-9-

1K 48 16
                                    

[— Désolé, Princesse, mais c'est difficile de se concentrer sur ce que tu dis quand tu es face à moi et que tout ce à quoi je peux penser c'est à quel point j'ai envie de t'embrasser !]

La bouche de Clarke s'était ouverte en grand sous le choc de cette révélation sortie tout droit de nulle part et elle avait observé les iris bruns de Bellamy se teinter lentement de la lueur de la réalisation.

Le temps qu'il prenne conscience de ce qu'il venait de dire et que ses traits s'obscurcissent sous la gêne et le regret, toute forme de colère avait entièrement quitté la jeune femme. Ne restait plus qu'une profonde tristesse, car tandis qu'elle regardait Bellamy et attendait qu'il dise quelque chose, n'importe quoi, qui puisse lui rendre l'espoir perdu depuis si longtemps, ce qu'elle lisait à présent sur le visage de son compagnon la plongeait dans le tourment.

— Qu'est-ce que tu viens de dire ? avait-elle demandé, sa propre voix à peine reconnaissable, chuchotis brisé.

Le jeune homme avait immédiatement passé une main dans ses cheveux et levé ses yeux au ciel comme pour y trouver une réponse avant de répondre :

— Rien du tout, je... Oublie ce... Ce n'est pas important d'accord ?

Pourtant, pour Clarke à cet instant, rien n'avait parut plus important que les mots qu'il avait prononcé ainsi que la signification qui se cachait derrière, s'il existait bien une signification cachée.

— Tu regrettes ? avait-elle demandé.

Il s'agissait plus d'une affirmation que d'une question. Un remord évident pouvait se lire sur le visage de Bellamy. Il avait hésité avant de répondre :

— Je ne veux pas que... Je ne veux pas que les choses changent entre nous, Clarke.

Il avait dit cela comme on murmure une prière et le cœur de la jeune femme s'était mis à saigner. Ce qu'elle s'apprêtait à dire allait définitivement changer les choses.

— Eh bien peut-être que moi, j'ai besoin qu'elles changent.

Il avait écarquillé les yeux, attendant la suite.

— Je ne peux plus supporter ça, Bellamy...

Elle avait montré de la main l'espace qui les séparait désormais. Elle avait voulu désigner la distance et l'éloignement qui lui faisaient tant de mal ainsi que le désir et le besoin qui la consumaient chaque jour. Il avait interprété qu'elle ne pouvait plus supporter leurs interactions, leur relation, leur proximité. Elle croyait lui avouer enfin ses sentiments alors qu'il pensait qu'elle le rejetait.

— Est-ce que tu penses ce que tu as dit ? avait-elle interrogé avec une grimace qu'il avait prise pour du dégoût tandis qu'elle était tout simplement terrorisée par sa réponse.

À ce stade, il n'avait plus rien à perdre. Il ne reviendrait pas en arrière. Il ne pouvait qu'avancer. Il voulait être plus pour Clarke. Il voulait être tout pour Clarke, de la même manière qu'elle était tout pour lui.

Bellamy avait alors passé une main sur son visage et avoué :

— Seigneur, bien sûr que je le pense, Clarke. Tu es magnifique. Intelligente. Altruiste. Passionnée. J'ai arrêté de comprendre ce que tu me disais au moment même où tu as commencé à hausser la voix. Parce qu'à ce moment-là...

Il avait levé la main pour illustrer ses dires :

— Le feu de ton regard, avait-il déclaré en passant un pouce sur ses sourcils froncés.

— Le rouge de tes joues, avait-il dit en laissant ses doigts caresser ses pommettes.

— Ton souffle, avait-il murmuré en effleurant sa gorge.

— Et même les battements de ton cœur, avait-il chuchoté en posant finalement sa main sur ce dernier.

Je ne peux plus m'entendre penser, encore moins me concentrer, avait-il finalement ajouté.

La paume du jeune homme, posée sur sa peau, lui avait remémoré cet instant si lointain où elle lui avait dit qu'il était le cœur et où il lui avait répondu qu'elle était la tête. Cependant, elle ne voulait plus être ainsi.

Elle voulait être l'esprit et l'âme, la réflexion et la spontanéité. Elle voulait être complète.

Tout comme six années dans l'espace avaient rendu Bellamy entier.

Six années loin d'elle. Six années auprès d'Echo.

Elle avait senti les larmes affluer à ses paupières, mais refusé de les laisser couler. Au fond d'elle, une tempête d'émotions se déchaînait et elle ignorait laquelle laisser exploser en premier. Elle ne reconnaissait pas l'homme qui se tenait devant elle.

Dans ses yeux, elle pouvait lire comme dans un livre ouvert toute sa vulnérabilité, toute son honnêteté... mais que faisait-il de la femme à qui il s'était lié et qui vivait sur ce vaisseau avec eux, avec lui ?

Finalement, une profonde déception et une amère colère s'étaient emparées d'elle et Clarke avait reculé d'un pas en demandant, la voix brisée :

— Comment peux-tu me faire ça ? Comment peux-tu nous faire ça ?

Réveille-toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant