Chapitre 11 (partie 3) - Les oiseaux moqueurs.

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Cela faisait désormais deux jours que nous étions enfermés dans cette auberge lorsqu'on frappa à la porte de notre chambre. Je sursautai et me dirigeai vers la porte. Quand je l'ouvris, je fus surprise de constater que ce fut notre hôtesse.

- Bonjour jeunes gens, dit-elle.

Elle ne savait qui était devant la porte puisque la pauvre était aveugle.

- Un garde royal s'est présenté tout à l'heure à mon domicile afin de vous parvenir une lettre, me dit-elle en me tendant une enveloppe bleue.

- Merci, c'est bien aimable à vous, dis-je en prenant la lettre.

Elle hocha doucement la tête et s'éloigna. Je fermai la porte derrière elle et pris l'initiative d'ouvrir la lettre.

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Octave.

Je commençai à lire la lettre à haute voix :

- Le comte et la comtesse Fabula sont conviés au mariage du Prince et de Cendrillon ce soir-même au château. Veuillez vous vêtir d'une tenue élégante.

Mon souffle se coupa et je plantai mes yeux verts dans les yeux presque noirs d'Octave. Il me fit un grand sourire et bondit sur ses pieds. Je lâchai l'invitation sur le sol et je poussai un cri de joie. Je me hâtai vers le brun et le pris par les épaules.

- On a réussi ! m'écriai-je.

Il hocha la tête dans un rire puis il attrapa son petit sac qui trônait sur le lit. Mon coeur battait la chamade dû à mon excitation.

- Ils n'ont pas perdu leur temps, dit-il, un sourire en coin.

- Je me demande ce qu'il en est de la belle-mère et des soeurs de Cendrillon ! Je m'imagine leur expression lorsque l'on leur a annoncé la nouvelle, rigolai-je.

- Effectivement, ça a du être drôle, rit Octave.

La joie emplissait la pièce et nos yeux pétillaient.

- Je n'arrive pas à croire qu'on ait réussi ! dis-je.

- Ce n'est que notre première mission ; je pense que les hommes masqués seront plus coriaces la prochaine fois puisqu'ils savent désormais qu'ils ont affaire à nous, déclara Octave. Mais ne pensons pas à eux. On a un mariage à fêter !

Je lui fis un grand sourire alors qu'il plongea sa main dans son sac pour en sortir des tissus.

Lorsque notre carrosse s'arrêta au bas des marches menant au château, le soleil était sur le point de se coucher mais il éclairait parfaitement la place où étaient les carrosses des autres invités. Des écuyers s'occupaient des chevaux et l'un d'eux prit en charge le nôtre après que nous fûmes descendus. Ma robe était longue et verte, il n'y avait pas de paniers - heureusement ! -, mon corset était plus clair que mes jupes, ce qui rendait ma robe encore plus belle qu'elle ne l'était déjà. Mes cheveux étaient coiffés en un chignon bas et élégant et quelques mèches de mes cheveux tombaient le long de mon visage, faisant ressortir mon visage pâle et pleins de tâches de rousseur. J'avais un petit foulard blanc qui habillait mes épaules. Quant à Octave, il avait un costume avec un manteau en queue de pie - très joli -, ses cheveux bruns étaient aussi coiffés en un chignon bas et tiré. Cependant, lui n'avait pas de mèches rebelles.

Nous montâmes les marches aux côtés d'autres personnes ayant, sans doute, un titre de noblesse à la vue de leurs tenues reflétant leur richesse. Une fois que nous fûmes arrivés en haut, des valets nous dirigèrent vers une chapelle derrière le château. Beaucoup de personnes s'affairaient dans celle-ci et nous prîmes quelques minutes à trouver des places. Le prince Henri se tenait déjà devant l'autel. Je ne vis pas la belle-mère de Cendrillon ni ses soeurs. Après une dizaine minutes d'attente, une petite musique retentit dans la chapelle et tout le monde se retourna pour apprécier l'arrivée de Cendrillon. Sa robe était longue et blanche, elle était aussi volumineuse et de longues manches de dentelles ornaient ses bras. Un long voile cachait son visage et sa démarche était gracieuse ; elle était faite pour être princesse ! À ses côtés se trouvait le roi, le père du prince Henri. Une fois arrivée devant l'autel, le prince ôta le voile de Cendrillon et un sourire ému s'afficha sur son visage.

La cérémonie commença et dura deux longues heures. Une fois terminée, nous sortîmes et attendîmes les mariés. Je fus surprise lorsqu'on me donna du riz mais je compris qu'il fallait le jeter sur les mariés quand ils sortirent et que les invités leur lancèrent le riz. Ils descendirent les marches du château où les invités leur faisaient une haie d'honneur. Cendrillon nous reconnut, moi et Octave, et s'avança vers nous avec le prince, arrêtant leur marche quelques secondes.

- Nous voulions vous remerciez, c'est grâce à vous que nous sommes ici aujourd'hui ! Si vous ne m'aviez pas présentez au prince, je ne sais pas où serais-je aujourd'hui !

Elle essuya une larme qui coula le long de sa joue et l'essuya d'un revers de main. Le prince appuya ses propos d'un hochement de tête et je leur fis un sourire. Je vis le visage fermé d'Octave, il devait sans doute être triste que Cendrillon ne le reconnaisse pas, elle était comme une tante pour lui, désormais, elle refait son cycle de vingt années sans le souvenir d'Octave. Je lui fis un petit coup de coude et il sourit à Cendrillon et Henri. Les mariés continuèrent la descente des marches puis arrivèrent devant leur carrosse, firent un signe de la main à la foule puis montèrent dans le carrosse blanc. Ce dernier s'avança sur le chemin bordé des habitants du village. J'aperçus alors la belle-mère et les soeurs de Cendrillon dans la foule. Je les montrai alors à Octave.

- J'ai entendu dire qu'elles s'étaient mutilées les pieds afin de rentrer dans la pantoufle d'or. Ce fut un désastre sanglant d'après quelques témoins.

J'écarquillai les yeux de surprise. Ces filles étaient folles ! Je continuai à les fixer lorsque une volée d'oiseaux se précipita sur les deux soeurs. Des invités commençaient à crier d'affolement, faisant partir les oiseaux. Lorsque le dernier oiseau fut parti et que les invités s'écartèrent des deux soeurs, je vis le désastre. Les deux paires d'yeux de Javotte et Anastasie avaient disparus, laissant place à deux trous béants ensanglantés. J'étouffai un cri de terreur avant de me retourner vers Octave qui avait un visage neutre.

- Les contes ne finissent pas par "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants" pour tout le monde, Ruby, me souffla Octave à l'oreille.

Louann,
La Rêvologie

Ruby et le Maître des contesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant