Nous nous dirigions dans d'étroits couloirs et prenions plusieurs escaliers dans le silence le plus totale. Ce n'était pas plus mal, je n'avais pas l'intention de faire ami-ami avec ces ordures.
En observant attentivement mon environnement, je ne trouvais aucune sortie qui mènerait au pont du bateau. Les quelques hommes pirates que je croisais semblaient particulièrement fiers de leur capture, et c'était un vrai affront à ma fierté qui en prenait un gros coup.
Le premier commandant qui était chargé de me surveiller semblait tout autant ennuyé qu'attentif à tous mes faits et gestes. Il avait un style vestimentaire très détendu entre pantalon noir et chemise ouverte mauve laissant apparaître le tatouage de l'équipage. Il avait en plus de cela un foulard bleu enroulé autour de la taille ainsi qu'une ceinture métallique couleur or.
- Quoi ? me demanda-t-il après quelques minutes restées à le fixer.
Pour toute réponse, je préférai détourner le regard silencieusement afin de ne pas épuiser ma salive inutilement, ce mec ne m'intéressait pas du tout. Celui-ci soupira sûrement aussi lasser que moi de devoir me coltiner mais les ordres de Barbe Blanche étaient incontestables.
- On est arrivé, me déclara-t-il en me passant devant pour toquer à la porte qui nous faisait face.
Il ne fallut pas longtemps pour entendre notre « laisser passer » qui venait d'une voix forte et grave.
La porte s'ouvrit sur un grand homme à la fois fort et âgé arborant une grosse moustache blanche. Il était entouré des quinze commandants de flotte et deux femmes en uniformes qui le reliaient à plusieurs appareils médicaux.
Je ne puis m'empêcher de me dire à l'instant où je lui fis face que pour l'homme le plus fort de monde, il était dans un triste état ... Cela ne faisait que confirmer mes chances de pouvoir tuer cet homme.
Mon surveillant s'en alla auprès de ses camarades, entre le quatrième commandant et le second.
Bien entendu, la porte derrière moi était surveillée de très près, autant dire que je n'avais pas intérêt à foirer maintenant si je voulais garder mes chances de me barrer d'ici, surtout avec ces menottes.
Je me contentai donc de regarder sans la moindre compassion le capitaine du navire qui ne montrait aucun signe d'hostilité ni de faiblesse.
- Rapproche toi donc, gamine. M'ordonna ce dernier après m'avoir suffisamment contemplé.
Mes yeux toujours encrés dans les siens, mes jambes restèrent immobiles et mon expression impassible. Il manquerait plus que j'obéisse à un pirate.
Sous son visage de plus en plus étonné, il finit par brutalement éclater de rire sous l'ébahissement de ses fils tandis que je soupirai en baissant le regard au sol, il commençait déjà à être ennuyant.
- Tu as du cran petite, je n'avais encore jamais vu de jeune aussi impassible à me défier. Ton air effronté me rappelle vaguement quelqu'un. fit-il finalement une fois calmé en jetant un coup d'œil vers le deuxième commandant.
Ce qu'il ne comprenait pas, c'est que ce vieux croûton ne me faisait clairement pas peur. Après tout, c'était lui qui me cherchait et s'il avait voulu me tuer, se serait fait depuis déjà très longtemps.
- Je vais te dire une chose gamine, j'ai horreur de la Marine.
je partageais entièrement son sentiment, à une différence près, c'était que je détestais tout autant les pirates.
- Et tu ne fais pas exception à la règle. Mais par respect à l'une des dernières volontés de ma fille, je te laisserai rester sur ce navire. Bien sûr tu seras d'abords sous surveillance, tu comprendras que je ne te fasse pas confiance.
Après la déclaration du vieux capitaine, personne ne réagit, étant sûrement déjà tous au courant de cette histoire foireuse.
Dernière volonté ?
Fille ?
Rester sur ce navire ?
Je brisai le silence pour la première fois en pouffant de rire. C'était à mon tour de m'amuser sous les yeux exorbités de surprise ou d'énervement des spectateurs présents dans la salle.
- Rester avec vous ? répétai-je avec un sourire rieur, et puis quoi encore ! lâchai-je en reprenant peu à peu mon sérieux et lancer un regard glaçant à mon interlocuteur.
Personne ne réagit, ils étaient toujours sur leurs gardes et Barbe Blanche continuait de me fixer intensément.
- Vous croyez sincèrement que je vais sagement rester ici comme un gentil toutou obéissant à son maître, Barbe Blanche ?
- Je n'ai jamais dit ça. Libre à toi de tenter de fuir ce navire mais je ne garantis en aucun cas ta réussite, gamine. M'expliqua le capitaine sous les sourires amusés des sous-capitaines.
Cette discussion commençait à sérieusement m'agacer, et je perdais très vite patience.
- Vous oubliez sûrement que vous parlez à un commandant de la Marine, et peut-être bien celle qui assistera à votre dernier souffle, alors cessez immédiatement d'utiliser ce surnom. M'emportai-je d'une voix plus forte. Une seule personne est autorisée à m'appeler ainsi, lâchai-je plus bas en baissant les yeux vers le sol.
- Maintenant que j'y pense, elle devait sûrement t'appeler comme ça, elle aussi. fit-il en réfléchissant sans porter la moindre importance à la colère qui montait petit à petit en moi.
Elle ? De qui il parle à la fin ? C'était impossible qu'il la connaisse ...
- Tu veux sans doute savoir de qui j'ai parlé un peu plus tôt, ma fille et sa dernière volonté.
Non. Je n'en ai strictement rien à faire cependant l'envie de te tuer est plus que tentante.
- Elle faisait partie de mon équipage et comme je considère chaque membre de mon équipage comme mes enfants ... C'est celle qui t'a recueillie et élevée quand tu étais enfant ... Et aussi la seule à pouvoir t'appeler « gamine » ... Ma fille, Kyoko.
Je restai ébahie à l'entente du dernier prénom qu'il avait évoqué.
Je ne pouvais pas le croire. Non c'était impossible ... Kyoko ne pouvait pas avoir fait partie de cet équipage ... Elle n'était pas une pirate !!!

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Au bord du gouffre
FanfictionElle s'appelle Minami D Yuki. Commandante de la Marine reconnue pour ses exploits maritimes et un caractère aussi froid que menaçant, cette femme a tout bonnement horreur des criminels. Par un passé difficile qu'elle traîne encore aujourd'hui, elle...