Mercredi 5 décembre 2018, 8h20.
Hier, j'avais eu une altercation avec Seonghwa à qui j'avais promis une discussion, même s'il n'en voulait pas. J'étais déterminée à mettre les choses au clair avec lui, je ne voulais pas briser notre amitié ainsi que le groupe. Suite à cette courte dispute, Mingi m'avait emmenée dehors, histoire de marcher un peu. Nous avions pas mal discuté durant le trajet, de choses et d'autres. Notamment de ma rencontre avec Jiyeon et le groupe, de la sienne avec ses amis... Cette petite balade fut agréable et j'avais pu en apprendre un peu plus à son sujet, suite à quoi nous nous sommes séparés dans le hall de l'hôtel pour rejoindre nos chambres respectives. Honnêtement, j'avais été heureuse de passer cette journée avec lui, moi qui ne supportais pas sa présence avant... Maintenant, c'était comme si j'en avais besoin.
Depuis que j'avais ouvert les yeux, j'entendais des chuchotements provenant de la salle de bains. Si Jiyeon essayait d'être discrète, c'était raté. Je l'entendais rire et s'affoler, mais... Avec qui ?
Par curiosité, j'étais tentée de coller mon oreille contre la porte pour en entendre un peu plus, mais je n'étais pas ainsi. Je décidai plutôt de foncer dans le tas : d'un coup sec, j'ouvris la porte et surpris Jiyeon, assise sur les toilettes, à discuter avec San, appuyé contre le lavabo.
- Je... chuchota Jiyeon en se coupant immédiatement après avoir été « prise sur le fait ».
Tous deux me regardèrent d'un air assez idiot, comme s'ils complotaient quelque chose. J'avais déjà envie d'exploser de rire en sachant qu'ils n'allaient pas réussir à expliquer pourquoi ils se trouvaient enfermés ici aussi tôt.
- Qu'est-ce que vous fabriquez, tous les deux ? demandai-je d'un sourire plutôt taquin.
- Euh... En fait... bégaya San, ne sachant pas où regarder.
- Comment dire, commença Jiyeon. On... On parlait, c'est tout ! D'un truc plutôt important...
- Oui, c'est ça, un truc important ! s'exclama San en s'agitant.
Mais bien-sûr, ils allaient me faire gober ça ? Qu'est-ce qu'ils me cachaient, tous les deux ? Je n'étais pas bête.
- Je vous laisse une seconde chance de vous expliquer, dis-je alors d'un ton assez joueur en recoiffant mes cheveux ébouriffés suite à ma longue nuit de sommeil.
Mes deux amis se regardèrent comme s'ils parlaient à l'aide de leurs yeux, ils s'envoyaient des messages, des signaux, grâce à quelques coups d'oeil que je n'arrivais pas à capter.
- Bon, avec San, on essaie de mettre en place un plan pour que ça s'arrange entre Seonghwa et toi, avoua enfin Jiyeon, l'air dépité.
Je savais que cette situation les contrariait et je m'en voulais qu'ils aient à réfléchir tous les deux, tout était de ma faute. Mais aujourd'hui, ça allait changer. Avec ou sans plan, j'allais réussir à recoller les morceaux.
- STOP ! criai-je en agitant l'une de mes mains devant moi. Je m'en occupe, dès maintenant. Sortez, que je m'habille.
Un sourire décorait notre visage, tandis qu'ils sortirent tous les deux de la petite pièce d'eau dans laquelle j'avais prévu de me laver et de m'habiller chaudement pour la journée à venir. Pendant ces quelques minutes, j'entendais les deux tourtereaux se chamailler pour des choses et d'autres, je trouvais ça plutôt adorable. Je me demandais vraiment s'ils étaient ensemble ou non, mais Jiyeon me l'aurait dit... En espérant que cela ne tourne pas comme ça a tourné pour Seonghwa et moi.
Quelques temps plus tard, j'étais fin prête à affronter le monstre qui habitait Seonghwa depuis qu'il m'avait vue dans les bras de Mingi.
- Comptez sur moi, dis-je à mes amis avant de quitter la pièce. Dès mon retour, le groupe sera reformé. On se retrouve au petit-déjeuner !
Tous deux m'encouragèrent jusqu'à ce que je referme la porte derrière moi. Les laisser tous les deux seuls dans cette pièce était peut-être une mauvaise idée... Qui sait.
J'étais plutôt confiante, après cette longue nuit réparatrice, mais j'appréhendais un minimum le fait d'affronter toute cette colère. Il disait des choses méchantes, qu'il ne pensait sûrement pas, mais qui me blessaient énormément.
Une fois devant sa porte, j'hésitai légèrement à frapper. En fait, j'avais peur. Cela allait être déterminant : soit tout se passerait bien, soit tout se passerait mal. Je priais pour que cela se passe comme prévu, je n'avais pas envie de commencer une journée d'une façon aussi terrible.
Dans un élan de courage, je frappai d'un petit coup contre la porte.
- Entrez, s'exclama Seonghwa d'une voix assez détendue.
Je suivis ses indications en entrant dans la pièce. Juste avant de me montrer, je refermai la porte derrière moi en la verrouillant pour ne pas être dérangés et pour ne pas qu'il prenne la fuite. Je m'avançai alors vers les lits, où il était assis en train de s'occuper sur son portable, jusqu'à ce qu'il relève la tête vers la personne qui venait d'entrer dans sa chambre : moi.
- Sors d'ici, lâcha-t-il d'un ton glacial.
Le côté détendu de sa voix avait totalement disparu. Mais je n'allais pas me laisser faire par un pseudo adulte boudeur qui voulait me faire payer mes actes : je regrettais bien assez d'avoir blessé tout le monde dans cette histoire.
- Non, je t'ai dit qu'on allait discuter, dis-je fermement.
- J'ai TOUT, sauf envie de discuter avec toi, tu n'existes plus pour moi, déclara-t-il en se remettant à pianoter sur l'écran de son téléphone.
- Je m'en fiche, que tu aies envie ou non, tu vas m'écouter et surtout, tu vas me répondre, m'exclamai-je d'un ton d'autant plus ferme. Cesse de jouer au gamin, tu n'en es plus un.
- Je n'ai rien à te dire, tu vois ?
Seigneur, il allait résister encore longtemps ? J'étais vraiment fâchée, cette fois. De ce fait, je m'avançai vers lui pour lui arracher son portable des mains et le glisser dans la poche arrière de mon jean, là où il n'oserait pas mettre les mains.
- À quoi tu joues ? Tu ne peux pas me forcer à te parler, dit-il d'un ton vraiment furieux tout en se levant.
- Pourtant c'est ce que je vais faire, répondis-je en me mettant face à lui.
Aujourd'hui, j'allais lui faire face. J'allais régler cette histoire.
- Va-t-en je t'ai dit, m'ordonna-t-il. Et rends-moi ce portable.
Ignorant absolument ses dernières paroles, je commençai à réciter ce que j'avais à lui dire.
- D'abord, je suis désolée, dis-je sincèrement. Je sais que ce n'est pas bien, tout ce qu'il s'est passé, mais je n'ai rien voulu de tout ça. Je ne savais pas quoi faire. Mingi m'attirait, mais j'ai toujours pensé aux sentiments que j'éprouvais à ton égard. Oui, je me suis éprise de Mingi, également de toi, mais est-ce que c'est un crime ? Tu sais comment je suis, novice en la matière et totalement incapable de réfléchir quand il s'agit de l'amour. D'ailleurs, je n'avais jamais compris mes sentiments pour toi avant ton retour. Aujourd'hui, c'est le bazar, c'est de ma faute et j'en suis désolée. Mon coeur est partagé en deux. Mais s'il te plaît, pardonne-moi et ne brisons pas le groupe, d'accord ? Il ne se passera rien entre nous, mais s'il te plaît, le groupe...
Son regard fixait un point sur le mur derrière moi, la mâchoire serrée et les bras croisés contre son torse, je voyais bien qu'il se fichait de mes excuses et de tout ce qui en suivait.
- Ah ça, c'est sûr qu'il ne se passera rien, j'ai cessé d'éprouver le moindre sentiment dès que je t'ai vue avec ce connard, là, cracha-t-il.
Enfin, il parlait. Même si c'était pour dire n'importe quoi.
- Nous ferions mieux de rester amis, oui, tu as raison, répondis-je alors. Mais s'il te plaît, ne sois pas vulgaire. Et pardonne-moi.
- Tu ne seras ni ma petite-amie, ni ma meilleure amie, ni mon amie, ni quoique ce soit, lâcha-t-il en me regardant dans les yeux. La trahison, le mensonge, je ne pardonne pas.
Cette fois, je sentais de nouveau les larmes me monter aux yeux. Je ne pensais pas qu'il en arriverait là, à dire que je n'étais rien à ses yeux alors que depuis toutes ses années, nous avions été des piliers l'un pour l'autre.
- Mais Seonghwa, je suis ta meilleure amie depuis toujours, dis-je d'une petite voix en retenant mes larmes. Tu ne peux pas m'abandonner, hein ? Tu le sais, non ?
Ça y est, j'allais m'effondrer comme une madeleine. Je ne voulais pas le perdre, j'avais une lueur d'espoir face à ce que je venais de dire, d'une façon désespérée. Mais Seonghwa, lui, me montrait un coeur de pierre que je n'avais jamais vu avant.
- Tu n'es plus rien, maintenant rends-moi mon portable, et sors.
C'est tout ce que j'avais obtenu en discutant avec lui, ni plus, ni moins. Je ne savais plus quoi faire et honnêtement, je n'avais plus envie d'agir. Le temps m'aiderait peut-être.
D'une main tremblante, je lui rendis son téléphone après avoir essuyé les quelques larmes qui coulaient sur mes joues. Il me le prit des mains, puis retrouva sa place initiale pour de nouveau pianoter sur son écran tactile. Mon regard et mes yeux bordés de larmes n'avaient aucun effet sur lui, cela me brisait le coeur. La mine penaude, je quittai la pièce d'un pas lent : j'avais perdu mon amitié avec Seonghwa.
Devant le réfectoire où déjà beaucoup d'étudiants étaient réunis, j'hésitai à entrer. Je pleurais encore, mes yeux étaient rouges et je n'avais franchement pas envie d'affronter mes amis qui allaient être déçus et forcés d'élaborer un plan pour nous réconcilier. Après tout, je ne méritais même plus ma place dans ce groupe, mais je ne voulais pas le perdre. Ce n'était pas envisageable pour moi de perdre ces amitiés qui me tenaient tant à coeur alors que je venais déjà d'en perdre une.
Au moment où j'allais pousser la porte pour aller finalement déjeuner avec les autres, une main se posa sur mon épaule et me fit franchement sursauter. En me retournant, je sentais que la colère allait m'envahir toute entière et prendre le dessus sur la raison. J'allais être violente, méchante, et blessante.
- On mange ensemble ? me demanda cette personne qui marqua alors un temps d'arrêt.
En voyant que je ne répondais pas, choquée par sa demande, la personne poursuivra.
- Bien, je prends ce silence pour un oui. Super !
Je rêve ? S'il vous plaît. Je ne voulais pas faire face à cette personne. Tout le monde, mais pas cette personne.
