Chapitre 6

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Tandis que le soleil déclinait à l'horizon, Raminia passait en revue les rangs de l'Armée Gerudo, disciplinés et immobiles dans le désert au pied de la cité. La suzeraine de substitution, qui avait troqué ses vêtements souples et légers pour un plastron et des kyahan dorés, planta avec autorité sa grande hallebarde dans le sable chaud lorsqu'elle arriva face au milieu de la première ligne.

"Gerudo ! héla-t-elle d'une voix forte et fière qui résonnait dans le vent aride. Le Prince Lilian, fils du légitime Roi Zora Sidon s'est aujourd'hui fait enlevé par les barbares Yigas ! Son Altesse la princesse d'Hyrule est alors venu quérir notre aide, nous le noble peuple du sable, pour porter secours à cet Hyrulien détenteur d'une symbolique puissante ! Ce clan terroriste qui depuis des siècles menace notre sécurité s'en ai pris à une important figure de l'autorité de notre royaume, salissant notre honneur et provoquant une fois de plus le peuple légitime des terres d'Hyrule ! Gerudos !!! Pareilles au lotus qui orne notre blason et qui s'épanouit avec splendeur et fierté dans les profondeurs sombres du marécage, notre peuple grandira dignement et noblement, malgré son histoire honteuse et son appartenance passée aux forces obscures ! Il est temps pour nous toutes, mes sœurs, de montrer notre solidarité au peuple Zora et notre allégeance au gouvernement d'Hyrule en nous en prenant une bonne fois pour toute à ce groupe déviant et belliqueux qui menace notre souveraineté ! Alors que notre sable natal s'abreuve du sang de ces êtres maudits qui l'ont souillé, et que le clan Yiga soit dissout par la force de nos armes ! Gerudo, est-ce bien nos valeurs !?

- Pour toujours et à jamais !" répondirent en chœur les guerrières en frappant le sol de leur lance.

Impressionnée par une telle fougue et une telle éloquence, je me trouvai bien vite embarrassée lorsque je dû me tourner vers les troupes hyliennes qui attendaient avec la même docilité derrière moi. Je restai quelques secondes face à eux en hésitant puis, abandonnant tout espoir de surpasser mon amie, je dégainai mon épée que je levai au ciel en criant :

"POUR HYRULE !"

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"Pour Hyrule ?! Sérieusement ?!"

Le fou rire de Raminia reprit de plus bel, et la Gerudo devait se tenir à la rambarde du char tiré par des morses des sables pour ne pas tomber. Honteuse, je croisai les bras et me défendis en rougissant :

"Je suis sûre que tu l'avais écrite au moins 3 jours à l'avance ta tirade !

- Alors que tu m'as appris la disparition de Lilian il y a 2 heures ?! Allez arrête, chacun ses qualités avoue le !

- Nous les Hyliens, on a pas besoin de discours long et pompeux pour être galvanisés par le patriotisme, voilà tout !

- Waaaa, t'as commencé ta phrase par "nous les Hyliens"... souffla Raminia avec un dédain théâtralisé.

- De toute façon, ils ont renchéris avec exaltation, au moins autant que vous !

- Mouais, c'est surtout pas peur de se faire exécuter par ton père au retour s'ils ne le font pas !

- En attendant, on devrait se focaliser sur une autre personne qui risque de se faire exécuter..."

Surprise par ce revirement de sujet et d'ambiance, Raminia leva un sourcil et me dévisagea un instant tandis que je fixai l'horizon désertique crépusculaire avec préoccupation. Elle finit par sourire avec confiance et apaisement :

"Raphaëlle, me dit-elle calmement en posant sa main sur mon épaule. Lilian va bien, tu l'as dis toi-même : son enlèvement ressemblait selon le soldat Zora à une prise d'otage ! Ils ont donc intérêt à le maintenir en vie, quel serait le but de kidnapper un prince rival juste pour le tuer, à part s'attirer le courroux de tout un royaume coalisé contre eux ? Il va bien et on va réussir à le sortir de là dès ce soir, je te le promets."

Je plongeai alors mon regard dans celui jaune et amande de mon amie, lui sourit avec gratitude mais le reposai rapidement sur notre trajectoire, incapable de retrouver une réelle sérénité. La fille de Riju sembla le remarquer et souleva avec une pointe de provocation dans la voix :

"Il n'a pas a s'en faire de toute manière, son chevalier blanc vole actuellement à son secours ! N'est-ce pas romantique ?!"

Prise au dépourvu, je me tournai vers mon amie et répliquai vivement :

"Qu'est-ce que tu sous-entends ?!"

Contente de constater que je rentrai dans son jeu et que la conversation prenait une tournure plus légère, Raminia s'accouda à la rambarde du char et me fit son regard en coin si caractéristique.

"Allez Raphaëlle, je peux comprendre que tu le caches aux autres mais ne me fais pas le coup à moi ! Lilian et toi passez votre temps à vous chercher du regard, tu restes toujours à côté de lui et lui n'arrête pas de te faire des compliments indirects ! On a tous parié sur une date d'officialisation !

- Q-Quoi ?! Arrête d'inventer des choses Raminia s'il-te-plaît, c'est pas drôle !"

Mon interlocutrice frappa la barre de métal et leva les yeux au ciel, outrée par ce que je venais de dire.

"Inventer des choses ?! Et la fois où tu as rougis jusqu'aux oreilles quand il t'a aidé à retirer ta chaussure qui te faisait mal lors de l'anniversaire de couronnement de tes parents l'année dernière, ça sort de mon imagination ? Et quand on s'est tous fichu de toi quand tu es tombé en essayant de grimper sur le kiosque et qu'il a été le seul à te défendre en t'ayant trouvé "adorable", je l'ai rêvé aussi ?

- C'est bon tu peux arrêter, j'ai com-

- Et la fois où tu as insisté un peu trop pour monter avec lui à cheval alors que tu aurais pu prendre Grimm, c'était un mirage alors ? Oh, et quand vous avez passé la journée au lac Toto tous les deux la dernière fois en nous laissant poireauter au domaine Zora, ça aussi je l'invente ? Et le jour où...

- On est amis Raminia ! On se connaît depuis qu'on est nourrissons, évidemment qu'on est plus proches !

- Euh moi aussi je te connais depuis ta naissance, et pourtant t'as jamais voulu monter sur mon cheval..."

Je soupirai pour calmer mon cœur qui martelait ma poitrine et m'appuyai à mon tour sur les barrières du char.

"Écoute on... on s'entend bien, rien de plus. On est juste souvent sur la même longueur d'onde, ce qui explique tous ces... rapprochements. Mais il n'y a rien de plus entre Lilian et moi Raminia, crois moi."

Sceptique, la jeune femme ne répondit cependant rien et se contenta de hausser les épaules. Lorsqu'elle vit au loin les murs de calcaire de la vallée Caltice se dessiner, elle s'approcha de moi et me tendit un large foulard.

"Mets ça sur ta tête pour couvrir tes cheveux et ton visage. Il ne faut pas que les Yigas puissent facilement te reconnaître, ou bien tu deviendrais une cible pour tout le clan et tu risques alors d'y passer."

Comprenant sa logique, j'acquiesçai en prenant le bout de tissu et l'enroulai autour de mon cou, sur mes tempes et mon nez et fit un nœud serré pour maintenir le tout.

Avant de pénétrer dans le couloir étroit à ciel ouvert qui marquait l'entrée en territoire ennemi (souligné par des guirlandes de bois peintes du symbole Yiga), Raminia tira sur les rênes pour arrêter les morses et sauta à terre en se tournant vers les troupes hyliennes et gerudos, qui cessèrent également leur marche rapide.

"Resserrez la formation et restez discrets ! Nous nous ferons forcément repérer par les guetteurs, mais faisons en sorte que cela soit le plus tardivement possible ! Neutralisez toute personne qui s'interposera dans notre avancée, protégez la princesse et surtout entraidez-vous : vous ne formez aujourd'hui plus qu'une seule armée, indivisible et défendant le même objectif, alors faites fi des appartenances et battez-vous pour notre royaume !"

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(1340 mots)

Aventures de Zelda Raphaëlle Hyrule : 1. Sauvetage chez les YigasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant