Chapitre 14

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Drago fixait le mur en essayant de ne pas cligner des yeux. Cligner des yeux produisait des effets indésirables. Ça rendait sa vision floue, et il lui fallait cligner des yeux encore plus avant qu'elle ne s'éclaircisse. Sans mentionner qu'à l'instant où il fermait les yeux, il se sentait fatigué. Et il ne pouvait pas dormir parce qu'il avait des choses à faire.

D'abord et surtout, il lui fallait fulminer et comploter sa vengeance contre Peeves et Rusard. Ces deux crétins avaient conspiré contre lui. Peeves s'était contenté de, admettons, être Peeves, mais Rusard s'attirait tout le courroux de Drago. N'importe quel abruti aurait réalisé que c'était le poltergeist qui avait démoli les salles de classe, sans mentionner que les fantômes et les poltergeists n'étaient pas autorisés par la loi à porter une baguette. Peeves avait enfreint la loi en prenant la baguette de Drago. Mais bien sûr, Rusard ne punirait pas Peeves pour quoi que ce soit. Il était probablement submergé par la joie qu'on lui ait fourni un étudiant innocent à menotter et à qui donner du travail forcé pour l'aider à entretenir le château. Le fait que Mac Gonagall n'ait pas été dans son bureau mais se soit retirée pour la nuit n'était qu'un petit réconfort. Ça voulait juste dire que Drago devait attendre jusqu'au lendemain pour entendre sa sentence. Et durant cette attente, il lui faudrait être sans baguette.

Sur un plan cosmique, c'était probablement une juste punition pour avoir enchanté Potter, mais Drago haïssait l'idée de justice. Il aurait dû se trouver dans la Tour Est à cette heure-ci, faisant payer Potter pour cet horrible suçon (dont, à ce propos, Drago ne pouvait plus se débarrasser maintenant qu'il n'avait plus sa baguette ; il avait réellement prévu de le faire ce soir). Et surtout, une série de retenues allait probablement réduire drastiquement son temps libre, un temps que Drago avait eu l'intention de passer à embrasser Potter, pas à récurer les sols.

Par pur dépit, parce que l'univers l'avait privé de cette occasion, Drago imagina avec soin la rencontre avec Potter, qu'on lui avait vicieusement dérobée. Il construisit le fantasme avec soin, essayant de deviner comment Potter réagirait et ce qu'il dirait aux nombreuses et inventives actions de Drago. De façon dérangeante, le Potter du fantasme était impoli et un peu réticent, mais il n'arrivait pas complètement à résister à Drago. La chaleur s'accumulait dans son bas-ventre et son sexe durcissait tandis qu'il plaquait Potter contre le mur et le touchait et l'embrassait partout où il en avait envie. C'était un fantasme agréable, en dépit du goût méchamment doux-amer qu'il lui laissait dans la bouche. C'était si réaliste que Drago avait l'impression de sentir les doigts de Potter dans ses cheveux – Potter semblait avoir un truc pour ses cheveux. Le réalisme monta encore d'un cran quand Potter murmura son nom. Sauf que, une seconde plus tard, Drago retrouva ses esprits et le fantasme disparut pour faire place à la panique.

Potter ne l'avait jamais appelé Drago, pas même dans sa tête, et la voix venait du mauvais côté si on considérait que, dans le fantasme, il le tenait plaqué contre le mur et que ses lèvres glissaient sur la peau découverte de son cou. Alors même que Drago commençait à se demander s'il devenait fou et s'était mis à imaginer Potter se tenant derrière lui, il remarqua une main – une putain de main qui n'était définitivement pas la sienne – appuyée sur les couvertures pas très loin de lui. Il fixa la main avec horreur.

— Drago, répéta la voix qui se trouvait dangereusement proche de son oreille.

Il ne pouvait plus faire semblant qu'il s'agissait du produit de son imagination. Quelqu'un était penché au-dessus de son lit, le bloquait avec son bras et l'appelait par son prénom. Quelqu'un qui avait la voix de Potter mais ne pouvait pas être Potter. Et Drago n'avait pas sa baguette.

Fermer les yeux et enfouir son visage dans l'oreiller était tentant mais c'était une réaction enfantine, aussi il crispa sa main en un poing et se retourna lentement pour faire face à son assaillant. Une partie de son cerveau s'y attendait, mais ce fut malgré tout un choc de découvrir le visage de Potter suspendu à quelques centimètres au-dessus du sien. Drago vit rapidement son visage pâle, ses joues rougies et ses yeux d'un vert impossible et il ouvrit la bouche pour l'accuser de s'être évadé de son fantasme sans permission, mais le sourire éperdu de Potter lui fit oublier les mots qu'il avait en tête, et la pression des lèvres de Potter contre les siennes lui fit oublier de respirer.

D'un baiser scellé - Calendrier de l'AventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant