Chapitre 17: Kevin

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Quand Gavin est venu, Solène était là, nous étions chez moi et personne d'autre dans l'appartement ne dérangeait nos jeux légers. Alors nous continuions et le grand jeune homme, qui me dépassait de plusieurs têtes, me parla un peu plus de son ami Kevin. 

Il est vrai que je passais du temps avec, mais je ne lui posais pas tant de questions que cela, c'est surtout lui qui s'intéressait à ce que je pouvais bien faire pour occuper mes journées et mes moments de libre. C'était encore le début de l'année et les  bilans me semblaient bien loin. C'était très différent de ma troisième année de scolarité au Cycle d'Orientation, car je savais ce que je voulais faire, je n'avais pas de problèmes majeurs concernant mes notes et j'étais une élève moyenne au niveau des bulletins.

Pourtant, si l'ont lisait ces derniers, deux commentaires attiraient toujours l'attention. Premièrement, venant de ma professeure d'anglais qui ne tarissait de louanges à mon égard et de mon professeur de français qui voyait en moi la future Patricia Cornwell. 

Enfin, c'était l'après-midi, et nous parlions de Kevin, Solène ne l'aimait pas du tout, elle disait qu'il n'était pas fait pour moi et que je ne devrais pas traîner avec "ce genre de gars". Mais je n'en avais pas grand-chose à faire et je crois que je commençais à avoir des sentiments pour lui, c'était désagréable et je savais que ce n'était pas bon, mais je n'avais pas encore appris à tuer les sentiments. 

Alors la discussion avait dérivé et nous avions fini par parler d'autres sujets, pour peu, j'aurais pu croire que Gavin était gay, c'était l'archétype même du meilleur ami homosexuel des mauvaises séries. La vérité était tout autre, il ne savait tout simplement pas être autre chose que "le gars gentil au fond". On ne le remarquais pas vraiment et on le moquait, mais je l'ai toujours beaucoup aimé en tant qu'ami et je me dis encore aujourd'hui que je suis heureuse de l'avoir rencontré. 

Une fois que nous eûmes passé les longues discussions sur des sujets divers et variés, vint le temps où nous commençâmes des jeux moins intelligents comme des actions/vérités et autres conneries pour les soirées pyjama. 

De ce que  je me souviens, mes deux amis se sont rapidement entendus, ils étaient tous les deux intelligents et savaient très bien comment se parler. Ils avaient beaucoup de différences mais qui les rapprochaient plus qu'autre chose. 

Si une journée de ma vie était à revivre, c'en serait une du meilleur été avec Solène, Alex etc... cette journée-ci ou une des deux autres dont je parlerai plus tard. Je me suis rarement entendu aussi bien avec quelqu'un et c'était apaisant d'avoir ses démons passés au second rang. Mes amis imaginaires dormaient depuis quelques mois et je n'utilisais mon palais mental que pour stocker les peurs qui découlaient de telles ou telles expériences dans une salle que je décrirai bien après dans cet ouvrage. 

Je pense que c'est cette après-midi qui a défini le cours du mois qui suivrai, pendant lequel je ne me priverai pas de me rapprocher de Kevin et nous aurons éventuellement un flirt qui se terminera par une relation. Du genre à ne pas cacher des choses très longtemps, c'est moi qui me confesserai à lui, je ne souhaite pas, pour l'instant du moins, faire mention plus que nécessaire de cette journée. Mais voici un fait intéressant. 

Depuis quelques semaines maintenant, je discutais beaucoup avec Diego et Kevin, notamment en les suivant lorsqu'ils allaient fumer de l'autre côté de l'école. J'ignore pourquoi je suis sortie avec ce garçon et je le regrette aujourd'hui. C'était quelqu'un de toxique, pour lui-même et les autres. Un petit junkie, qui aboie mais ne mords pas, un badboy wanna-be sans grande personnalité et fan de goa. Nous n'avions en commun qu'une seule chanson de Nirvana, Smell Like Teen Spirit. 

Je crois que le moment où j'ai compris qu'il était nocif, c'est quand il s'est sérieusement mis à fumer, et pas que des clopes, où il commençait à ne plus parler autrement que par sa drogue. Il était junkie et fier de l'être, et c'était mauvais, parce que plus cette relation avançait, plus il se faisait convaincant dans sa manière de présenter son addiction... et plus je me disais que peut-être... éventuellement... 

C'est quand il a commencé son manège inconscient et que je m'en suis rendue compte que j'ai réellement mis un terme à cette relation dans ma tête, mais je ne cesserai de le voir qu'après une sortie sur les hauteurs de Romont où il se montrerait quelque peu entreprenant... Et que je le repousserai.

La sexualité représentera, je pense, l'aspect qui me différencie et qui me différenciera toujours le plus de mes camarades, je ne ressens pas d'intérêt envers cela, aucune curiosité, c'est simplement quelque chose qui est, qui existe, mais qui ne me concerne pas. Beaucoup de mes amis pensent que ça viendra, que je finirai intéressée, mais la vérité c'est que j'en doute fort. C'est déjà assez compliqué de faire avec les contacts banals et quotidiens. 

Mais enfin... Le moment vraiment difficile et qui m'a conduite au fond du trou, c'était ses messages après notre rupture, me poussant à bout, appuyant sur les zones qui font mal mais toujours trop légèrement pour que ça puisse constituer une preuve suffisante pour que je puisse le montrer à quelqu'un. C'était très souvent qu'il le faisait et ça me sapait le moral, faisant en sorte que je sombre tous les jours un peu plus et finisse par prendre quelques médicaments au bol dans l'armorie à pharmacie et de les avaler avant d'aller me coucher. 

Bien sûr, je n'avais pas pris ce qu'il fallait pour obtenir le résultat escompté (la mort), ni assez, d'ailleurs, et je n'avais fait rien d'autre que dormir une heure de plus sans autres séquelles. J'avoue aujourd'hui que je suis heureuse que ça n'ait pas marché, et surtout à cause d'un gars aussi con. Le lendemain, pour lui faire peur, je lui avais envoyé un message lui expliquant tout ce qui s'était passé. 

En février, il m'envoya, le jour de mon anniversaire, un message me disant qu'il pourrait porter plainte à cause de ce que je lui avais écrit, c'était mal dosé, mal rédigé entre mes larmes. Mais c'était ma seule manière de le dégager. Et au final, ça avait marché. 

Je venais de passer le pire anniversaire de ma vie, mais au moins, j'étais débarrassée d'un parasite aussi mortel que n'importe lequel de ceux qui sont répertoriés dans les livres. 

Les hurlements du SilenceWhere stories live. Discover now