Le prostitué

Epilogue

Le plus grand défaut de l’être humain est l’égoïsme mais ce que nous souhaitons n’est pas toujours ce que nous avons. Lorsqu’on aime quelqu’un, on souhaite que cette personne nous aime en retour avec la même force mais cela n’arrive jamais. On peut s’aimer mais jamais avec la même intensité des deux côtés. Parfois, on aime mais la personne aimée ne nous aime pas. Il y a toujours une différence.

Lola avait choisi d’être avec Armand même si elle ne l’aimait pas comme elle avait pu aimer Jassem. Au fond de son cœur, elle savait qu’elle mentait mais qu’importe. Jassem avait déserté. Armand était prêt à tout pour elle et il l’aimait. Lola s’était donc mariée avec Armand mais ils n’avaient pas d’enfants. Ils vivaient ensemble dans un appartement parisien. Armand avait fait carrière et était un sociologiste reconnue. Lola était maintenant Professeur.

10 ans plus tard

Je rentre de la fac. Je dois me préparer car ce soir, Armand et moi devons aller à un débat télévisé. J’ai appris à aimer Armand avec les années. C’est un époux tendre et attentionné. Nous travaillons beaucoup tous les deux. Nous n’avons pas d’enfants car je suis stérile. Armand l’a accepté même si je crois que lui en voulait. Je m’apprête à aller me doucher lorsqu’on frappe à la porte.

« Jassem… Comment m’as-tu retrouvé ? » Ma voix se brise sous le coup de l’émotion, lorsque j’ai ouvert la porte et que j’ai vu Jassem, toute la souffrance que je ressentais est sortie de son tiroir.

« Lola… » Il approche sa main et me touche la joue du bout des doigts. « Tu es toujours aussi belle… »

Je pleure à grosses larmes. Jassem. Celui que j’ai aimé de toutes mes forces. Il est là devant moi. Il a les yeux toujours aussi verts mais il n’a plus beaucoup de cheveux et il est maigre à faire peur.

« Entre. » Je lui désigne un canapé mais il me prend dans ses bras et me serre fort et longtemps. Je me dégage de son étreinte avec difficulté.

« Comment m’as-tu retrouvé ? » je demande encore une fois.

« Tu es marié avec un sociologiste reconnu Lola. Cela n’a pas été trop dur de te retrouver. Si je suis venu aujourd’hui après toutes ces années c’est parce que je vais bientôt mourir et qu’avant, j’aimerais réparer les erreurs de mon passé et tu en fais partie. Tu attendais notre enfant et je t’ai laissé seule alors que tu étais prête à tout pour moi. Le Docteur Trimes m’a appris que tu avais perdu ce bébé. Je suis sincèrement désolé. J’aurai dû être là mais j’étais trop lâche, j’avais trop peur. Je voudrais que tu me pardonnes si cela est possible. » Une larme coule le long de sa joue.

« Te pardonner ? » Je me retourne vers lui. « Sais-tu combien de larmes j’ai versé ? Combien j’ai souffert Jassem ? Ah non tu ne le sais pas et tu ne le sauras jamais. Ce n’est pas parce que tu vas mourir que je vais te pardonner. Tu m’en demandes beaucoup trop. Maintenant vas t’en, j’ai à faire.»

Il se lève et me lance avant de partir. « Je rentre ce soir à l’Hôpital de la Pitié Salpêtrière. Je dois y rester pour dix jours mais je doute que je ressortirai vivant, je suis au plus mal. J’ai un cancer. Viens me voir si tu veux parler. »

La visite de Jassem a tout chamboulé. Je réfléchis plusieurs jours et je me rends compte que je peux lui pardonner. Il souffre également, moi j’ai eu la chance de trouver un semblant de paix grâce à Armand. Je me rends à la Pitié Salpêtrière et demande après Monsieur Belbaki. Je me rends à la chambre indiquée mais elle est vide. Je demande à une infirmière qui passe.

« Mademoiselle, pouvez-vous me dire où est Monsieur Belbaki s’il vous plaît ? »

Elle me sourit tristement « Je suis désolée Madame, Monsieur Belbaki est décédé cette nuit. »

Je suis sans voix quelques secondes. « Merci Mademoiselle. » Je m’assois sur le lit où les draps ont déjà été changés. Je ne pourrais jamais lui dire à quel point je l’aimais.