Mardi 20 novembre 2018, 19h03.
Nous avions terminé notre examen il y a une heure, et il s'était bien passé autant pour Jiyeon que pour moi, nous étions ravies et avions décidé de fêter ça en buvant exceptionnellement en pleine semaine, lorsque nous serions au restaurant.
- Où est-ce que tu veux qu'on aille ? Il commence doucement à faire nuit dehors, nous ne devrions pas aller trop loin, remarqua Jiyeon qui se réchauffait les mains.
- Ne t'en fais pas, promenons nous tout doucement, je connais un restaurant pas loin d'ici.
Nous nous mettions donc à marcher en direction du petit restaurant dont j'avais parlé, qui d'ailleurs, servait des plats absolument délicieux.
- Quel était le dernier message de ce fameux Mingi ? demanda-t-elle, toujours aussi curieuse.
- Je ne sais pas, j'ai éteint mon portable avant qu'il puisse me répondre, il m'avait dit d'arrêter de faire semblant d'écouter le cours et m'a demandée pourquoi je ne lui avais pas répondu hier soir... déclarai-je en haussant les épaules.
- J'aimerais connaître la raison pour laquelle il t'a abordée, je suis très curieuse, avoua mon amie.
- Ça, j'avais remarqué... Mais je ne sais pas, et je n'ai pas envie de savoir, tu le sais, ça ne m'intéresse pas tout ça.
Je mis fin à cette conversation en poussant la porte du restaurant après avoir marché un bon moment, les épices nous envahissaient à peine entrées. L'appétit vint sans attendre alors que nous nous installions à table, l'ambiance était conviviale et agréable, des groupes d'amis venaient discuter autour d'un bon plat, des étudiants portant des pulls vendus à l'effigie de notre université s'étaient réunis ici tout comme Jiyeon et moi.
Nous décidions de prendre deux bouteilles de soju ainsi que deux plats de tteokbokki, l'un de mes plats préférés.
- Qu'est-ce que c'est délicieux ! déclara Jiyeon la bouche pleine.
Je lui adressai un sourire après avoir vidé mon verre de soju dans ma bouche.
- C'est toujours bon ici ! Mange, je paierai pour toi ce soir, aux prochains examens c'est toi ! suggérai-je en riant.
Elle acquiesça en souriant et n'essaya pas de me répondre en vue de la quantité de nourriture dans sa bouche...
Après avoir commandé d'autres bouteilles de soju, je pris mon portable afin de le rallumer et voir si ma mère m'avait répondue, et c'était le cas.
Maman : « Bonjour Sunshine, je vais bien, ton père aussi, et toi ? Tu as réussi ton examen ? Je prépare du kimchi pour ce week-end, je t'embrasse ma fille. »
Je lui répondis aussi agréablement qu'elle et comme toujours, ses messages me faisaient sourire, ce qui attirera l'attention de Jiyeon qui n'en finissait pas de manger.
- Qu'est-ce qui te fait sourire ainsi ? C'est Min...
- Chut ! C'est juste ma mère imbécile, la coupai-je en entamant ma bouteille de soju.
D'ailleurs, son téléphone vibra également et c'était un appel, elle décrocha et s'engagea dans une courte conversation qui s'avérait importante.
- Qui était-ce ? demandai-je.
- Zut, c'est la professeur de droit, elle tient à me voir à propos de l'examen de cet après-midi ! Je dois filer...
Elle affichait une moue triste, voyant qu'elle devait repartir seule puisque mon plat n'était pas terminé, je lui tendis de l'argent.
- Tiens, prends un taxi, il fait nuit et il est déjà 22h, le temps passe plus vite que prévu... D'ailleurs c'est rare que les professeurs convoquent à cette heure là, tu as dû l'impressionner avec ta copie ! dis-je en riant doucement. Ne t'en fais pas pour moi et file, je rentrerai tranquillement après avoir terminé et payé nos repas.
Elle me remercia d'un grand sourire et fila en vitesse, prenant le premier taxi qui passait devant elle. Je n'avais pas vu le temps passer mais je n'étais pas effrayée de rentrer seule aussi tard, j'étais habituée aux rues éclairées de Séoul qui vivaient même la nuit, je ne craignais quasiment rien.
Une fois l'addition réglée, je pris la route vers l'université. Rentrer aussi tard n'était pas forcément autorisé, car le campus fermait à un certain moment, mais je n'étais pas la seule étudiante à être dehors à cette heure-ci...
Un jeune homme alcoolisé aux yeux globuleux vint m'aborder à seulement quelques mètres du restaurant, une cigarette coincée derrière l'oreille.
- Excusez-moi... J'ai besoin d'un briquet pour allumer ma cigarette, vous en avez un ?
Sa manière de parler en disait long sur les litres d'alcool qu'il avait dû ingurgiter ce soir.
- Pardonnez-moi mais je ne fume pas, je n'ai pas de briquet mais il y a une bouti...
Mon souffle fut coupé aussitôt qu'il m'empêcha de parler en me coinçant contre un mur, au beau milieu de la rue qui, ce soir, s'avérait déserte. Il se mit à me fouiller à la recherche de mes effets personnels en n'hésitant pas à coller son visage si près du mien que je sentais son souffle chaud dans mon cou. Ses mains vicieuses touchaient mon corps et frôlaient le dessous de mon t-shirt pendant que je ne réagissais toujours pas. Je ne savais pas comment faire...
- Je me retiens de faire plus que de te voler ton argent, dit-il d'une voix agressive, son odeur d'alcool commençant à s'imprégner sur moi tellement il était proche.
Je ne disais toujours rien mais je sentais mes larmes couler en réalisant que je me faisais agresser en pleine rue sans aucun témoin. J'essayais malgré tout de me débattre dans l'espoir de le faire tomber, un homme bourré à ce point n'était pas censé avoir un si bon équilibre... Et il tomba, non pas grâce à moi mais grâce à quelqu'un qui l'attira en arrière pour le mettre au sol et lui donner un coup qui l'assomma aussitôt.
Je fixais mon agresseur apparemment endormi en essuyant rapidement mes larmes qui ne cessaient de couler. J'étais hors de danger et je le devais à la personne qui m'avait sortie de cette agression.
- Je... Merci beaucoup, dis-je difficilement, toujours en essuyant quelques larmes de mes mains tremblantes.
Il ne bougeait pas et me regardait pleurer, je n'arrivais pas à voir son visage tant mes larmes gênaient ma vue.
- Tu n'as pas besoin de me remercier, dit-il d'une voix qui m'était drôlement familière, tu as une dette envers moi maintenant que je t'ai évitée un plus gros traumatisme.
- Mais... On ne se conn...
- Réponds à mes messages désormais, exigea-t-il.
Je le savais, sa voix, c'était ce bourreau des cœurs. J'essuyai mes dernières larmes avant de constater que c'était bien lui, debout devant moi avec mon agresseur au bout des pieds. Je lui étais si reconnaissante que je ne pouvais l'exprimer.
- Je dois y aller, si je n'arrive pas au campus avant l'heure du coucher, je... Au revoir, dis-je en filant le plus vite possible, le laissant là sans même lui laisser le temps de me répondre.
Le trajet effectué en 20 minutes tout à l'heure serait 2 fois plus court étant seule et effrayée.
Une fois dans ma chambre universitaire, je lâchai mes affaires sur le sol en tremblant toujours autant. Jiyeon se leva à une vitesse incalculable pour venir me prendre dans ses bras, sans même savoir ce qu'il m'était arrivée.
- Eh Sunhi, qu'est-ce qu'il t'arrive ? s'empressa-t-elle de me demander d'un air affolé.
- J'ai été agressée en pleine rue en revenant aux dortoirs, je...
- Pardon ? C'est pas vrai... Je n'aurais jamais dû partir, pardonne-moi s'il te plaît, pleura-t-elle en me serrant d'autant plus dans ses bras.
- Ce n'est pas de ta faute, ne t'en veux pas, je vais bien je suis juste encore choquée... Il voulait me voler et m'a touchée d'un peu trop près, je dois me doucher, dis-je en me calmant lentement, prenant conscience que j'étais de nouveau en sécurité.
- Mais, comment tu t'en es sortie...? Tu l'as assommé ?
- Mingi l'a fait pour moi, avouai-je tout en enlevant mes vêtements empestant l'alcool.
Je devinai à son attitude que, habituellement, elle aurait sauté d'excitation en tentant de savoir les moindre détails, mais le contexte de son intervention ne permettait pas à Jiyeon de s'en réjouir, et elle en était parfaitement consciente. Elle était donc soulagée qu'il m'ait sauvée, rien d'autre.
- Il passait dans cette rue à ce moment, je l'ai remercié et je suis partie après qu'il m'ait dit que j'avais une dette et que je pouvais la rembourser en répondant à ses messages, ajoutai-je.
- Je vois... C'était vraiment gentil de sa part, je suis tellement soulagée de savoir que tu vas bien, tu n'es pas blessée au moins ?
- Je crois que si, l'agresseur m'a serrée le poignet si fort sur j'en ai déjà des hématomes, soufflai-je en frottant mes blessures.
Si Mingi n'était pas intervenu, ça aurait pu être pire...
