Chapitre 2.
Amy.
La mort n'est que le commencement.
Il y a dix ans.
Sous l'eau bouillante je ne cesse de me frictionner, je me sens sale, impure, je suis souillée, il faut que cette sensation disparaisse. Quand l'eau commence à devenir froide et que mon corps a pris une teinte rouge vif, je décide de sortir de la douche. J'essuie avec la paume de ma main la buée sur le miroir et mon regard se porte immédiatement sur les vêtements que je portais à la soirée, gisant sur le sol. J'ai à peine le temps d'atteindre les toilettes que je vomis, mon estomac pris de violentes crampes. Je ferme les yeux en espérant qu'il ne s'agisse que d'un affreux cauchemar mais lorsque je les réouvre je suis allongée sur le carrelage de ma salle de bain, mes habits toujours au sol me rappelant que tout ceci est bien réel. Je suis recroquevillée sur moi-même en position fœtale, comme pour me protéger. Mais il est trop tard on m'a tout pris ce soir j'essaye alors de me relever mais je ressens une vive douleur entre mes cuisses, un rappel de l'insoutenable réalité. J'inspire et délicatement me remets debout, face au miroir. Si mes vêtements au sol n'étaient pas une preuve suffisante, ce que je vois devant moi l'est.
Je ne me reconnais plus, qui est cette fille qui me fait face ? Ces yeux autrefois chaleureux, plein de vie sont maintenant vides. Mon regard glisse ensuite à ma bouche, à cette lèvre légèrement gonflée dont le sang a cessé de couler mais où on aperçoit une coupure. Je continue l'inspection de mon corps, mon souffle se coupe et je sens la bile monter. Des bleus ont déjà commencé à se former autour de mon cou, sur mes bras, j'ai des morsures au niveau des seins. Je baisse la tête complètement abattue et des larmes silencieuses coulent le long de mes joues. Je réalise alors que je m'agrippe à l'évier comme à une bouée, mes articulations sont blanches prêtes à craquer et c'est là que je les vois, les preuves d'une lutte pourtant féroce mais sans espoir. Mes ongles sont pour la plupart cassés, le vernis complètement écaillé et sous certains il y a du sang, son sang.
Je reste là à contempler mes mains pendant plusieurs minutes, interdite de tout mouvement puis un déclic, je passe en mode automatique. Je prends un coton, du dissolvant et mon coupe ongles. Je ne veux rien de lui et encore moins son sang de dégénéré. Cinq minutes plus tard, satisfaite du résultat je me dirige vers ma commode et je commence à m'habiller comme je l'aurai fait pour n'importe quel autre matin. La seule différence aujourd'hui c'est que je ne porte que du noir il n'y a plus de place pour la couleur dans ma vie, la gaieté a laissé place aux ténèbres.
Je m'assois sur le bord de mon lit et je patiente, mes yeux rivés sur le mur, mon regard glisse doucement vers le grand miroir dont je me suis servie pour me préparer hier soir. J'y contemple des photos de ma famille, de mes amis, de ma mère, de moi avec des membres du club. Habituellement ces souvenirs me rendent heureuse mais là rien, je ne ressens strictement plus aucune émotion, le vide a pris possession de mon esprit, de mon corps et de mon âme.
Combien de temps est-ce que je suis restée dans cette position, je ne sais pas, mais un regard par la fenêtre et je constate que la pluie a cessé. Comme un robot je me lève, prends mes papiers, du liquide et enjambe ma fenêtre. Alors que je descends minutieusement le treillis en veillant à ne faire aucun bruit, je vois mon voisin dehors en train de fumer sa clope. Il me fait un clin d'œil, un sourire et pose son index devant ses lèvres comme pour me faire comprendre qu'il gardera le secret. Mais quel secret, qu'est-ce qu'il s'imagine, que je fais le mur ?! si seulement... Je saute les derniers centimètres qui me sépare du sol et sans même lui répondre je gagne le trottoir. Un dernier regard pour la maison qui m'a vu grandir et où ma « famille » dort paisiblement. Instinctivement je passe le doigt sur ma lèvre puis sans perdre une seconde de plus je disparais dans la nuit.
Aux premières lueurs du jour j'arrive devant un immense portail, je lève les yeux et fixe la caméra qui me surplombe, quelques secondes plus tard le portail s'ouvre. Appeler ça l'intuition mais au moment où je passe le portail je me sens protégée. Tout en remontant la longue allée décorée de palmiers je croise des hommes de mains, tous armés certains même avec des chiens muselés. Je devrai sûrement avoir peur, me sentir menacée mais à quoi bon, au fond que pourrait-il m'arriver de pire, mourir ? c'est déjà fait.
J'arrive en bas des marches et lève la tête. Un homme d'une quarantaine d'années me fait face, dès que nos regards se croisent le sien est plein de tendresse et il me tend les bras.
-Amy ma puce.
Je n'ai le temps de prononcer que « Gio » d'une voix que je ne reconnais même pas, elle ressemble plus à une supplique et soudain plus rien.
Lorsque j'ouvre les yeux, je suis allongée dans un lit. Où suis-je ? Je tourne la tête, mon oncle est là, assis tout près, le regard bienveillant. Les souvenirs de la veille refont alors surface et je craque. Je relève mes jambes et enfouie ma tête dans mes mains et lorsque je sens le lit s'affaisser, je me crispe. Ma puce ça va aller je suis là, rien ne peut t'arriver ici. Est-ce que je peux La voix de mon oncle se brise sur ces derniers mots, je l'entends tousser. Est-il en colère que je sois venue ? Je sais que sa relation avec mon père est compliquée et qu'on ne se voit que très rarement mais je suis quand même sa nièce. Je n'ai pas le temps de réfléchir qu'il poursuit.
- Ma puce est-ce que je peux te tenir dans mes bras, s'il te plait, je ne te ferai aucun mal, je te promets.
Et l'horrible vérité me percute de plein fouet, mon oncle a compris, il sait et malgré cela il veut me tenir dans ses bras. A ce moment-là je comprends que ce que j'avais pris pour de la colère était en fait de la compassion, j'ai mal, je souffre et mon oncle aussi. Je pose alors ma tête au creux de son cou, son parfum est apaisant et je laisse mon oncle tenter d'absorber ma douleur. Tout en me berçant Gio me susurre d'une voix calme que tout va s'arranger, qu'il va prendre soin de moi, qu'il va me protéger. Mon oncle devient à cet instant mon sauveur, mon protecteur. Il est l'ancre qui m'empêche de me perdre dans les méandres des ténèbres et de commettre l'acte qui me libérerait de toute cette souffrance.
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KISS, KILL & RIDE (sous contrat d'édition)
RomanceAlors que son père, président du plus gros club de motards de l'état, n'inspire que peur et violence, Amilia incarne bonté et gentillesse jusqu'à ce que la trahison des siens ne la tue. Elle renaît de ses cendres comme le phœnix à sa mort, pour deve...