Lupus et moi jouions beaucoup, il était simple pour nous deux de nous comprendre, de nous aimer, d'être nous-même sans crainte de jugement, de fuites ou quoi que les autres puissent dire.
Une fois, je m'étais échappée la nuit avec mon cher ami pour aller regarder les étoiles, je savais qu'il était différent, c'était mon meilleur ami depuis deux ans à ce moment. Nous nous étions allongés à l'orée de la forêt, j'avais ma tête sur son flanc, il soufflait doucement et les volutes de fumée s'élevaient vers le ciel rempli de constellations.
Lupus, de sa voix qui ne résonnait que dans ma tête, me dit en regardant les étoiles.
"Toutes ces étoiles sont peut-être déjà mortes mais elles continuent de briller. Elles ont vu plus de choses que moi
- Tu as quel âge, Lupus ?
- Tu ne veux pas savoir
- Dis-moi
- Non
- Pourquoi ?
- Regarde le ciel"
Ce fut la première fois que je me demandais quel âge Lupus avait, et la dernière aussi, de toute façon, ces détails qu'il ne me révélait pas, c'est parce qu'ils n'avaient pas d'importance.
"Ici, tu as la ceinture d'Orion"
Avait-il fini par murmurer, sans ouvrir sa gueule remplie de crocs tranchants, je l'observais, et son regard semblait transpercer le ciel lui-même, la voûte semblait claire et apaisante partout où d'autres l'auraient trouvé effrayante. Qu'est-ce qui nous avait pris de sortir si tard, seuls, pour marcher, pour parler et observer les étoiles alors qu'elles ne m'avaient jamais vraiment intéressées ? Qu'est-ce qui nous avait pris de nous allonger là, à côté de la route, à côté de la forêt alors que mille dangers auraient pu en surgir et mettre un terme à nos petites vies insignifiantes ?
Sûrement juste l'innocence empreinte de bêtise des enfants.
Je me souviens, pour l'histoire suivante, des fêtes de fin d'année à l'école du petit prince, elles étaient organisées chaque année pour fêter le départ des dernières années vers le CO, cycle d'Orientation ou simplement l'école secondaire puisque je doute que beaucoup d'entre vous comprennent ce qu'est un CO.
Ainsi, chaque année, les élèves de tous âges attendaient impatiemment cette fête pour la "boom" le soir. Je n'aimais pas cette célébration, il n'y avait pas une once de rock'n'roll et il aurait fallu un véritable miracle pour entendre ne serait-ce que quelques notes des Rolling Stones et un miracle dix fois plus gros pour entendre ne serait-ce que Highway to Hell dans le gymnase.
Disons que j'y allais plus par commodité que pour autre chose, je me forçais à y participer pour la seule et unique raison que peut-être que si les élèves me voyaient en dehors des heures de cours, ils verraient que je ne suis pas si différente et en aucun cas un monstre.
De nombreuses années s'écoulèrent avant que je ne me rende compte que je resterai toujours seule, que ce soit pendant les slows ou en général dans ces soirées et que même Lupus avait cessé d'avoir espoir.
Très bien, juste avant que l'on ne déménage, j'avais décidée que je voulais danser, ne serait-ce qu'une fois, avec quelqu'un et il m'importait peu de savoir qui. Je voulais juste me sentir comme les autres le temps d'une soirée.
Je pense que, pour les autres, je dus avoir l'air vraiment conne ou gênante, mais ce soir-là, j'avais dansé. C'était ridicule de dire ça comme ça, vraiment, mais j'avais dansé avec Lupus. Il avait changé, pour quelques minutes, avec l'apparence d'un garçon de mon âge, pas fort, plutôt dans le genre faible, avec des cheveux un peu sales, bruns, un air basique, des yeux toujours du même bleu.
Il faut comprendre qu'il n'y a jamais eu aucune ambiguïté entre nous, j'ai toujours été plus proche des animaux que des humains, la preuve en est que Lupus était mon ami, un membre d'une meutre qu'il n'avait jamais eu et que j'avais toujours voulu.
D'aussi loin que je puisse me souvenir, ça reste un de mes moments préférés, même si les autres ont trouvé ça étrange, que j'ai détesté la musique et que des moqueries fusèrent à nouveau.
Le lendemain, Lupus mourrait.
Une autre fois encore, Lupus et moi nous baladions dans la forêt, pour courir le plus loin possible, comme un jeu, c'est sans surprise, bien sûr, qu'il était plus fort. Nous nous amusions, amis plus que tout, bien plus que tous les jeux que nous pouvions inventer, mon ami lupin m'entraînait à réguler ma respiration, agrandir mon endurance, aux coups, à la course, à la fatigue.
Il voulait faire de moi quelqu'un de fort, me poussant juste à la limite mais sans jamais me le dire directement, toujours en essayant de faire en sorte que je ne le remarque pas. Avec lui, je pouvais courir jusqu'au village voisin et revenir encore et encore et encore sans problème. C'était dingue, il arrivait à me rendre plus forte, plus résistante et à faire en sorte que mon esprit soit moins fragile même si pour cela Lupus avait besoin de me faire me renfermer et me faire adopter un caractère mille fois plus passif/actif et mille fois plus dangereuse.
C'est amusant de dire qu'une enfant est dangereuse surtout quand elle a 11-12 ans et qu'elle parle dans le vide à longueur de journée le weekend en faisant en sorte que personne (ou du moins pas trop de monde) le remarque.
Au fond, je me demande ce qui étais et est réel, est-ce qu'ils existent ? Est-ce que Bélial est réel, est-ce que Guy est réel ? Est-ce que les gens ne peuvent simplement pas les voir ou est-ce que ce n'est que dans ma tête qu'ils apparaissent comme des fantômes de personne que j'aurais pu connaître ?
Comment cela se fait-il que je puisse CHOISIR certains de mes amis, les créer de toutes pièces à partir de profils psychologiques, à partir de mes propres écrits ? Je ne sais pas, au fond, je me dis qu'ils ont une part de réalité, quelque part entre ce qui est connu et ce qui ne l'est pas.
Je ne crois pas aux fantômes, aux dimensions différentes dans lesquelles vivraient différents types de créatures et la superstition s'est toujours tenue très loin de moi. Mais la folie ne me semble pas... juste non plus, je me sens déjà folle, comme tous les saints d'esprits.
Avec une tête remplie de pensées farfelues et absolument pas dévouée à vous, mes chers lecteurs inconnus, je vous souhaite tout de bon
Lauren M. Marth