trois.

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    En octobre, j'ai appris que Florence était ma petite amie.

On me l'a dit pendant que j'étais sur le banc, en EPS. Un mec dans l'équipe adverse au handball m'a dit que j'avais beaucoup de chance de sortir avec une bombe pareille. J'ai dit merci, puis j'ai remis ma vie en question. Elle est allée dire ça à tout le monde. Donc Florence et moi, on sort ensemble, visiblement. Ce qui est bien pour moi, je crois. De plus en plus de gens commencent à me parler et à vouloir passer du temps avec moi, on m'invite à des soirées, j'y revois Louis mais il passe son temps avec des gens que je ne connais pas. On se parle rapidement dans les couloirs, à la pause, mais jamais pour se dire quelque chose qui en vaut la peine, et ça m'attriste parce que j'ai l'impression d'avoir gâché quelque chose, c'est con.

Florence se plaint que je ne l'appelle pas, que je ne l'emmène jamais nulle part. Mais je ne sais pas comment lui dire que je viens tout juste d'apprendre qu'on sortait ensemble et que je viens de découvrir la liste d'obligations officielles du petit ami modèle, donc...

Ça me fatigue.

Je pensais qu'on n'était que des connaissances qui se retrouvent pour baiser une fois de temps en temps – j'ai à peu près résolu mon problème gênant, alors elle est contente, ça va.

Elle m'a dit de l'appeler, un soir, alors je l'ai fait. J'ai pris le fixe et je l'ai emmené dans ma chambre puis j'ai verrouillé la porte. J'ai composé son numéro et j'ai posé ma tête sur l'oreiller, face au plafond, le combiné contre mon oreille, ça a sonné deux fois, puis elle a répondu. Quand on a commencé à parler, j'ai réalisé qu'on n'avait rien du tout à se dire. On parlait des cours. Elle m'a parlé de ses potes, je lui ai dit qu'elle était plus belle qu'elles et elle a rigolé.

Il y a eu un blanc de quelques secondes, et on a fait ce qu'on sait faire de mieux.

Je lui ai demandé ce qu'elle portait, et on est partis de là. Je crois que c'était plus facile pour moi cette fois, parce que je ne la voyais pas, que je ne la touchais pas, et qu'elle ne pouvait pas me toucher non plus. Il n'y avait que sa voix, et ça me suffisait.

***

Pendant la semaine de vacances à la fin du mois, j'ai revu Louis. J'étais dans la pharmacie près de chez lui, ma mère m'avait chargé de lui ramener des analgésiques puisqu'ils étaient sans ordonnance. La première chose que j'ai remarqué, c'est qu'il avait perdu du poids. Ses pommettes étaient plus saillantes sous sa peau, et c'était un peu creux, sous ses yeux. Je me suis approché et il a levé les yeux vers moi. J'ai parlé en premier.

« Salut. »

« Salut. »

« Ça a pas l'air d'aller. »

« Jure. »

« Tu ressembles aux mecs dans Thriller. Ceux qui dansent derrière Michael Jackson. »

« T'es sympa, toi, dis donc. »

« Pardon. Qu'est-ce qui se passe ? »

« Rien, je suis fatigué, c'est tout. J'ai une prescription à prendre, tu m'attends ? »

« Ouais. »

Je me suis éloigné pour prendre la marque que ma mère choisit toujours pendant qu'il partait vers le comptoir. J'entends une femme qui lui dit qu'il n'y en a plus pour le moment, qu'il fallait attendre vendredi prochain pour que le stock soit refait, et il a protesté en disant qu'il en avait besoin tout de suite.

« Bah, désolée, m'sieur, mais moi j'peux rien y faire. Le stock, il est là, où il l'est pas. Essayez la pharmacie sur rue de la Barre. »

« Y'a pas, rue de la Barre, ils ont jamais rien, là-bas. »

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