Chapitre 1

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Ça craint,avoir un petit frère atteint d'un cancer du sang,ça craint,mais vous voulez savoir ce qui craint encore plus?devoir bosser comme femme de ménage de luxe pour payer ses études parce que les économies de ses parents servent à payer les médicaments hors de prix de leur petit cancéreux.

Je ne me plains pas,je serais payer six-cent dollars le mois,ce qui est chez nous,les peu fortunés,une "fortune".

-le patron est levé,à toi de jouer!me lance Agatha,une vieille employée de la maison,elle a les cheveux poivre-sel et des plis aux coins de ses petits yeux gris.

Tout ce que je sais du "patron",c'est qu'il est hyper-riche et qu'il s'appelle Ryan Tremwell alias monsieur T.

Je respire une grand coup,essuie mes mains déjà humides de sueur sur mon tablier blanc et agrippe la carafe contenant le café.

"Il l'aime noir,très noir et sans sucre" m'a dit Agatha.

Je sors de la cuisine et pénètre la tête baissée dans la salle à manger,M.Tremwell à le nez dans un journal et croise les jambes,comme font les hommes,la cheville sur la cuisse.Il porte un pantalon de costume noir et une chemise bleu ciel.

-bonjour,Monsieur,dis-je doucement.

Il semble ne pas m'entendre alors je répète un peu plus fort.

-BONJOUR MONSIEUR TREMWELL!

Il ferme son journal et me regarde en plissant les yeux,qu'il a très verts.

-je ne suis pas sourd,mademoiselle...?

-Miranda Thunder

-je ne suis pas sourd,mademoiselle Thunder,crache t-il avant de former une ligne sévère avec ses lèvres.

Oh-oh,patron de type connard en vue.

Je ne sais pas pourquoi,mais je ressens le besoin express de m'expliquer.

-je voulais...juste...vous

Il hausse ses sourcils broussailleux mais propres.

-il arrive ce café?

Je me tais et hoche la tête. Il pose la tasse à café sur une soucoupe et la tend vers moi,je fais comme Agatha me la montré et verse le liquide précautionneusement. Il plonge alors son regard dans le mien et mes mains commencent à trembler anormalement,la carafe que je tiens divague et le café atterrit sur le pantalon de M.Tremwell.

-putain,Miranda!peste t-il

-oh mon Dieu!m'exclamé-je,je suis désolée!

Je saisis une serviette et commence à l'essuyer maladroitement avant de me rendre compte que ma main est sur une aire cabossée et rigide et que le visage de mon patron se crispe.

-oh,mon Dieu,je suis désolée,répété-je avant de sentir des mains me saisir par les épaules et me trainer jusqu'à la cuisine,avant de refermer la porte derrière nous,entre-temps,j'entend M.Tremwell marmonner un:"un drôle de numéro,celle-là!".

Je ne veux pas être un numéro,je ne veux pas me ridiculiser,je ne veux même pas travailler ici!je me rappelle alors pourquoi je fais tout ça:

-Charlie,Charlie,Charlie,récité-je à la manière d'une litanie,je fais tout ça pour Charlie.

Agatha revient,c'est elle qui m'a sauvé des griffes de monsieur T.

-je n'ai jamais vu ça!s'exclame t-elle,du café sur la table ou sur le journal,mais tripoter les parties sensibles du patron!c'est du jamais vu,vous avez fait fort Miranda!

-je ne l'ai pas fait exprès,je vous le jure Agatha,j'ai commencé à trembler et...

Des hoquets mal placés me coupent la parole et mon visage se baigne de larmes.

-allons,allons,reprenez-vous!

Je hoche la tête avant de me diriger vers les toilettes et de me jeter de l'eau froide à la figure,ça réveille!

Je rattache mon tablier correctement,redresse mon dos,relève le menton et lisse mon uniforme rose clair.Puis je ressors et me dirige vers mon casier,chaque employé en a un,un peu comme dans Grey's anatomy,je m'essuie le visage encore humide avec une serviette et remet du mascara et un peu de gloss,voilà,c'est comme si de rien n'était.

-tu penses gagner les bonnes grâce de monsieur T. en te maquillant vulgairement et en jouant à la cruche?me lance une jeune femme blonde que je n'avais pas vu arriver,elle me dépasse de taille et jette sur moi un regard qui dit d'une voix de pimbêche:"tu fais pitié ma pauvre".

-non,je me maquille comme ça pour ne pas effrayer monsieur Tremwell,tu devrais essayer le eye-liner,ça ne te ferait pas de mal à toi aussi et je suis gauche de nature,c'est un talent!lancé-je avant de m'éloigner en souriant pour que mon gloss soit encore plus rayonnant,j'ai la solution pour les pestes de son genre,ne jamais s'énerver et leur montrer notre plus beau sourire.

Mon "rôle" consiste à:

a)servir le petit déjeuner à M.Tremwell,généralement une bonne dose de café

b)faire la poussière dans le séjour et mettre le linge dans la machine

c)lui servir le diner.

Nous sommes cinq employées femmes,Régina,la peste blonde,grande commère des lieux,c'est elle le mur aux oreilles et aux yeux,Bianca,une petite brune qui vient d'atteindre la trentaine,meilleure amie et auditrice de Régina,Solange,une jeune fille des bas quartiers,qui comme moi,se bat pour aider sa famille,et puis il y'a Agatha,qui travaille depuis huit ans chez M.Tremwell et moi,Miranda Thunder qui va sans doute se faire écraser par ce nouveau job.Il y'a aussi,comme chez tout riche qui se respecte,le major-dom gay,Tony,j'adore ce faux accent british qu'il s'efforce de prendre.

La journée se passe sans encombres,à part les regards méchants que me lance Régina,tout le monde est sympa avec moi.Comme je dois servir le diner,je suis la dernière fille sur place,le cuisinier français de Monsieur T,Patrick lui concocte un plat qui provoque dangereusement mon estomac qui n'a reçu que des crackers à la pause,je résiste à l'envie de me jeter sur le plat,des saints-Jacques à la crème et pose la cloche sur l'assiette. Doucement,comme si ce plat coûtait une fortune,ce qu'il coûte probablement,je sors de la cuisine et tombe sur lui,assis sur une chaise,à la table à manger en ébène,il est habillé comme ce matin,sauf qu'il n'a plus ses souliers et qu'il est déboutonné jusqu'au ventre,je mord ma lèvre inférieure pour réprimer un putain de sourire,il est complètement canon comme ça.Son attention repose sur le smartphone qui parait ridiculeusement petit dans ses grandes mains.

-coquilles Saint-Jacques à la crème,annoncé-je dans un parfait français.

Il relève la tête et me regarde avec étonnement.

-vous parlez français mademoiselle Thunder?

-oui,monsieur,répliqué-je toujours dans cette langue que j'avais appris plus jeune,en vraie habitante de Brooklyn.

-merci,répond t-il avec un sourire en coin.

Je dépose l'assiette devant lui et lui sert un verre de vin.

Il mange en silence alors que je l'espionne,debout comme un pieu au cas ou il souhaiterait quelque chose.

-vous attendez quelqu'un?osé-je demander.

Il s'arrête de manger et me regarde en plissant les yeux,il a de longs cils,je tuerais pour avoir les mêmes,je n'aurais plus jamais besoin de mascara.

-non,Miranda,je n'attend personne.

Il dit mon nom lentement,en détachant parfaitement chaque syllabes,avec tellement de velouté et de sensualité,j'en viens à douter que je m'appelle vraiment comme ça.

-vous vivez tout seul?continué-je

-oui,à part les quelques rats qui font la fiesta dans les conduits d'aération,je vis tout seul,autre chose Miranda?

Il vient vraiment de dire fiesta?

Je secoue la tête et il replonge dans son plat.

-milles dollars,dit-il subitement.

-pardon?

-je vous donne milles dollars si vous acceptez de coucher avec moi,c'est du gagnant-gagnant.

J'écarquille les yeux à en avoir mal à la tête.

Quoi?

M. TremwellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant