Essences Primaires - T1: Soven & Johanna

Chapitre 5

Au bout d'une semaine seulement, Johanna était quasiment rétablie. Elle s'essoufflait vite et ne pouvait pas encore se défendre comme il fallait, mais au moins, elle pouvait marcher, ce qui s'avérait très pratique pour surveiller Soven. Comme elle attendait le retour de Naeaï, elle ne pouvait pas s'en aller, et il ne fallait pas perdre cet humain des yeux. Elle avait la certitude qu'il n'était au courant de rien, maintenant, mais il y avait vraiment quelque chose d'étrange chez lui. Il ne semblait pas encore s'en être rendu compte, et pourtant, Johanna avait de plus en plus de mal à se contrôler quand elle se retrouvait seule avec lui. Elle en avait honte, mais il fallait bien qu'elle l'admette ; ce pouvoir pouvait la rendre complètement à sa merci, s'il le désirait.

Appuyée contre un mur, elle attendait patiemment qu'il sorte de cours. Généralement, elle restait à une distance qui lui permettait de ne pas se faire remarquer, mais cette fois, elle avait besoin de lui. Sans argent, il était difficile de survivre convenablement, comme elle gardait le peu qui lui restait pour le billet d'avion du retour. Elle vivait donc aux crochets de Soven, et le frigo était vide. Johanna avait tendance à manger pour dix, et en ce moment, elle en avait particulièrement besoin pour compenser l'énergie qu'elle avait dû fournir il y a quelques jours.

Elle pouvait être très patiente, mais elle commençait vraiment à avoir faim. Elle se tâta même à débarquer dans la salle de cours pour le tirer par les cheveux jusqu'au supermarché, mais elle se ravisa. Elle n'était pas encore prête à affronter une assemblée d'humains au regard insistant. Quand son ventre se mit à gronder, elle se mit à faire les cents pas en tournant en rond. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien faire pour rester assis des heures comme ça ? Elle n'arrivait pas à comprendre. En plus il faisait froid, même dans le couloir où elle se trouvait. Vingts degrés, ce n'était visiblement pas assez pour qu'elle se sente à l'aise. Elle détestait ce pays. À chaque fois, il fallait qu'elle se batte avec Soven pour qu'il ne baisse pas trop le chauffage, et c'était un rude combat. Il avait de la répartie, contrairement à ce qu'elle aurait pensé, et de l'autorité. Elle ne préférait pas trop s'imposer, comme elle n'était pas chez elle, mais il y avait des limites.

Lorsque la porte s'ouvrit, Johanna se mit en face, les bras croisés. Elle baissa légèrement les yeux, histoire de ne pas croiser ceux des humains, juste assez pour pouvoir tenter de deviner où était Soven. La femme blonde qu'elle apercevait souvent à ses côtés avança jusqu'à sa droite, frôlant presque Johanna, et en réflexe, elle s'écarta. Elle avait l'air aimable, mais par principe, Johanna ne s'en approcherait jamais.

Enfin, Soven pointa le bout de son nez, et Johanna inspira un grand coup avant de bloquer sa respiration. Trop tard. Son odeur avait déjà tout envahit, et Johanna chassa avec difficulté cette sensation de manque que cette substance provoquait en elle. Elle plongea ses pupilles dans celles de Soven, qui manqua de s'étouffer. Il tenta sans doute de lui faire comprendre qu'elle n'avait rien à faire là, mais elle ignora totalement son air ahurit. Peut-être même que ça l'amusait un peu de le confronter à cette situation embarrassante.

- J'ai faim, lui déclara t'elle tout simplement.

La blonde qui s'était aussi avancée en direction de Soven afficha un air interrogatif, et Johanna jubila. Elle trouva cela très drôle, surtout quand elle vit Soven tenter de l'assassiner avec ses yeux.

- Johanna, pas ici, s'il te plaît.

Il tentait encore de sauver la situation, et elle eu pitié de lui. Elle n'ajouta donc rien même si elle en avait très envie. Elle patienta une bonne dizaine de minutes durant lesquelles une dispute éclata, sans que Johanna n'en comprenne un seul mot. C'était drôle de voir ce petit bout de femme élever la voix aussi facilement. À la fin, elle s'en alla en marchant rapidement non sans avoir tenté de montrer qu'elle en voulait à Johanna.