I - Introduction

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Assise sur l'accoudoir du canapé de sa petite maison lilloise, Amélie Salier couvait sa première née d'un regard tendre. Thalia était assise par terre sur une couverture en patchwork rose et violet, donnant son doigt à la minuscule main de sa demi-sœur Rose.

Thalia s'était habituée depuis longtemps à la présence de son beau père dans sa vie, après tout, ce n'était pas bien compliqué, celui-ci était aussi présent pour elle qu'un poisson rouge ! Sans vouloir vexer lesdits poissons. À vrai dire, Georges Salier ne s'intéressait pas à elle, et Thalia ne s'en plaignait pas.

Jamais celle-ci n'avait reporté cette attitude sur sa demi-sœur, au contraire, elle l'aimait de tout son cœur. La petite Rose lui laissa entendre son rire innocent alors que Thalia s'était mise à balancer leurs bras en cadence, un immense sourire aux lèvres. Heureuse, l'adolescente détourna les yeux sur sa mère mais fut troublée de son regard soudain mélancolique.

- Maman, tout va bien ? s'enquit-elle, perdant de son sourire.

- Encore ! la rappela à l'ordre la petite diablesse en face d'elle.

Thalia se remit à agiter les bras d'une manière bien moins convaincante, le regard toujours rivé sur sa mère. Celle-ci avait ouvert la bouche pour parler mais s'était ravisée. Finalement, elle essuya ses mains sur son jean et replaça une mèche de son carré châtain derrière son oreille afin de se lever. Thalia sentait le mauvais coup arriver à plein nez, et ses mouvements ne se firent que plus mous encore. Rose lâcha alors ses doigts et se mit à bouder. Amélie vint s'asseoir sur ses talons, derrière l'aînée de ses filles qui, pour ne pas se rompre le cou, se retourna en poussant le sol de ses mains.

- Ma chérie, commença-t-elle solennellement. Tu as désormais seize ans et je me dois de te parler d'une option que tu as depuis quelques temps, même si elle serre mon cœur.

Une petite masse vient se caler sur le dos de Thalia.

- Ton père... Ton père était un grand homme, tu le sais. En fait, il t'a transmis, je crois, certains dons.

Rose qui escaladait tranquillement sa sœur, vient s'échouer en sac à patates sur son épaule.

- ...Tu n'as jamais été à l'aise au milieu des autres n'est-ce pas ? Ils te paraissaient différents, aveugles, infiniment moins sensibles à ce qui fait vibrer ta chair à toi.

Thalia afficha une moue gênée en hochant la tête pour confirmer ses dires. Il était vrai qu'elle n'avait jamais su intégrer naturellement un groupe de son âge, elle s'était toujours forcée à se désintéresser de ce dont les adolescents lamba n'ont que faire, et apprécier ce qui les fait sourire. Son truc à elle, c'était la nature, elle ne voyait rien de plus passionnant qu'une ballade en forêt, où qu'un plongeon dans un lac, ce qui n'était ps forcément au goût de ses "amis". Combien de fois avait-elle grincé des dents lorsqu'ils jetaient leur canette dans l'herbe ?

Elle saisit sa petite sœur par la taille et la déposa sur ses genoux.

- Comment as-tu deviné ? ne put-elle s'empêcher de demander.

- Ton père m'avait dit que tu vivrais constamment en décalage avec les autres, et que ta scolarité et tes relations en seraient contrariées.

- Il... Il a vraiment dit ça ? déglutit la lycéenne.

Rose se mit a jouer avec le large t-shirt qu'elle avait sous les mains, tirant dessus à l'aide de ses minuscules forces.

- Il savait tout cela parce qu'il l'a lui-même vécu à ton âge. Il te comprenait mieux que personne, bien que tu n'en sache rien. Aujourd'hui encore, je suis sûre qu'il te serait un grand ami.

Céleste (en pause) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant