Chapitre 4 :

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J'ai jeté ma montre. Et mon réveil. Et l'écran de mon portable est brisé. Ainsi que celui de ma tablette.
J'ai mis en oeuvre tout les moyens possibles pour faire disparaître le temps.
Y compris sécher les cours.
Ça n'a pas plu à tout le monde, mais tant pis.
Je ne supporte plus de voir ma vie rythmée par des aiguilles et des sonneries.
Mon père l'a compris.
Pas ma mère.
D'où la dispute qui a éclaté il y a une demi-heure.
Et, je pense que vous serez d'accord avec moi, personne n'aime les disputes.
Surtout en ayant l'impression d'être le centre de la tempête.
Je suis
la petite graine
d'une plante,
vénéneuse
et mortelle.
Et la petite graine grandit. Encore et encore.
Avec des épines et du sang empoisonné.
Sauf que... non.
Je ne suis pas cette graine.
Je suis juste la porteuse de cette graine.
Une graine que le temps a décidé d'aider.
Je sors de ma chambre.
Avec le temps, on a ajusté le traitement.
Je vais mieux.
En apparence.
Avec le temps...
Je descend les escaliers.
L'horloge de la cuisine semble me défier du bout de ses aiguilles.
Maman hurle.
Papa réplique.
J'entre dans la salle-à-manger. Les parents continuent.
Je ne sais même pas ce que je compte faire. Mes oreilles bourdonnent et les lèvres de maman semblent bouger pour rien. Et celles de papa aussi.
Tic, tac.
Je hurle. Contre le temps. Contre le cancer. Contre mes parents.
Et tout semble s'arrêter. On reste tout les trois figés, à se regarder, englués dans le temps.
Maman me prend dans ses bras. Sa joue mouillée contre la mienne.
On entre ensemble dans l'éternité.
Papa arrive et nous enlace toutes les deux.
Et là, l'éternité éclate.
On est au-dessus du temps. Au-delà de l'éternité.
Dans une bulle. Coincés entre les tics et les tacs.

CrépusculeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant