Chapitre 13

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Mes capacités à me défendre et à utiliser une arme étaient au point. Maintenant, tout ce qu'il me restait à faire, c'était d'attendre qu'un des trois garçons m'appelle pour que je rencontre le fameux Marcus. Notre entretien allait être court. Il fallait que je le voie, que je lui vende de la cam, que je discute assez avec lui pour qu'il me fasse le rejoindre à la planque, et rentrer chez Ernesto. Il nous fallait simplement localiser leur QG, pour que nous puissions récupérer leur otage.

Matt m'avait ordonné de me tenir prête dans les quelques jours qui suivaient. Comme je savais qu'il n'allait pas m'appeler directement, je décidai de partir pour le grand boulevard pour faire le vide dans ma tête. J'embarquais ma guitare, et quelques bombes colorées que j'enfilai dans l'étui.

Je passais sur le pont des fleurs, en m'y arrêtant, pensive. Le soleil miroitait dans l'eau pâle. Les gens et les voitures circulaient bruyamment sur le pont, mais mes oreilles arrivaient à discerner le doux bruit de l'eau qui s'échouait sur les rebords du fleuve. Cela faisait une éternité que je n'étais pas venue ici. J'empruntais toujours le pont des oiseaux, avec Ernesto. Je me souvenais vaguement de l'après midi de notre rencontre. J'avais l'impression que c'était dans une autre vie. Tout avait changé si radicalement. Je n'étais plus cette petite fille en quête de sens... Je l'avais trouvé. Et j'avais dû sacrifier ma vie là haut, pour être avec lui. J'oubliais tout ce que l'on m'avait appris étant gamine quand j'étais aux cotés d'Ernesto. Mais bizarrement, je n'avais pas le sentiment d'être moi même quand j'étais sans lui.

Un klaxon m'arrachait de ma rêverie. Il fallait que j'y aille.

J'arrivais tranquillement à mon endroit habituel. Je sortais mon instrument de sa housse, et ouvrais mon étui pour permettre des pièces de monnaie de venir s'y poser.

Seulement, une idée étrange parvint à mon esprit. Je ne gagnais pas ma vie de cette manière. Je ne gagnais même pas de quoi me payer le bus. Et puis, il y avait assez d'argent dans le compte en banque de mes parents pour financer les besoins en nourriture de l'Afrique entière pendant un an.

Alors, j'attrapais un morceau de papier qui traînait au fond de mon étui, demandais un stylo à un passant, et écrivais en grosses lettres :

"JE N'AI PAS BESOIN D'ARGENT, J'AI BESOIN QUE VOUS VENIEZ DANSER"

Et je pense que ça faisait son effet. J'attaquais ma premiere chanson à peine, quand trois enfants venaient se trémousser au son de mes notes. Ils entrainaient leurs parents avec eux. Puis, un couple de personnes âgées se mirent en place et mimaient quelques pas de valse. Peu à peu les gens se mélangeaient, qu'ils se connaissent ou non.

J'entamais une version acoustique de Sexy Bitch.

"Yes I can see her,

Cause every girl in her wanna be her"

Les plus jeunes connaissaient les paroles, les plus vieux tapaient dans leurs mains. Une petite foule s'était réunie autour de moi. Je me mis à tourner sur moi, sans jamais arrêter la musique, sans jamais m'arrêter pour penser. Je flottais dans les airs.

À la fin de la chanson, je voyais les gens applaudir. Je rougissais, à cause de l'attention qu'on me portait, mais aussi à cause de la satisfaction que tout ceci m'apportait. Et puis, une petite fille qui me semblait familière vint me taper sur la jambe pour que je me baisse vers elle. Elle arrivait à hauteur de mon oreille, et murmura:

"- Il est où le garçon qui joue avec toi d'habitude ? "

J'étais prise de court... On ne m'avait pas encore posé la question.

"- Il n'est pas là aujourd'hui... Mais si tu continues à venir me voir, je suis sûre qu'un jour il réapparaitra."

Elle retourna vers sa famille.

ManoushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant