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LUKE

Chiron nous avait bien demandé de ne pas le faire, mais Annabella n'en faisait de toute façon rien à cirer. C'était un esprit libre, ou peut-être que je lui inventais des excuses, et elle refusait qu'on lui interdise quelque chose.

- T'as vraiment fait ça, soupirai-je.

Nous étions en train de rentrer à la colonie. Nous venions de faire exploser un entrepôt rempli de monstres, alors qu'on nous avait juste demandé de nous débarrasser de ceux-ci.

- Ça a été réglé plus vite, sourit-elle.

Là-dessus, elle n'avait pas tort. Il y avait moins de risques, et c'était beaucoup plus rapide. Mais je n'aimais pas le fait d'avoir désobéi. Regagner la confiance de Chiron avait été compliqué, et je n'avais pas envie de la reperdre. Malheureusement, je ne refusais rien à Annabella. Surtout dans son état.

Elle passa une main sur son visage sans quitter la route des yeux.

- Tu veux que je prenne le volant ? demandai-je.

- Vas-y, bailla-t-elle en se rangeant sur le bas-côté.

Elle s'assit à la place que je venais de quitter, et leva ses jambes sur le siège.

- Fais demi-tour, lança-t-elle. On va boire un coup avant de revenir à la colonie.

Je lui lançai un regard dont elle connaissait très bien la signification.

- On s'en fout que j'ai un problème avec l'alcool, de toute façon, je vais bientôt mourir.

Je soupirai, mais obéit. Je la détestais d'utiliser cette excuses sur moi. C'était déloyal. Je ne pouvais presque rien lui refuser de base, mais c'était de pire en pire.

Elle me remercia d'un sourire, et se pencha pour m'embrasser la joue. C'est elle qui me donna les indications pour rejoindre un bar de New York, dont elle avait apparemment entendu parler. Je me demandais quel genre de fréquentations elle pouvait avoir.

- Qu'est-ce que je vais faire de toi, soupirai-je quand elle commanda deux verres d'alcool fort.

Les verres arrivèrent très rapidement, et elle poussa mon verre dans ma direction. Je l'attrapai à contrecœur, et soupirai à nouveau. Qu'est-ce qu'elle ne me faisait pas faire ?

- Cul sec, sourit-elle.

Nous avons entrecroisé nos bras, et renversé la tête en arrière pour boire. Annabella grimaça, et secoua la tête.

- Ça ! Ça, c'était bon ! s'exclama-t-elle.

Je devais au moins lui accorder ça. L'alcool me brûlait la gorge, mais ça avait le mérite de nous réveiller. Je réussis à la convaincre de ne pas commander de deuxième verre, et nous sommes repartis.

Elle posa sa main sur la mienne, faisant des petits ronds avec le pouce. Quand nous sommes arrivés, c'est la même main qui me retint et me tira vers la forêt. Elle m'a mené vers un coin sur la plage où elle avait aménagé un petit coin pour nous deux. 

Nous avons passé la nuit là-bas, en s'inventant une autre vie, et en riant de tout et de rien. Notre petit monde de perfection, avant le retour à la réalité.

Cette nuit-là, elle a fait des cauchemars, et je n'ai pas réussi à la réveiller. Je n'ai pas réussi à la sortir de son enfer personnel.

À la place, je l'ai serrée contre moi, et j'ai enlevé ses mèches de cheveux de son visage. Je ne pouvais rien faire d'autre.

Dans les jours suivants, Annabella a fait une crise. Elle devenait vraiment paranoïaque, et même moi, elle me soupçonnait de lui vouloir du mal. Les pensionnaires l'évitaient. Elle ne pouvait pas leur en vouloir.

[TOME 4]L'Amour du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant