Chapitre 9

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J'avais promis à Cécile de l'appeler en visioconférence pour lui montrer l'état de la maison. J'attrapais mon ordinateur portable et décidais de me mettre sur la terrasse. De là, je pourrais profiter du soleil et elle aurait une vue d'ensemble sur les travaux. En tenant un verre de jus de fruit et mon ordinateur, je me faufilais au dehors en essayant d'éviter la catastrophe. J'entendis mon nom et tendit l'oreille. Qui pouvait bien parler de moi ? Et surtout pourquoi ?

Je reconnus sans peine la voix de Rémy. C'était surement celui à qui j'avais le moins parler pourtant mon cerveau avait gravé sa voix dans ma mémoire. Je me penchais un peu et aperçu l'un des plombiers.

— Je suis sûr qu'elle craque pour moi, entonnait Bastien.

Je grimaçais. Beurk, certainement pas. Le rire bref de Rémy me fit le même effet qu'un coup de tonnerre.

— Tu n'as aucune chance, dit-il sarcastique. Regarde sa baraque et regarde-toi.

— Et alors ? J'suis un beau gosse, fanfaronna-t-il en bombant le torse.

— Si tu crois que ça suffit ! C'est clair que cette nana, il y a que l'argent qui l'intéresse, regarde son mec !

— Pfft, je ne compte pas l'épouser. Elle pourrait avoir envie de s'amuser un peu.

— Et tu te proposes, c'est ça ?

— Exact !

— N'importe quoi, déplora-t-il en écrasant sa cigarette.

—Tu as vu le nombre d'aller-retour qu'elle fait. Elle doit se rincer l'œil.

— Entre se rincer l'œil et sauter le pas, il y a une marge. Gagne au loto, et tu auras peut-être ta chance, lui tapa-t-il sur l'épaule avant de s'éloigner.

Je rentrais le cœur serré. C'était qu'il pensait de moi. Ce portrait était loin d'être flatteur et pire que tout ce que j'avais pu imaginer. Je n'étais pas juste la fille de riches. J'étais une fille facile, prête à m'allonger pour du fric. Je décidais de reporter mon appel, sinon Cécile verrait que quelque chose n'allait pas.

*****

Les paroles de Rémy me firent réfléchir. C'est vrai que je n'étais pas la fille la plus démonstrative et romantique du monde. Je n'étais pas folle amoureuse, je n'étais même pas certaine d'être amoureuse, mais j'aimais bien Greg. Cela n'avait rien à voir avec les films mais ce ne sont de toute façon qu'un tissu de mensonges. Le cœur qui bat la chamade, les papillons dans le ventre, la passion dévorante cela n'existait pas. Je n'allais quand même pas m'excuser d'être réaliste et de ne pas jouer la comédie du grand amour.

Nous attendions les mêmes choses de la vie, nous nous accordions sur nos priorités et nos opinions, tout était planifié. Un job solide, un mariage, des enfants, une maison de campagne... c'était ça un couple. Nous étions solides, certes nous traversions une mauvaise passe, mais c'était la vie. Je m'ennuyais mais une fois que je travaillerais cela passerait. Nous arrêterons de nous marcher sur les pieds. Greg retrouverait sa routine et son ambition. Il ne passerait plus son temps à jouer avec ses potes et attendre que tout lui tombe dans le bec. Il cesserait de se comporter comme un enfant. Son père l'avait bien embauché dans sa société mais il devait quand même y faire ces preuves.

Oui, tout irait bien, une fois que nous aurions quitté cette maison de malheur.

*****

Après avoir tergiversé pendant des heures, je décidais d'appeler Cécile. J'aurais aimé me confier sur mes doutes au sujet de Greg et moi, mais je savais qu'elle ne m'aiderait pas, elle l'avait toujours détesté malgré tout ce qu'elle prétendait.

— Toi, quelque chose ne va pas, constata-t-elle d'une voix sans appel.

Je me forçais à rigoler.

— Ca, c'est de l'entrée en matière.

— Arrête tes idioties et raconte-moi !

— Rien j'ai juste mal dormi.

Voyant qu'elle n'était pas dupe, j'enchainais.

— Je me suis levée à 00h08 très précisément, je suis descendue, non attends j'ai mis ma robe de chambre avant, puis je suis descendu, j'ai rempli la théière, j'ai ouvert le tiroir...

— C'est bon, stop ! cria-t-elle. Seigneur, que tu es fatigante quand tu t'y mets.

— Je sais, lui répondis-je amusée.

— Bon alors, la maison ?

— Pfft, ça avance doucement.

— Des ouvriers sexys ? se lécha-t-elle les lèvres.

— Non.

— Vraiment ?

— Oui.

— Même pas un seul ?

— Non.

— Dommage, je me serais bien incrustée un week-end.

— Tu es pire qu'un mec, tu sais, feignais-je de m'exaspérer.

— La vie est courte, ria-t-elle. Allez montre-moi les travaux !!!

Je m'approchais de la fenêtre et orientait l'écran dans la bonne direction.

— Baisse un peu... plus à gauche.

Je m'exécutais, puis vérifiait l'écran.

— Non, mais attends, tu mates les mecs ?!

— Quoi ? demanda-t-elle innocente. Ils sont mignons, surtout le beau brun aux manches retroussées.

Je n'eus pas besoin de regarder pour savoir de qui elle parlait. La conversation de ce matin était incrustée dans ma mémoire, de même que les vêtements de Rémy.

— Ca va ? reprit-elle, tu fais une drôle de tête.

— Oui, ça va, je te l'ai dit, je dors mal.

— Non, ce n'est pas ça. On dirait...Oh mon dieu, tu craques pour un mec !

— Chut ! N'importe quoi !

— Oh si, je reconnaitrais ce regard entre mille ! Enfin un qui a brisé ta carapace ! Il a brisé quelque chose d'autre ? demanda-t-elle suggestive.

— Beurk, je me demande vraiment pourquoi je suis amie avec une folle de ton espèce ! grimaçais-je indignée.

— Parce que je suis fun ! Allez dis-moi, me supplia-t-elle. C'est le beau brun, c'est ça ? Tu as du goût.

— Tu racontes n'importe quoi !

— Mouais. Il s'appelle comment ?

— Rémy, répondis-je sans réfléchir.

— Ah ah ! releva-t-elle triomphale.

— Cela ne prouve rien, c'est juste son prénom, me défendis-je.

— Rends-moi un service. Tu me diras comment il embrasse, je te parie qu'il est doué !

— Obsédée !

— Coupable !

Elle raccrocha en me tirant la langue, hilare.

Grâce à elle, je n'arrêtais pas d'imaginer les lèvres de Rémy sur les miennes.

Lui ou toi (plus moi)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant