Les héros de notre enfance

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Thomas

Ils avaient réitéré l'expérience. Cela me détruisait une seconde fois.

Ne plus avoir la maitrise de son corps alors que l'on reste parfaitement conscient est une torture sans limite.
C'est comme si l'on me faisait assister au spectacle de ma mort psychique.

Parce que j'avais l'impression de me dissocier, de perdre la raison.
J'avais l'impression qu'à chaque seconde je pouvais de nouveau perdre ma volonté et être maîtrisé sans pitié.
J'étais dans une hyper-vigilance permanente et épuisante.
J'étais leur machine.

Vous voyez ces personnes que vous adulez lorsque vous êtes enfant ?
Ces adultes qui représentent votre objectif de vie, votre idéal, votre modèle ?
Ces adultes qui sont pour vous des héros ?
Ou même qui sont des héros, tout court.

Eh bien alors que j'étais là, assis sur mon lit blanc, dans cette pièce toujours trop blanche, je tournais et retournais encore les images des dernières heures dans ma tête.

Cette fois-ci ils ne m'avaient pas fait voyager pour kidnapper Captain.

Non, il m'avait enfermé dans une sorte de parc en pleine nature, même si j'avais rapidement deviné que cela était certainement très artificiel, et qu'il me surveillait sous tous les angles. Enfin...qu'ils nous surveillaient.

Vous vous souvenez quand je vous parlais des héros ? J'ai eu la chance de rencontrer celui qui avait bercé mon enfance.
Il était face à moi dans cette « arène ».

Mais il ne s'agissait pas d'une rencontre amicale, dont rêvent tous les fans.

Oh non. J'avais rapidement senti mes muscles se contracter, sans que je n'en exprime le désir à mon corps.

Alors que j'avançais d'un pas rapide vers lui, l'homme m'avait regardé, affichant un air entre la pitié et l'incompréhension.

Iron man portait sa célèbre armure rouge et dorée.

« Je...suis...désolé. » avais-je réussi à articulé dans un terrible effort de lutte, avant de littéralement me jeter sur lui.

J'étais terrorisé. Mais je remarquai rapidement que, malgré son armure que j'admirais tant petit pour son aspect indestructible, mes mains commençaient déjà à en arracher une pièce.

Mon étonnement avait dû à cet instant impacter mes gestes, puisque je m'arrêtai et le héro répliqua immédiatement d'un mouvement de bras qui m'envoya contre un arbre.
Sonné, quoique déjà presque remis, je regardai mes mains.
Comment pouvais-je arracher à mains nues des pièces de l'armure d'Iron man sans me blesser ?

Mais très vite mes mains quittèrent ma volonté et s'appuyèrent au sol pour me relever.

Le combat repris.

Monsieur Stark réussi deux nouvelles fois à me repousser avec volonté.
Mais finalement, mon nouveau moi prit l'avantage et le pauvre homme était à mes pieds, la tête en sang, inconscient.

Je me souvenais de chacun de mes gestes, de la violence de mes actes.

Alors imaginez mon état intérieur. Mon héro gisant à mes pieds, par ma faute. Et mon corps qui refusait catégoriquement que je m'agenouille pour vérifier sa respiration.

Des hommes sortirent de nulle part et s'occupèrent d'évacuer le héro, pendant que je retrouvais peu à peu mes esprits.

Un hurlement de rage gagna ma gorge et franchit mes lèvres.
C'en était trop, il fallait que cela cesse.

Un homme entouré de ses deux chiens en costard s'approchait de moi à grands pas, suivit de près par la blonde en qui j'avais initialement placé tant de confiance.

« Laissez-moi lui parler, c'est inutile, il n'avait pas la maitrise de... commença Ava.

-Pourquoi tu ne t'es pas arrêté ?! Vociféra l'homme.

Cet être me répugnait. Si l'adjectif psychopathe existait déjà depuis longtemps, tout portait à croire qu'il ait été inventé pour lui.

Janson.

Cette fois-ci, j'avais la parfaite maitrise de mes gestes, et le poing qui s'écrasa sur sa joue droite était volontaire, et contenait toute la rage qui m'habitait.
Chacun des prisonniers de ce bagne avait rêvé de cela.
Et je me savais trop précieux à leur expérience, pour avoir peur et retenir mon geste.

Alors bien sûr, les deux toutous se jetèrent sur moi et me maitrisèrent sans difficulté.
Ma force surhumaine n'était présente que lorsque j'étais sous contrôle.

Le coup de pied que je reçu dans la figure provenait du psychopathe, sans l'ombre d'un doute.

- Arrêtez ! Vous savez bien que nous avons besoin de lui !

Elle s'accroupit près de moi alors que je venais de me rasseoir et tentait de contenir d'un revers de main le sang qui s'écoulait de mon nez.

- Thomas. Je sais bien que tu ne coopère plus. Mais pourquoi tu ne t'es pas arrêté de le frapper lorsque nous avons... libéré tes gestes ?

Sans retirer la main de mon nez, je relevai la tête vers elle, et mon regard fit des allers-retours inquiets entre le visage renfrogné de Janson et celui de Paige.

- Je...quoi ? C'est encore un test hein ? Je n'ai rien maîtrisé jusqu'à ce que vous l'embarquiez !

Ava Paige se retourna vers son confrère, semblant déstabilisée par ma réponse.

- Vous m'avez contrôlé ! Du début à la fin ! Criais-je, davantage pour tenter de me convaincre moi-même que pour leur répondre. »

Aucun d'eux ne me répondit, s'éloignant de moi en échangeant des paroles à voix basse.

Très bien. Alors non seulement on me retirait la maîtrise de mes gestes, mais l'on me supprimait aussi la maîtrise de ma propre volonté.

Stranger Ways [2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant