treize.

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Dès que j'ai pu me libérer, j'ai fait visiter la ville à Louis. Je lui ai montré mon ancien lycée, mon école primaire, ma boulangerie préférée, les cafés. Puis je l'ai emmené au parc de la colline du château et à la station balnéaire d'Antibes, en s'éloignant un peu vers Cannes. On marchait main dans la main dans les rues, j'étais beaucoup trop heureux pour me soucier de quoi que ce soit. En rentrant, on a fait un dernier tour à la plage, pieds nus dans les vagues, le soleil dans les yeux. On a avancé jusqu'à ce que l'eau froide nous arrive en haut des genoux. Il a essayé de me convaincre que parce qu'il avait une vision parfaite, il pouvait voir la côte de la Corse, au loin, et celle de l'Algérie à l'Est. Je lui ai dit que je n'étais pas con à ce point, que c'était limite insultant, il m'a embrassé sur la joue et il a passé une main dans mes cheveux que j'avais laissé pousser. Ma dernière coupe remontait à la fin du mois d'avril.

« Tu t'es laissé aller, un peu. » Il a doucement tiré sur l'une de mes mèches. « On coupe?»

C'est comme ça qu'on s'est retrouvé dans notre petite cour, derrière la maison. J'étais assis sur une chaise au milieu du sol en béton, les cheveux fraîchement lavés et complètement lisses et mouillés, m'entravant la vue. Le chat de la voisine a réussi à me trouver et il me tournait autour des pieds, se frottait à mes chevilles.

« Attention, Styles. » Il a ouvert la grande porte-fenêtre et il est sorti à son tour. « J'ai trouvé les ciseaux et le peigne fin. »

« Cool. »

« Elle dort encore, Gemma ? Toi et elle, vous êtes vraiment les mêmes. Vous adorez dormir, c'est n'importe quoi. »

« Elle déprime. »

« Qu'est-ce qu'elle a ? » Je l'ai senti lisser une de mes mèches avec ses doigts pour décider de l'endroit où il allait couper. Je me suis retourné pour le regarder ; il portait un short rouge qui m'appartenait, et un vieux tee-shirt que je lui avais prêté la première nuit qu'il a passée chez moi.

« Rupture. Je t'expliquerai tout à l'heure... Dis, t'as déjà coupé des cheveux ? »

« Sincèrement ? Non. Mais y a un début à tout. Tu me fais confiance, chou ? »

« Oui. Coupe pas trop, par contre. »

« On sait. Tes cheveux, c'est tout ton charme.»

« Je peux charmer avec autre chose. »

« Mh-hm. Tiens-toi droit, bouge pas. »

Je n'en reviens pas de cette confiance aveugle que j'avais envers lui. Je l'ai laissé faire sans protester. On a discuté pendant que je caressais le chat qui était monté sur mes genoux. Gemma l'avait appelé il y a quelques jours, elle voulait me faire la surprise parce qu'elle voyait que j'étais au bord du gouffre. Il était venu ce matin sans rien me dire.

Est-ce que c'est ça, la vie que je veux ?

Oui. Oui, c'est ça. C'est entièrement ça. Je suis heureux, vraiment. Il fredonne Santiano, sa voix me berce. Et j'ai l'impression que ça va durer, les moments comme ça, alors que je sais très bien que lui, il va retourner à Paris bientôt, et que moi, je vais reprendre ma vie tout seul parce qu'il n'y aura personne à Nice avec moi. J'ai essayé de me rassurer en me disant qu'on allait s'appeler, qu'on allait se voir dès qu'on le pouvait, mais je sais que ce sera compliqué et que, comme ces deux dernières semaines, voire ce dernier été, je resterai sans nouvelles, sans rien. Je lui en veux encore un peu, mais je ne le lui ai pas reproché à voix haute. On vit trop bien, pour le moment. Le soleil brille, même s'il ne va pas tarder à se coucher, le ciel est rose et Louis est . Je dois être en train de rêver. Je ne veux même pas me réveiller.

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