Chapitre 13

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Cela doit faire plusieurs heures que je tente de briser le mur qui sépare son esprit du mien. Bien qu'elle pense que j'avance vite, je ne vois aucune différence si ce n'est que je suis fatiguée. Je cherche un moyen d’entrer dans son esprit et de reconnaître ses sentiments mais c'est un échec. Mais alors que je commençais à perdre patience, je remarque qu’il y a un moyen de procéder que je n'ai pas encore utilisé. “Je vais y arriver”. Cette phrase permet de faire tout et n'importe quoi à la seule condition d’y croire. Je me mets à répéter ces quelques mots, puis à le penser très fort et convaincre mon esprit que je peux le faire. Quand je me sens prête à me lancer pour la énième fois, j’y vais. Je ne fonce pas mais visualise son esprit que je ressens à travers les mains qui nous lient. Je me concentre sur ce secret que je veux percer, ces émotions qui me sont inconnues et que je veux découvrir. C’est là que je sens que j’y suis, que je commence à ressentir ses émotions. De la joie en premier, de la joie pour moi, parce que j’ai réussi et qu’elle le sait. Mais aussi de la peur. De la peur que j’aille trop loin que je ne découvre quelque chose qu’elle ne désire pas me montrer. La curiosité me pousse à continuer et je comprends que c’est une chose qu’elle n’a jamais dite à personne: sa captivité dans les locaux d’Hydra. Je pousse plus loin et cherche des émotions sur ce moment douloureux. Après quelques efforts, ce n’est pas uniquement des émotions que je ressens mais aussi des images. Je vois ce dont elle se souvient. Une vision très floue, des regards interrogateurs et remplis d’espoir. Une douleur très importante au niveau de sa tête causée par la révélation de ses pouvoirs, de son don de ressentir les émotions. Bien que cette douleur ne soit que dans ma tête, je dois m’en éloigner si je ne veux pas perdre le contact avec elle. Cette douleur me rappelle le matin où j’ai découvert que j’avais ce don. La même douleur, mais la mienne en m’éloignant de la ville s’est vite apaisée tandis que la sienne a mis plus de deux semaines à se calmer et à se réduire. Je continue d’examiner ce moment. Il y a plein d’agents autour d’elle qui lui posent des questions qu’elle ne comprend même pas. La salle dans laquelle elle se trouve est sombre avec des murs gris béton. Elle a une allure industriel mais les quelques pierres sur le mur me permettent de deviner que c’est un château. Les gardes continuent de l’encercler et de la menacer de leurs questions incompréhensibles, ignorant sa demande de solitude. Je vois, lorsqu’elle tourne la tête, son frère qui souffre lui aussi. Penché en avant, essoufflé, il peine à se tenir debout et chaque geste se transforme en un nuage bleu, ce qui semble le fatiguer encore plus. A sa vue, Wanda réagit mais me laisse continuer ma visite dans ses pensées. Je passe de nombreux moments de souffrance, de doute mêlés à la peur pour sa vie et le désir de vengeance qui grandit. Un désir de vengeance qui vient de cet accident. Une bombe qui apparaît dans un appartement paisible, puis une deuxième qui menace la vie à chaque seconde, qui pendant deux jours va montrer l’horreur de la guerre et créer la haine dans son coeur. Je sens que je commence à perdre le contact, que je glisse comme sur une falaise. Je m’accroche mais sens que c’est fini pour aujourd’hui, que j’ai profité du temps qui m'était donné et que je dois arrêter. Je lâche prise et ouvre les yeux quelques secondes après, que je plisse à cause de la lumière du soleil.
Wanda me regarde inquiète et surprise.
-Ça va ? elle me demande sans réussir à détacher ses yeux de moi.
-Oui et toi ? je demande à mon tour devant sa tête redevenue indéchiffrable.
-Oui.
-Tu parais pourtant troublée.
- Je ne pensais pas que tu irais si loin.
-Tu ne voulais pas que j’aille si loin ?
-Je ne m’y attendais pas que, du premier coup tu réussisses à plonger dans les souvenirs.
-Tu pouvais m’arrêter si tu le voulais.
-Non. Je ne le voulais pas et je ne le pouvais pas. Tu as réussi à  passer le mur sans beaucoup d’aide. Et comme je sais que tu t’inquiètes parce que tu as peur de m’avoir blessée, je vais directement te dire que ça va, j’ai été surprise mais je vais bien.
-Tu me connais trop bien.
-Oui je commence à comprendre que tu t’inquiètes toujours trop pour les autres et que tu refuses que les autres s’inquiètent pour toi.
Je souris de cette déduction, un peu gênée d’être à découvert.
-Je suis démasquée. Et toi, tu as vu quoi en moi, je demande.
-Rien. Je n’ai pas tenté de percer ton bouclier parce que je voulais que tu aies l’esprit consacré à ce que tu faisais.
-Donc tu n’as rien vu.
-Non mais je vais le faire.
-Ok.
-Si ça ne te dérange pas, elle s’empresse d’ajouter devant mon air douteux.
-Non bien sûr. Mais les choses que tu risques de voir ne sont pas très jolies.
-Ça dépend ce que je décide de voir.
-Je ne suis pas aussi certaine que toi.
-Allez, donne moi tes mains.
Je lui tends mes mains et elle ferme ses yeux. Je la sens dès les premières minutes qui brise mes défenses et qui entre sans problème dans mon esprit. Je ne tente pas non plus de résister. Je me souviens alors qu’elle peut lire en moi et que tout ce que je ressens, elle va le savoir. Soudain, des bourrasques d’images m’apparaissent à toute vitesse avec son lot d’émotions. Mes nombreuses visites dans les prisons d’Hydra. Des cris, des pleurs, de la poussière et beaucoup de sang. Des hurlements de douleur, à cause des os fracturés, d’autres que l’on entend encore craquer sous le poids de l’énorme masse en fer qui s'abat sans cesse sur moi. Des poignards qui s’enfoncent dans ma chair, certains qui ne ressortiront que quelques heures plus tard. Une chaîne, rougit par le feu, qui fouette l’air dans le but de me faire peur. Les nombreuses insultes que je crache sur mes bourreaux qui continuent de s’acharner sur mon corps trempé de sang. Nu ou avec des lambeaux de tissus, ils me frappent encore et encore, jusqu'à ce que je leur cède, c’est à dire jamais.
Wanda cherche des souvenirs plus heureux et se dirige vers ma naissance. Mais elle retombe vite dans le piège tendu par Hydra, à mes quelques mois seulement. De la maltraitance, des injections si douloureuses, comme du fer liquéfié qui entre dans mes veines, qu’elle finit par lâcher mes mains et couper le contact.
-Je suis désolée, je chuchote aussi essoufflée qu’elle.
-Tu m’avais prévenu, elle me répond.
On reste figées pendant dix minutes.
-C’est pour ça que tu n’arrives pas à aller plus loin avec ton pouvoir. Tu bloques ton empathie pour ne plus attirer Hydra et te faire oublier. Alors que tu pourrais accroître ton pouvoir beaucoup plus que tu ne le penses.
Devant cette révélation, je reste sans voix. Elle a raison. Je bloque mon pouvoir pour me tapir dans l’ombre et rendre ma vie moins horrible.
-C’est compréhensible, continue-t-elle. D’après ce que j’ai vu, il faut que tu cesses de penser comme si tu es en fuite.
Je ne me sens pas bien. Les arbres deviennent flous et commence à tourner. Ils ont fini par m’avoir. Ils ont réussi à me manipuler pour que je n’évolue pas.
-Mais ne t’inquiète pas, me rassure Wanda. Je vais t’aider, on va tous t’aider. Elle me prend la main et plonge ses yeux dans les miens.
-Je te promets que l’on va t’aider.
-Je sais.
-Alors ne t’inquiètes pas.
Elle se rapproche un peu plus et me serre dans ses bras. Je me sens protégée, la chaleur de son corps me rassure. La douceur avec laquelle elle agit m'apaise et me fait oublier mes inquiétudes. Je profite de ce moment où, pour une fois, c’est de l’amour que je reçois et non de la haine. Depuis que je suis ici, que je fais partie des Avengers, je ne reçois que de l’amour dans tous les cas. Lorsque je sens ses mains caresser mon dos, pour me signifier que tout va bien, je me laisse aller et une larme coule sur ma joue.

Trois jours plus tard, l’entraînement a repris. Je passe plus de dix heures par jour à étendre la surface de capture des sentiments. Avec la technique de Wanda, je peux repérer les personnes à cinq kilomètres et deviner les émotions à au moins trois kilomètres. Je m'entraîne aussi à me battre en utilisant mon pouvoir. C'est assez compliqué mais je persévère. J’évolue assez bien et toute l’équipe est fière et contente pour moi. Ce soir c'est vendredi. Pour cette occasion, et aussi parce que tout le monde a bien travaillé cette semaine, on va tous manger dans la grande salle qui a été aménagée . Pour cette soirée, je décide de m’habiller un peu mieux que d’habitude et je troque mon éternel pull-jean passepartout contre une petite jupe noire et un haut bretelle de la même couleur. Je garde tout de même mes basquettes et ajoute des collants. Lorsque je descends, je vois que je ne suis pas la dernière, mais aussi que je ne suis pas la seule à avoir prêté attention à mon apparence. Steve a sorti un costume noire et Tony à côté de lui a ajouté un truc à sa tenue habituelle parce qu’en ce moment il traîne toujours en costume. En fait, Rodey, Sam et Clint ont aussi mis un costume. Natasha arrive dans une robe rouge qui la met totalement en valeur et Wanda a choisi une jupe comme moi. Quand nous sommes tous prêts, on se dirige vers la grande salle.

La soirée se passe vraiment bien. Le bar se vide petit à petit. J’y contribue un peu et Tony qui s'en aperçoit, fait la remarque.
-Dis, tu as quel âge Aliénor ?
-Je ne sais pas, tu veux quelle carte d’identité ? je demande. J'ai dix-huit ans, dix-neuf ans ou vingt-deux ans.
-Je dirais vingt.
-Nan dix-neuf, j'ai quand même une carte avec mon vrai âge, même si le prénom est Caroline.
-Du coup, tu n'as pas le droit de boire.
-Non mais je fais comme toi, je m'en fiche des règles, je passe outre les interdits, je lance en souriant.
-Très bonne répartie, me répond Tony qui sait qu’il s'est fait avoir.
-Tony s'est fait battre par une gamine, claironne Rodey qui arrive.
-Oh la ferme Rodey, blague Tony.
-Mais tu n’as quand même pas le droit de boire, rappelle Steve qui a tout suivi depuis le début.
-Roh ça va, à peine je l'ai bu, qu'il a disparu. Et puis c’est bon, je me défend.
-Tu peux boire à l’infini sans te retrouver dans les toilettes la tête à l'envers, me demande Tony.
-Oui c'est ça, j'acquiesce en riant.
-Ben t’en as de la chance.
Le reste de la soirée se passe dans la même ambiance. On rigole beaucoup, on décompresse de la semaine. Tout le monde s’amuse, danse ou chante. Je remarque Wanda et Vision en tête à tête et m’étonne de ne pas l’avoir remarqué plus tôt. C'est pourtant si évident. Il ne manque plus que le bisou. Je les trouve tellement mignons, tous les deux, les yeux dans les yeux.
Soudain, la musique se fait de plus en plus basse. Un rapide coup d’oeil vers la sono m’indique que c'est Clint qui la baisse. Il nous fait de grands signes pour qu’on le rejoigne sur les grands canapés.
Il est stressé, déçu et triste. Je ne comprends pas du tout alors par réflexe, je consulte Wanda du regard pour m'assurer que je me trompe. Malheureusement, elle me regarde aussi. Clint s'assoit en face de nous et prend la parole.
-Je ne sais pas vraiment comment vous le dire alors je vais y aller directement. Je vais partir d’ici.
Sous nos exclamations de surprise, ses yeux se mettent à briller.
-Je ne vais pas quitter les Avengers, juste partir pour rejoindre ma femme et mes enfants qui me manquent vraiment. Je sais que vous pouvez vous débrouiller sans moi pour cette affaire je vous fais confiance. Mais si vous avez besoin de moi pour une mission un peu compliquée, je serai là. J'ai juste besoin de retrouver mon autre famille.
Devant son annonce, je reste sans voix. Je comprends sa décision mais elle me rend triste. Tout le monde est un peu comme moi, comme lui, déçu. La fête se transforme en fête de départ et nous essayons de ne plus y penser. Il nous assure qu'il nous rendra visite souvent et que si l'on a besoin d'aide, il n'y a qu'à l'appeler. Alors on continue de danser, parce qu’on veut fêter son départ dignement.



Wow ! Prisonnière est deuxième du classement #Avengers ! Je ne m'y attendais pas du tout, c'est énorme. Merciiiiii !!! Je vous aime ❤
Pour en revenir à l'histoire, je sais que ce chapitre était un peu mou mais je vous promets que les prochains auront plus d'action.

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