliquerait pourquoi sa voiture était garée à l'autre bout de la ville. Mais, son instinct lui disait que celui-ci était l'homme calciné.

....

Il avait sonné déjà deux fois et comme il le pensait, personne n'était venu. Il repartait vers sa voiture, quand un mec l'aborda. Pas de la dernière fraîcheur le type : fringues sales, œil brillant et cerné d'un homme qui dort dehors.

- Vous êtes un flic, hein ? l'apostropha-t-il.

- Bonne déduction, dit-il en dévérouillant la portière avec Police écrit en gros dessus.

- J'ai un ami qui a disparu.

- Il faut aller au commissariat pour cela, rétorqua-t-il un peu agacé.

- Je l'ai fait, j'ai cru que c'était pour cela que vous étiez là ! Il ne répond pas à la sonnette, continua-t-il en montrant la porte du bâtiment qu'il venait à l'instant de quitter.

- Il habite cette maison, précisé -je en lui désignant celle-ci du doigt, le cœur battant.

- Oui. Thomas a disparu il y a presque dix jours.

- D'après mes informations, cette maison est celle de Lucas Bosc. Vous devez faire erreur.

- Non, je ne me trompe pas. La preuve, j'ai la clef de la maison, s'énerva-t-il en agitant un trousseau de clef.

Cet homme, malgré son apparence, semblait sensé dans ses propos. Le seul moyen était de vérifier ses dires.

- De toute façon , vous n'en demordrez pas. Je vous suis.

L'homme eut l'air surpris de sa réaction mais il avança malgré tout, droit sur la maison. Devant la porte, celui-ci glissa la clef dans la serrure et celle-ci se dévérouilla.

- Stop ! N'entrez pas. Refermez la porte, s'il vous plait. Je vous crois. Nous allons discuter de tout cela.

Il ne devait pas le faire fuir. Si la maison était celle de son ami, et cela semblait être le cas, cela changeait pas mal de choses. D'où sortait Lucas Bosc ? L'emmener au Commissariat pouvait l'angoisser et il avait besoin d'informations.
L'homme retira la clef et glissa le trousseau dans la poche de son jean souillé .

- Je préférerais éviter le commissariat, et j'ai bien besoin d'un café, vous me l'offrez, lui demanda l'homme.

- J'ai une meilleure idée. J'habite pas loin. Nous pourrons discuter et vous pourrez prendre une douche.

- J'en ai pris une hier, ce sont mes habits qui puent, ricana-t-il en lui emboitant le pas.

Cet homme n'avait pas le profil d'un SDF. Ses habits étaient usés et tachés, mais lui était propre, aucune odeur d'alcool ou de shit. Dans la voiture, à ses côtés, il ne disait rien. Quand l'inspecteur se stationna, il le suivit sans un bruit. Dix minutes après, ils étaient attablés devant une tasse de café.

- Parlez-moi de ce Thomas, s'il vous plait. J'ai besoin de comprendre.

- Est-ce l'inspecteur qui parle ou l'homme ?

- Cela fait un moment que je n'arrive plus à les dissocier. Pourquoi avez-vous ses clefs ?

L'homme le regarda comme s'il se demandait comment lui expliquer cela. Pas l'ombre d'une inquiétude dans sa posture. Il avala une nouvelle gorgée de café.

- Thomas est ce que je peux appeler mon ami. Je ne connais pas son nom de famille, mais cela n'a aucune importance. Il passe tous les jours me voir dans le coin où je dors. Pas de temps en temps, hein ? Tous les jours. Il ne vient pas pour me filer à bouffer, il vient juste parler. Depuis Mars. Et depuis dix jours, plus une visite, rien.

- Savez-vous s'il a une voiture ? Une Renault Kangoo, précisé-je en regardant mes notes.

- Ah, non. Il n'avait pas de voiture. Il peinait à payer son loyer.

- Et donc ces clefs ?

- L'autre soir, enfin dans la nuit, j'étais passé dans la soirée pour voir si Thomas était là. Et parce que je voulais le guetter, s'il rentrait, je me suis allongé pas loin. Un bruit m'a sorti du sommeil. Au niveau des poubelles. Un truc de jeté, on connaît ce bruit nous autres. Cela peut être une conserve ou un truc qui marche plus pour vous ...bref. Je n'ai aperçu qu'une ombre. Je me suis levé et j'ai été voir. Il y avait le porte-clés de Thomas. Sur le dessous.

- Vous êtes sûr que c'est le sien ?

- Certain, c'est moi qui lui ai donné. Et puis, vous avez bien vu que cela ouvre sa porte.

SUIS MA TRACEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant