18 • Hate me

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Trois longues années.
Trois longues années sans Gaïa. Oberyn l'avait oublié à vrai dire. Du moins c'est ce qu'il faisait croire, mais personne n'y croyait. Comment une telle chose pouvait arriver ? Il l'aimerait toujours. Sa haine n'était pas passée. La vipère avait beau sembler être quelqu'un de posé et de stable, sa rancune ne s'éteignait pas vraiment.

Il l'aimait et elle était partie.

Il vivait, oui, avec une peine immense sur le coeur. Cette femme.. Il ne l'avait aimé qu'un an tout au plus, et pourtant il ne cessait de voir son visage, dans ses rêves, dans les dunes du désert, celui-là même où il l'avait sauvé. Ellaria avait compris depuis longtemps sans même qu'il n'ait eu à se confier. Elle comprenait son amant.

Il ne passait pas un jour sans que le Dornien se demande pourquoi elle avait fait ça. Comment avait-elle pu choisir de l'abandonner ? Il ne l'aurait jamais fait.
Son coeur ne cessait jamais de battre pour elle, puis se serrait de douleur.
Son corps, ses lèvres, son esprit.. tout lui manquait.
Oberyn n'avait jamais cherché à savoir ce qui lui était arrivé. Probablement par fierté. Était-elle morte ? Il ne voulait pas le savoir, sa peine n'en serait que plus grande.
Et maintenant ? Qu'allait-il se passer ? Ellaria et lui n'avait plus la même passion, quelque chose s'était brisé à son retour sans qu'il ne s'en aperçoive. Mais la Sand le sentait bien, elle. Elle ne disait rien, ne pouvait pas lui en vouloir, puisque elle mieux que personne savait que l'amour était incontrôlable.

Et de toute évidence Oberyn était amoureux de cette femme qui lui avait filé entre les doigts.

Leur relation était devenue une routine. C'est pourquoi en dehors d'Oberyn, Ellaria avait pour la première fois vu quelqu'un. Sans la vipère. Seule. Et elle retombait amoureuse, doucement, après cinq ans à tenter de rallumer une flamme chez son amant et père de ses filles.
D'ailleurs ses filles avaient été très affectées au début, ces dernières aimaient bien Gaïa. Mais maintenant.. Oh, c'était tout simplement oublié.

Parfois Oberyn avait l'envie de la retrouver, puis il se souvenait de la douleur et la peine de coeur qu'elle lui avait fait subir.
Alors tous ses sentiments retombaient.
Comme s'ils n'avaient jamais existés.

Mais tout de même ? Que devenait-elle ?

Oberyn ?

Il avait accompli sa vengeance. Non sans y perdre un oeil, et la vivacité de sa jambe droite. Il boitait, abîmé par son ultime combat. Mais sa soeur avait été vengée et c'est tout ce qui comptait. Le nain s'était tout de même échappé. Et la guerre.. La guerre menaçait les sept couronnes. Bah ! C'était à son frère de gérer ces affaires. À quoi bon ? Dorénavant, manier une lance était devenue une épreuve. Pas parce qu'il manquait de mobilité, non, il aurait été aisé de trouver une solution. Mais parce que ça ne lui importait plus.

À chaque fois qu'il maniait une arme plusieurs sensations lui revenaient.

La première était celle qu'il avait ressenti en tuant la montagne. Un soulagement énorme. Puis une sensation de vide. Il avait lutté toute sa vie.. pour ça ? Tuer pour la gloire n'avait plus de goût.

La deuxième, c'était Gaïa. Gaïa et son incapacité à tuer le meurtrier de leurs enfants. Gaïa et son dégoût profond pour le crime. Gaïa qui lui rappelait sans cesse ce qu'il avait eu de bon dans sa vie, son coeur.
Et son sourire.

Qui lui brisait le coeur. Chaque nuit. Chaque jour.

Mais la vie continuait malgré tout.

Et quelque part, au fond, Oberyn savait qu'il ne mourrait pas sans avoir vu Gaïa une dernière fois.

L'hiver arrivait à grand pas. Même à Dorne le temps s'était rafraichi. Pas étonnant en même temps. Mais cet hiver serait tellement long.. le soleil allait lui manquer.

Il avait comme projet de partir à.. Braavos. Ville de malheur. Que ferait-il là bas ? Sa destination lui rappelait cette femme. Tout d'elle le faisait souffrir.

Et pourtant, malgré ce rappel piquant de cet amour difficile, il était prêt à embarquer quelques jours plus tard. Son frère n'avait pas besoin de l'avoir au palais. Ellaria l'attendrait, comme d'habitude. La vipère avait besoin de s'évader et seule la mer pourrait résoudre son problème.
Il faisait à peine jour, le soleil peinait à se lever. Et l'air était si frais.. la journée la plus fraiche qu'il avait connu depuis longtemps. Même les embruns étaient violents, et la houle rendait l'ammarage du bateau dangereux.

La Prince de Dorne se posa un peu plus loin, il avait encore une bonne heure, le temps de charger toutes les cargaisons. Sa jambe le tirait, le torturait. Il grinçait des dents. Ces derniers jours sa douleur s'accentuait, prenait beaucoup d'ampleur. Comme si.. Quelque chose se rapprochait.

Quelque chose se rapprochait. Ça oui. Des bruits de sabots au loin. Combien ? Quatre chevaux. Lancés au grand galop. Quoique.. Non. Deux. Il ne savait pas. Il ne savait plus. Une sensation étrangement familière lui prenait le ventre et Oberyn dû fermer les yeux.
Les chevaux s'étaient rapprochés et avaient ralenti. Seul un pas tranquille se faisait entendre.

Et se stoppa devant lui.

- Oberyn.

The Sun Of WinterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant