II

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Kyle était, pour Nick, l'incarnation humaine de la beauté.

Ses longs cheveux blonds platines légèrement ondulés, ses yeux turquoise étincelants, sa peau qui paraissait si lisse et douce... Vraiment tout chez lui était magnifique, du moins, il n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi beau. Quand il le vit pour la première fois, il aurait été capable de l'admirer pendant des heures, bouche bée, s'il ne se faisait pas passer pour un fou en faisant cela.

Kyle avait une bien belle vie, comparée à celle de Nick : depuis qu'il était né, il vivait dans le luxe, était habitué aux choses coûteuses, car ses parents étaient des dealers depuis bien longtemps avant sa naissance, et son père descendait d'une famille bourgeoise. Celui-ci avait déjà une somme d'argent astronomique, et le commerce auquel il participait ne faisait qu'agrandir leurs richesses. Personne ne savait qu'ils exerçaient cette profession, jusqu'à ce qu'une personne de leur voisinage ne les dénonce à la police française. Ils possédaient de grandes cultures de cannabis dans leur sous-sol, bien qu'ils vendissent d'autres drogues, et ce voisin l'avait visité plusieurs fois ; il les avait dénoncé par pure vengeance, mais personne ne connaissait la raison. Cependant, comment avaient-ils réussi à passer la douane américaine avec toutes ces plantes et ces substances ? Tout le monde l'ignore.

Leur fils fumait des cigarettes depuis qu'il avait dix ans, et il ne s'était essayé aux joints qu'une ou deux années plus tard, c'est-à-dire à treize ans, l'âge où il a vraiment commencé à aimer en consommer. Ses parents le laissaient faire, se disant que si ce n'était pas maintenant qu'il commençait, ce serait plus tard. Puis, il avait accès à toute cette drogue gratuitement, alors autant en profiter. C'était alors un énorme fumeur pour son âge ; mais il n'avait pas grand-chose à faire de sa santé physique. Il s'en fichait même de la vie, la mort n'était pas quelque chose qui l'effrayait particulièrement : il se sentait même déjà prêt à y faire face, car il faudra bien, un jour ou l'autre.

Sans compter le fait qu'il ne s'entendait pas avec sa mère, il n'avait aucun problème familial. Il considérait son père presque comme son ami, tant il s'entendait bien avec.

En résumé, il n'avait presque pas du tout de problèmes, car il était quelqu'un que tout le monde respectait, et ses parents l'acceptaient comme il était, et ne faisaient pas comme la mère du brun. Nick aurait rêvé d'être comme lui, et d'être dans la même situation.

À la grande déception de sa mère, celle de Kyle lui ordonna de l'emmener dans sa chambre, ne voulant pas que les ''trop jeunes'' – car elle n'avait pas deviné qu'il avait quinze ans, il faisait beaucoup plus jeune que son âge à cause de sa corpulence – et fragiles prennent part à ses affaires. Elle avait laissé son fils toucher à la drogue, mais ne voulait pas risquer cela avec les enfants des autres ; s'il leur arrivait quelque chose, tout allait se retourner contre elle, et elle ne pourrait plus continuer ce qu'elle considérait son "business". Le blond soupira alors à sa demande avant de tout de même lui obéir, et ils montèrent à l'étage.

Sa chambre était évidemment énorme, un grand lit à baldaquin surplombant la pièce, sur lequel reposait des draps en soie. Il était entouré de plusieurs meubles de grande qualité, qui devaient dater au moins du XIXe siècle. Nick était de nouveau sans voix devant tout ce mobilier, tandis que son voisin se laissa tomber dans son lit, le snobant presque – du moins, c'était son impression – du regard. Il décida de s'asseoir simplement à côté de lui, baissant la tête, n'osant pas lui accorder un regard, et jouant nerveusement avec ses mains.

Le brun avait tort quant à aux pensées de Kyle ; il ne le snobait point. Il trouvait juste son état et son physique déplorables, et en le voyant, il avait presque envie de l'aider. Il lui faisait presque pitié. Pourtant, c'était une personne plutôt égoïste, il s'en fichait de l'état des autres ; c'était la première fois qu'il ressentait une quelconque forme d'empathie pour quelqu'un. Peut-être était-ce par rapport à sa mère ? Il ne savait même pas lui-même pourquoi il était triste pour lui.

« Alors, comme ça, ta mère se drogue, hein ? » commença le blond d'une voix grave et neutre, ne voulant pas montrer l'inquiétude qu'il avait à son égard. Il avait tout de même un assez grand ego, et ne voulait jamais mettre sa fierté de côté.

« Ouais... Et elle boit, aussi. Et le peu d'argent qu'on gagne, elle le dépense dans tout ça... De toute façon, elle en a rien à foutre de me nourrir...

-C'est pour ça que t'es aussi maigre ? »

Nick baissa la tête. Il n'aimait pas qu'on fasse ce genre de réflexions sur sa maigreur, il en avait déjà assez au lycée. Mais Kyle était juste curieux, il avait d'une certaine manière détecté qu'il ne sentait pas bien, et voulait juste savoir les raisons de son mal-être ; en aucun cas il ne souhaitait le blesser, et pourtant, c'est ce qu'il avait fait. Et par ailleurs, il était toujours assez cru dans ses paroles, il ne remarquait même pas s'il disait quelque chose de bien ou de mal.

« C'est l'une des raisons, oui... »

Le plus vieux avait bien remarqué qu'il l'avait mis mal à l'aise, et décida de ne plus poser de questions intrusives, ne plus poser de questions en général. Il ne voulait pas le forcer à parler, surtout contre son gré et s'il ne se sentait pas prêt. Le meilleur moyen était de s'approprier sa confiance, se comporter de manière à ce qu'il comprenne qu'il était une personne à qui il pouvait se confesser sans craintes.

Il se leva de son lit, et Nick le regarda de manière perplexe, le suivant du regard. Il se dirigea vers l'une de ses commodes en bois massif, qui avait toutes sortes de décorations. Mais celle-ci ne regorgeait pas de vêtements ; certes, il y en avait quelques-uns, mais c'était dans le but de mieux dissimuler les nombreuses liasses de billets qu'il avait "emprunté", et qui valaient chacune au moins un bon millier de dollars, une somme plutôt considérable dans les années 1980.

Alors, en voyant tout cet argent qu'il lui tendait – même si pour le blond, ce n'était pas une somme si importante, il était habitué à cette richesse –, il ne put s'empêcher de montrer son enthousiasme, quelque chose qu'il montrait rarement, et prit alors Kyle dans ses bras pour le serrer fortement comme signe de reconnaissance. L'autre se laissa alors seulement faire, trop surpris par cette action, n'étant pas habitué à ce genre d'étreintes. Ils ne l'étaient pas tous les deux à vrai dire, mais apparemment, cela ne dérangeait personne. Ils restèrent dans les bras de l'un l'autre pendant quelques secondes avant de finalement se lâcher, tous les deux souriant assez timidement.

« Merci, merci beaucoup, merci infiniment ! » S'exclama-t-il.

« De rien, c'est pas grand-chose, de toute façon... Juste pour que tu aies de quoi te nourrir. Seulement, ne le dis pas à mes parents... Ils ne savent pas que je leur ''emprunte'' de l'argent.

-Ne t'inquiètes pas pour ça, je n'oserais même pas leur dire bonjour de toute façon... »

Ils rirent légèrement tous les deux, ce qui réchauffa le cœur de Nick ; cela faisait longtemps qu'il n'avait pas ri sincèrement, et qu'il s'était senti en sécurité avec quelqu'un – même s'il se disait lui-même que c'était trop tôt pour lui faire confiance. Malheureusement, le seul moment joyeux qu'il pouvait avoir fut coupé par sa maudite mère, qui vint dans sa chambre pour lui dire de sa voix stridente et désagréable qu'ils rentraient. Il commençait même à croire qu'elle le faisait exprès, ou bien qu'elle le sentait, et cela ne l'étonnerait même pas.

Il salua alors simplement Kyle d'un léger sourire et d'un petit signe de main discret avant de partir en suivant la responsable de tous ses malheurs, du moins la plus grande partie. Elle était bien évidemment rentrée lorsqu'il quittait les bras du blond, et il eut alors droit à un discours sur le fait que l'homosexualité était une défaillance, une maladie ; mais que ça ne l'étonnait pas vraiment s'il faisait parti de ces malades, car il a toujours été une erreur, pas capable de faire quelque chose de bien. Peu importe s'il était différent, elle continuerait de le renier dans tous les cas. Cela la rassurait même qu'il soit comme ça ; elle avait une nouvelle raison de le rejeter, et de lui faire comprendre qu'elle le haïssait.

Ce genre de discours aurait pu le faire déprimer encore plus que d'habitude, et lui donner l'envie de mettre fin à ses jours pour de bon, mais cette fois-ci, il ne fut rien. Il ne l'avait même pas vraiment écoutée. Le soir, il ne s'était pas fait souffrir, il avait brisé cette habitude ; il s'était endormi avec un grand sourire aux lèvres, Kyle étant la chose qui dominait ses pensées.

Pour la première fois, il savait ce qu'était le bonheur, et ce que cela faisait, d'être heureux, même pour une simple soirée.

Ardeur Sentimentale - [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant