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C'était l'hiver, et je suis descendue aux Enfers. J'avais des rations, de l'espoir et beaucoup de détermination pour me tenir compagnie.

J'avais choisi la saison en connaissance de cause : Perséphone serait là et ce serait beaucoup plus simple de convaincre Hadès de me laisser te récupérer. J'avais beaucoup réfléchi à mon plan. Les mythes sont tous d'accord pour dire que le roi des Enfers est adouci par la présence de sa femme, et ils sont aussi tous d'accord pour dire que Perséphone est une grande romantique. 

J'ai sorti les grands discours à Hadès, mais je n'ai pas eu besoin d'insister pour le convaincre. Il m'a avoué où tu te trouvais, et j'ai commis la bêtise de continuer ma quête. Il m'a dit que les dieux t'avaient entouré d'un cocon pour te protéger des horreurs du Tartare. Un geste d'une ultime bonté. 

Il m'a conduite à l'entrée du Tartare, celle qui est derrière son château. Nous avons un peu discuté, à côté de l'abîme. Il m'a avoué que lui-même avait peur d'y sombrer. Et j'ai sorti la phrase la plus niaise de mon existence - et pourtant! J'en ai dit, des trucs niais. Puis, il m'a laissée. Si tu veux vraiment savoir ce que j'ai dit, demande-lui, je ne compte pas le répéter. 

Je sentais la présence de Cronos, alors j'ai relevé toutes mes barrières mentales. Je ne voulais pas qu'il puisse me contrôler ou quoi que ce soit du même genre.

Et enfin, j'ai sauté.

J'aurais pu utiliser mes ailes, mais j'avais besoin de sentir la chute. Dure, longue, et meurtrière. Je me suis sentie humaine, pour la première fois depuis tellement longtemps. Je me suis sentie mortelle, et ça m'a fait du bien. Je savais que je n'allais sûrement pas mourir, mais je sentais la trace de la mort sur moi. 

Je suis retombée sur le sol après tellement de temps de chute que j'en avais perdu la notion, et peut-être que je me suis tuée. Mes souvenirs sont plutôt flous. Je me souviens juste de la terreur, tellement forte qu'elle m'a prise aux tripes. C'est le seul sentiment qui a sa place au Tartare. Là-bas, tout n'est que peur. C'est elle qui m'a portée aussi loin, me donnant la force de me battre. C'est toujours elle qui m'a permis de continuer. Ma peur de mourir, de perdre les gens que j'aime, et tant d'autres.

J'ai commencé ma traversée, et j'ai regretté de ne pas avoir posé plus de questions à Hadès. Je suis une tueuse, et la Tartare était la personnification de toutes mes craintes. Je revoyais sans cesse toutes mes victimes, et même si je les savais irréelles, elles m'enfonçaient à chaque fois un peu plus.

Cronos hantaient mes rêves. Il me montrait l'avenir que j'aurai pu avoir, d'après lui. J'ai failli me livrer, plus d'une fois. Mais je suis plus forte que ça, et je ne voulais pas céder.

Mais au bout d'un moment, il a décidé de me proposer quelque chose, un marché. Je devais lui laisser une partie de mon pouvoir, et il m'aidait à te retrouver. Un cadeau empoisonné. Quand j'ai fait ce qu'il me demandait, il m'a donné une âme qui avait le visage d'Hélène, et elle ne m'a pas vraiment guidée. Mais le mal était fait.

Tu vois, Luke, si Cronos revient, plus fort que jamais, ce sera en partie ma faute. J'ai accéléré ma chute, et il n'y a plus moyen de faire marche arrière. Il a une partie de mon pouvoir. Et il revient.

Alors dis moi, qu'est-ce que j'ai fait ?

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La chapitre est vraiment court, mais c'est juste le récit d'Annabella, tel qu'elle le raconte à Luke

[TOME 4]L'Amour du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant