Chapitre 19 :

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Le quai est vide.
Je sais que le train n'arrive que dans une vingtaine de minutes mais je ne m'attendais pas à ça.
Je m'assoie sur un banc en métal tagé et observe les alentours.
Tout
est
désert.
L'atmosphère est irréelle.
Le brouhaha du hall est à peine audible. Il n'y a pas âme qui vive, que ce soit sur ce quai ou sur celui de l'autre côté des rails.
Une brise souffle, pas assez forte pour pousser les gros nuages bas et menaçants qui cachent le soleil.
Je suis des yeux un sac plastique qui volette face à moi... et mon regard tombe sur un jeune homme.
J'aurais juré que j'étais seule !
Mais pourtant, il est là, il le sourit...
Quand il se lève et se dirige lentement vers moi, je déglutis péniblement. Il a une démarche féline, de prédateur.
Je fais moins la fière que dans le car, lors de ma rencontre avec Blanche-Neige.
Mais à ce moment-là, je n'étais pas seule.
Il s'assoie sans rien dire à l'autre bout du banc.
Je sens qu'il m'observe et après une microseconde de réflexion (durant laquelle j'envisage qu'il soit un prédateur sexuel), je lui retourne son regard.
Il doit avoir vingt/vingt-cinq ans. Les cheveux bruns, les yeux noisettes, la peau caramel. Il est très beau. Presque surnaturel.
Il le  gratifie de nouveau de son sourire éclatant avant de me dire :
— Qui es-tu ?
Sa voix coule comme du velours, envoûtante. Tellement charmeuse que je  mets un petit temps avant d'enregistrer sa question.
Tout à coup, je comprends mieux la réticence de Blanche-Neige.
Involontairement,  mon esprit me ressort les arguments que je lui avais sorti quelques heures plus tôt.
Alors, au lieu de rembarrer cet inconnu et de retourner dans le hall, je réponds :
— Toi d'abord !
Il ne s'arrête pas de sourire.
— Je suis Asher.
Il me dit cela comme si cette simple phrase résumait toute son existence.
J'essaie de lui répondre de la même manière :
— Je suis Aymé.
Je me sens rougir, parce que dans la bouche, ces trois lits sonnent cruches et simplets.
Asher n'a pas l'air de s'en formaliser et m'interroge de nouveau :
— Quelle est ton histoire ?
— Quoi ? je bredouille.
Il est vraiment trop bizarre ! Il a l'air d'un Indien perdu dans le XXIème siècle, avec son phrasé étrange, sa  manière de se mouvoir, de s'habiller...
— Ton histoire doit être unique. Je le sais car seules quelques rares personnes ont ce regard.

CrépusculeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant