Chapitre 4

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Installée dans le dressing démesuré de ma mère, je l'aidais à préparer leurs malles. Mon père était incapable de plier un vêtement, et surtout il n'en avait rien à faire. Quant à la gouvernante, celle-ci venait de prendre sa retraite et ma mère avait décidé de s'occuper du recrutement au retour de leur séjour.

Préparer ainsi leurs bagages rendait leur départ un peu trop réel. Je ne pouvais pas m'empêcher de trouver bizarre de me retrouver ici seule avec Gregory. J'avais prévu des vacances pour faire le point sur notre couple, voir s'il me manquait... et je me retrouvais à "emménager avec lui".

— Maman, je peux te poser une question, hésitais-je.

— Si c'est concernant ta jupe, tu devrais faire quelques abdominaux. Je connais un coach excellent qui pourrait d'aider à améliorer un peu ta silhouette.

Une piqûre à l'acide directement dans le cœur ne m'aurait pas fait plus mal.

— Non, c'est... As-tu toujours été certaine de tes sentiments pour papa ? Comment as-tu su que c'était le bon ?

A la voir si confiante, sereine, je me demandais si elle avait déjà eu des doutes dans sa vie.

— Pourquoi me demandes-tu cela ?

— Je me pose la question. Comment peut-on savoir que nous allons passer notre vie avec une personne en particulier ?

— Ma chérie, on le sait c'est tout. Tu n'as quand même pas des doutes. Gregory est parfait. Il est bien élevé, courtois, intelligent, aisé... c'est l'homme parfait pour toi.

— Mais comment sait-on que l'on est amoureux ? insistais-je.

— Ne dis pas de sornettes, l'amour cela passe. Il faut du concret, des projets, des valeurs... c'est cela un couple.

— ...

— Tu ne vas tout de même pas rompre avec lui rassure-moi ?

— Non, non, c'est juste... parfois je me demande ce que nous faisons ensemble.

Elle rit discrètement.

— Ma chérie, toutes les femmes se le demandent, parfois les hommes sont... ils ne voient pas ce qu'il y a au bout de leur nez, ils ne se posent pas autant de questions que nous, nous devons apprendre à relativiser. Prends ton mal en patience, cela passera.

— Oui, tu as surement raison.

— Mais oui, j'ai raison, c'est juste une petite baisse de régime. Vous faites toujours l'amour ?

— Maman !

— Quoi, c'est important ?

Bon sang, c'était pour cela que je ne demandais jamais rien à ma mère. Je pliais ses chemises en soie en silence. Je n'étais pas plus avancée. Et si cela ne s'arrangeait pas ? J'avais parfois l'impression d'avoir un colocataire envahissant plutôt qu'un petit ami. Peut-être que quelque chose clochait que je n'étais pas capable de tomber amoureuse ?

*****

Je passais une nuit épouvantable. Je n'arrivais à trouver ni une position confortable, ni le sommeil tant attendu. Vers cinq heures du matin, j'abdiquais et décidais de faire une virée nocturne. La nuit s'éclaircissait alors que je quittais la propriété au volant de la voiture de ma mère.

J'avais besoin d'une pause, d'une journée de solitude, rien que pour moi. Pour une fois je ne pris pas les routes de village et je m'engageais dès que possible sur l'autoroute. J'avais une idée en tête et ce n'était pas spécialement la porte à côté. Dans la nuit, en pensant à ma relation avec Greg, je m'étais demandé ce que ma grande tante en aurait pensé. Elle était décédée aujourd'hui, mais elle avait toujours vécu à l'écart de la famille, vivant sa vie comme elle l'entendait.

Lui ou toi (plus moi)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant