Le Triskell - Chapitre 1

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  Je connais le poids du néant,

  Je le porte en moi...


Je suis là, étendu sur une plage de St Raphaël, petite ville de la côte d'azur.

Le regard perdu au ciel, j'attribue des formes aux rares nuages et ne pense à rien d'autre qu'aux plantes que je dois rapporter à mon grand-père Abriel, le plus grand druide de sa génération.

Les collines de Provence mon offert tous ce que je cherchais, lavande, romarin... Demain, je pars pour le Jura afin de trouver un Gui très rare qui ne pousse que sur les Frênes. Dans les vergers de la région parisienne, j'ai trouvé du Gui de Poirier. Un petit extra, j'espère que ça lui fera plaisir. J'ai aussi pensé à mon cousin, Nathanaël il est druide médecin. Ces plantes lui seront utiles pour la préparation de potion « magique ».

Voilà 6 mois que je parcours la France à la recherche de plantes rares comme le sureau, la spiriterra, des glands de chêne à maturité différentes, des variétés introuvables de coquelicots, du millepertuis... Des plantes de druides en somme !

Mon grand-père aurait pu faire ce voyage lui-même mais il a prétexté vouloir s'occuper de son nouvel apprenti. Je l'entends encore :

_ Ça te fera du bien et puis Daniel est à une période délicate de son apprentissage ! Et qui sait, tu auras peut-être envie de reprendre tes études linguistiques après. Tu ne dois pas gâcher tes 21 ans et ton potentiel, 150 de QI, ce n'est pas donné à tout le monde ! Crois-tu que ton père aurait été d'accord s'il était encore parmi nous ?!

Tu parles ! C'était juste un motif pour me faire penser à autre chose qu'à...

Je secoue la tête comme si ça aller chasser toutes ces idées noires et tous mes sentiments. Enfin le peu que je suis capable de ressentir. Je me sens si vide parfois que ça me fait mal.

C'est une douleur étrange. Elle crée le néant et le comble, me broie et me construit, m'irrite mais m'apaise. C'est une douleur pleine de contradiction... Elle m'est essentielle et pourtant je voudrais qu'elle me quitte... C'est étrange comme qu'elle chose de sombre peu vous apporter un peu de lumière. En bref, tant que j'ai mal, je vis encore... un peu !

Tant qu'à mon âme, j'ignore dans quel état elle se trouve. Pour les druides, elle est immortelle, il est donc important d'en prendre soin!

Perdu dans mes réflexions, je n'ai pas vu le jeune homme qui se penche sur moi. Il est blond aux yeux bleus, sa peau est dorée par le soleil, environ 25 ans. Il sent le sable, la lotion solaire et les embruns... Il est plutôt beau garçon avec ses cheveux mi- long, c'est peut-être la distraction dont j'ai besoin...

_ Ne me dit pas que tu es toute seule, je ne le croirai pas !

Il a un accent sans doute germanique, rien d'étonnant en ce mois d'août dans le sud de la France. Je me relève sur les coudes et penche la tête sur le côté en affichant « mon » petit sourire... Il parait que je suis une jolie fille. Pff... Peut-être, je m'en fiche. J'ai toujours considéré que mon mètre soixante-dix était disproportionné par rapport à mes 50 kg (ou l'inverse) et le châtain de mes cheveux et le noisette de mes iris n'ont rien d'exceptionnelles, pas même ma poitrine, un 85 C banal à notre époque ou seul les gros bonnets trouvent grâce auprès de ces messieurs... Pourtant, je ne manque pas de prétendant...

_Pourquoi, tu me proposes ta compagnie ?

Et voilà que je minaude, ôte théâtralement mes lunettes de soleil Dolce & Gabana en battant des cils. Il est sous le charme, je le vois bien à la manière dont il se laisse tomber sur le sable à côté de moi. Je l'observe de nouveau. Tablette de chocolat à vous donner envie d'une crise de foie, avant-bras solides et pectoraux attrayant mais soudain un éclat bleuté attire mon attention. Autour de son cou, pend un petit galet rehaussé d'un symbole Oghamique, au bout d'un cordon de cuir marron. Je suis quasiment certaine qu'il s'agit d'une des runes de Merlin... (Oui, oui vous avez bien compris, Merlin l'enchanteur !) Mon grand-père en possède deux. Selon la légende, Merlin aurait créé une série de 20 runes rehaussées d'un symbole Oghamique. Chacune aurait un pouvoir particulier mais nous n'en savons pas plus. La légende s'est perdue dans le temps...

Le tracé net et brillant de cette rune n'est visible que pour les sorciers. Est-ce que ce type est un druide ou peut-être un Oblaire (un étudiant) ?

-Joli collier ! Dis-je en le montrant du menton.

-Oh ça ! Je l'ai acheté l'année dernière pendant un voyage à Dublin. Si tu veux, je te l'échange contre un verre en tête à tête avec moi !

Je me saisis, délicatement, de la rune en prenant soin de frôler le torse du garçon, il est aussitôt parcouru d'une minuscule chair de poule.

-OK, je m'appelle Kathleen et toi !

-Frantz ! Et je viens de Berlin, tu connais Berlin ? C'est la meilleure ville pour faire la fête, et toi tu viens d'où ?

Je suis repassé au « Continental Hôtel » à 150€ la nuit, je peux me le permettre ou plutôt mon grand-père peut me l'offrir ou j'ai pris une longue douche et me suis préparé : épilation, maquillage, coiffure et petite robe parme légère, spartiates argentées et accessoires assortis. Puis je rejoins ...heu, comment s'appelle-t-il déjà ? Ah oui ! Frantz dans un petit resto de Fréjus « La moule joyeuse » tout un programme !!! Enfin, il parait que la table y est bonne.

Nous mangeons, nous buvons puis nous allons nous promener sur les bords de mer ou un marché de produits locaux a lieu tous les soirs pendant la période estival. Puis nous décidons d'aller sur la plage et de marché un peu. L'air est doux et frais en comparaison de la touffeur de la journée. Les petites vagues Méditerranéennes lèchent mes pieds et j'écoute Frantz, d'une oreille distraite. J'enregistre l'essentiel, qu'il a 23 ans, qu'il est étudiant en histoire de l'art, qu'il vit à Paris depuis un an, qu'il est de Berlin, qu'il profite de la vie... Il me pose des questions auquel je réponds le plus évasivement possible. Je lui dis que je suis née à Dublin, que j'ai étudié les langues à la Sorbonne mais que j'ai décidé de prendre une année sabbatique... Bref, je lui raconte le strict minimum. Il n'a pas besoin de savoir que je n'ai jamais connu ma mère, que j'ignore même si elle est encore en vie, que j'ai perdu mon père à l'âge de cinq ans des suites d'un cancer généralisé, que mon grand-père m'a élevé et enseigné les arts druidique, que j'ai un don de télékinésie et que j'ai fait une dépression il y 8 mois parce que... Non, je ne veux pas, je ne veux plus y penser... Je secoue la tête comme à mon habitude pour chasser mes idées noires.

_... Si je t'assure, tu es vraiment une très belle fille !

J'avais presque oublié la présence de Frantz. Je lui souris timidement, comme pour rattraper le coup et il replace une mèche de mes cheveux derrière mon oreille ; Je déteste ce geste, il me semble pitoyablement romantique. Puis, fatalement, il se penche vers moi et plaque ses lèvres sur les miennes. Je ne ressens rien, pas même le commencement d'un frisson. De toute façon, je sais comment ça vas finir. Nous allons continuer notre balade, il passera son bras autour de mes épaules, nous converseront encore un peu et puis ça se terminera par « ton hôtel ou le mien ? ».

Après tout, c'est tout ce que je cherche ! Un peu de compagnie et de chaleur humaine.

Marilyn Monroe a dit : Le sexe fait partie de la nature et j'obéis à la nature! J'adhère complètement à sa philosophie !

  -/-

Il est 7 h 30 et mon train part dans moins d'une heure. Frantz dort encore lorsque je ferme mon sac de voyage et que je jette à la poubelle le préservatif usagé et son emballage. Je m'empare du bloc note avec en-tête de l'hôtel et rédige un petit mot :

C'était sympa ! La chambre est payée jusqu'à 11 h 00. 

A un de ces quatre.

Kathleen.

Ps : merci pour le collier.

Je jette un dernier coup d'œil pour voir si je n'ai rien oublié, vérifie mes billets de train et sors de la chambre à pas de loup. Je ne veux pas réveiller ce type, ce genre de situation est toujours désagréable, on ne sait jamais quoi ce dire... C'est vrai, on savait que c'était juste comme ça dans un seul est unique but et c'est encore plus ennuyeux lorsque le garçon s'est révélé décevant, comme c'était le cas cette nuit !

Bref, je referme la porte, prend l'ascenseur, dépose les clefs à l'Hôtesse en lui expliquant qu'il reste quelqu'un dans la chambre et cours vers la petite gare de Fréjus-St Raphaël. Le soleil m'aveugle et la fraîcheur nocturne s'est évanouie. La journée promet d'être chaude dans cette région...

Nexus ou les chroniques de Kathleen St PatrickOù les histoires vivent. Découvrez maintenant