EIGHT DEGREE

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 Fébrile, je dévale les escaliers de l'appartement, qui mènent à la boutique de fleurs

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Fébrile, je dévale les escaliers de l'appartement, qui mènent à la boutique de fleurs. Dans l'obscurité, les plantes se dessinent sous les rayons de la lune, et leur odeur embaume l'endroit. Celle du jasmin, notamment. Prenant une inspiration, j'essaie d'avancer en faisant le moins possible grincer le plancher, avançant sur la pointe de mes pieds nues.

Ma main se pose sur la poignée. Il me regarde à travers la vitre, un sourire aux lèvres. J'ai le cœur qui bat tellement vite...

Chaque geste est lent. L'abaissement de la poignée. L'ouverture de la porte, la fermeture de celle-ci derrière le bruit. Mais finalement il est là, dans notre petite boutique familiale. Et j'en mourrais de bonheur.

Le garçon de la bibliothèque ne dit pas un mot. Il se contente de me scruter de haut en bas, de son regard appréciateur. Je ne porte que mon pyjama, un ensemble de soie bleu pâle composé d'un débardeur à dentelle et d'un short, offert par ma maman pour mon anniversaire.

« ... Woh, finit-il par lâcher. »

Venant d'un autre garçon, ce mot aurait pu sembler totalement lourd ou déplacé. Mais venant de lui, avec son regard, son sourire... J'ai l'impression que mon cœur va exploser. Ça fait mal.

Je ne réponds pas, mais prend une de ses mains dans les miennes, et le tire vers l'escalier, lui faisant signe d'être le plus silencieux possible.

Nous arrivons dans ma chambre et je l'y pousse rapidement, refermant avec un soupir de soulagement : nous n'avons pas été surpris. Mon Dieu. Je suis en train de faire rentrer en cachette un garçon dont je ne connais même pas le nom dans ma chambre, à 23h...

Il regarde autour de lui, les mains enfoncés dans les poches. Dans cette chambre de fille, avec ses guirlandes lumineuses et ses coussins roses, il fait un peu tache. Mais un élément le rattache à cette décoration trop enfantine : une veste de cuir noire, posée sur le dossier de ma chaise. Sa veste.

Il se tourne finalement vers moi, pour me regarder droit dans les yeux. Je retiens à peine un frisson.

« Tu... Je ne voulais pas appeler, finit-il par murmurer, la voix rauque, presque douloureuse tant elle est basse. Je ne sais pas ce que ton amie t'as raconté mais... Je voulais m'expliquer en personne.

- Et le meilleur moment que tu as trouvé pour ça, c'est au milieu de la nuit...? »

Le tatoué semble d'abord surpris par ma répartie, avant qu'un sourire gêné ne vienne étirer ses lèvres, découvrant un instant ses dents tandis qu'il passe une main sur son visage avec un petit rire.

« Ouais, j'avoue que c'est con, mais j'ai pas trouvé le courage avant, chaton. Alors... Voilà, je viens pour tout te dire, au moins les choses seront parfaitement claires. »

Les mains bien ancrées dans ses poches, les épaules un peu relevées, il semble vraiment stressé par la situation, me fixant dans l'attente d'une réponse, d'une réaction. Et je sais exactement comment j'ai envie de réagir à cette déclaration.

« D'accord, mais avant... Je dois tester quelque chose, ok ? »

Fronçant un peu les sourcils, il hoche la tête, tout sérieux. J'expire un bon coup, tentant de ne pas me défiler. Mais en réalité, j'en meurs tellement d'envie que rien, même pas l'inhibition, même pas ma timidité, ne pourront m'empêcher de le faire.

Un pas. Deux pas. Trois pas. Je suis devant lui. Levant mes mains, je les pose sur ses joues ; et même si mes intentions sont assez évidentes, il ne semble pas tout de suite comprendre, me fixant, visiblement dans l'attente.

Mes talons décollent du sol. Mes lèvres s'approchent des siennes. Et finalement : elles se rencontrent.

Tout d'abord, il ne réagit pas. Tabac et menthe : c'est le goût de son baiser.

Mais quand il réalise enfin ce qui est en train de se passer, je sens ses mains se poser sur mes hanches, tandis que ses pieds reculent. Gestes contradictoires qui le déséquilibrent : il tombe presque sur mon lit, et m'entraîne dans sa chute.

Retenant un cri, j'atterrie sur lui.

Au moins, une chose est certaine : mon premier baiser était une catastrophe.

Mais ses lèvres s'emparent soudain des miennes, sans un avertissement. Je ferme les yeux. Alors c'est ça, les papillons dans le ventre ?

Ses mains toujours sur mes hanches m'arrachent de petits mais violents frissons à chaque légère caresse qu'elles déposent sur ma peau, étant passées sous mon haut trop court. Quand à mes mains, elles se perdent dans ses cheveux trop longs. Ils sentent bon : une odeur de nuit pluvieuse...

Il me serre contre lui, et je pousse malgré moi un gémissement : mon second baiser, lui, aura été une réussite. Je voudrais qu'il ne s'arrête jamais.

Et pourtant, toutes les bonnes choses ont une fin. Il me repousse doucement, les yeux baissés. Il ne me regarde pas.

« Je... Je crois qu'on devrait sortir, déclare-t-il de sa voix essoufflée, hésitante.

- Quoi ? J'ai fait quelque chose de mal, tu-

- Non, bien sûr que non, me coupe-t-il immédiatement. T'es parfaite, chaton, vraiment, mais... Je vais finir par trop vouloir te croquer, si on reste dans ta chambre... »

Cette fois, son regard vient chercher le mien. Et je sens mes joues devenir cramoisies à une vitesse que je n'aurais jamais cru humainement possible. Ce qui le fait rire, comme d'habitude.

TOUCH ME - tome IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant