Les Chroniques d'Attica

Livre III - Prologue

Vaisseau Mère — jour : 123, mois : été, année : 224

Ils n'étaient pas certains que ce soit le bon moment d'agir, mais les Dieux d'Attica n'avaient plus le choix. On tuait les scientifiques du vaisseau mère un à un, et le moral de ces derniers baissait de jour en jour. Nyx leur avait pourtant promis, si les images satellites étaient à nouveau opérationnelles, on les laisserait tranquilles. C'était sans compter sur le fait qu'elle tenait rarement ses promesses, et le commandant du vaisseau continua de les torturer afin de tenter d'obtenir la moindre information concernant les agissements des Humains à Attica. En réalité, peu d'entre eux en avait, et ils furent souvent tués pour rien. En fait, seul Bagul et ses poux avaient discuté avec Vellia, la déesse serpent au sol et seuls Ksénae et Guarth étaient au courant. Du reste, la situation dégénérait.

Une rumeur circulait. Dans trois jours, Nyx lancerait une offensive dans les cellules et assassinerait le reste des Osdellerae, qui ne lui étaient maintenant plus utiles et, dorénavant, elle n'avait plus rien à perdre, car une chose s'était produite voilà une semaine.

Avec l'aide d'Aurora au sol, manipulant et s'introduisant régulièrement dans le système informatique du vaisseau et de ses serveurs, un des poux ralluma « Le Dieu des Dieux », ou IP GS96 I-Core, comme on le nommait à Attica. Cette unité centrale était la seule possédant une communication à UFLW (Ultra Fast Light Waves), ce qui permettait un envoi rapide de messages audio-visuels et de données cryptées à l'autre bout de l'univers. Enfin, tout est relatif. Le premier relais de L'Union Intergalactique se trouvait à 3 832 années lumières, et le signal l'atteindrait dans environs 23 ans. Il faudrait donc compter 30 à 40 années de plus afin que quelqu'un vienne les aider.

Cependant, les preuves contre Nyx avaient été jointes au message et, on ne sait comment, elle eut vent de cette transmission avec son contenu. Le pou qui l'avait envoyé fut démembré, on envoya ses collègues en cellules avec les autres scientifiques et, maintenant qu'elle n'avait plus rien perdre puisqu'elle sera bientôt qualifiée de traître, Nyx ne se retint plus. Tant pis pour son armée d'androïde toujours désactivée, tant pis pour le semblant de retenue qu'elle avait eu avant envers les membres de l'expédition et même pour les Humains, tans pis pour son statut au sein de l'Union Intergalactique, s'il fallait qu'elle tombe, tout le monde tomberait à commencer par Guarth et sa clique.

C'était donc pour les Dieux le bon moment d'agir, car il n'avait plus le choix. C'était soit cela, soit ils mourraient tous, et Attica avec.

« Combien de temps encore ? fit Guarth à Bagul, en français.

— Trois minutes et treize secondes.

— Et est-on sûr que cela va fonctionner ?

— Non.

— Et est-ce au moins bien préparé ?

— Non plus. Enfin, je ne sais pas. Ce n'est pas moi qui m'en occupe. »

Guarth croisa ses longs bras avec un air dépité. Bagul ne le voyait pas, il se trouvait deux cases au dessus de lui dans le Cube — c'était le surnom de la prison. Puis, brusquement sa cellule de métal aux néons éblouissants se déplaça vers la droite, sur une autre face du bloc. Il regarda alors en bas. Des gardiens venaient de récupérer un autre scientifique, une sorte de poulpe mauve à tête de pachyderme, certainement pour le torturer.

« Celui-là est perdu, dit son nouveau voisin du dessus.

— Merde, c'est Lorde.

— Non, c'est son frère. Lorde est mort il y a deux semaines. »

Guarth soupira. Tout ce qu'il espérait, c'était qu'il soit le dernier de cette immense prison à s'en aller vers la mort. Plus que quelques minutes, et tous devraient survivre, pourvu que le plan fonctionne. Plus que quelques minutes et les cellules de cet énorme cube quadrillé en cellules s'ouvriraient.