Dormir était agréable. Louis aimait dormir. Pendant qu'il dormait, recroquevillé avec l'un des bras tatoués de Harry drapé autour de lui, rêvant souvent de douces courbes sombres et de motifs cadencés qui étaient les dernières choses qu'il voyait dans l'obscurité avant de s'endormir, il était calme et détendu. Cependant, lorsque le léger coup d'Anne à la porte le ramena à la surface de la conscience, il tourna son visage contre le torse de Harry avec un grognement plein de sommeil puis il se rendit compte qu'ils étaient censés aller à l'église aujourd'hui. Son estomac se noua immédiatement de tension, comme si les ronces tatouées sur le bras de Harry s'étaient enroulées autour de ses intestins et commençaient à les serrer comme un boa constricteur épineux.
Il devait s'être involontairement raidi, parce qu'Harry souffla, renifla et ouvrit un œil toujours trouble de sommeil, le genre de vert brumeux et vague de l'herbe couverte de rosée. Levant sa tête de sorte que plusieurs mèches de cheveux tombent devant son œil, il fit à Louis un sourire rassurant à moitié endormi, ensuite il fit lentement traîner ses doigts de son épaule à son coude, puis son poignet et finit par entrelacer leurs doigts.
Sans dire un mot, Harry lui avait instantanément remonté le moral. Louis glissa hors du lit et partit à la recherche d'une tenue appropriée pour l'église, trouvant un pantalon noir (à lui) pas trop froissé posé sur le dossier d'une chaise et une chemise blanche (également à lui) pendue à l'extérieur de l'armoire, ainsi qu'une veste noire qui aurait pu appartenir à l'un ou à l'autre. Il était en train de nouer sa cravate, légèrement maladroitement puisqu'il n'en avait pas porté depuis plusieurs semaines, quand il leva les yeux pour voir Harry en train d'arranger un blazer par-dessus une chemise grise charbon, ses yeux soulignés renforcés par le tissu sombre, mais d'une façon différente qu'avec ses tenues habituellement noires et grises. Surpris, Louis s'arrêta pour le regarder. Il avait pensé qu'Harry garderait son style habituel pour se faire remarquer.
Sentant des yeux sur lui, Harry se retourna et lui sourit. « Tu peux pas enlever tes yeux de sur moi, hein ? »
« T'es beau, » dit doucement Louis.
Le sourire de Harry s'adoucit, ses lèvres formant une courbe encore plus douce. « Merci, » répondit-il, puis il avança dans la pièce, regardant Louis de haut en bas, il pinça ses lèvres et fit un petit bruit de satisfaction.
« Hmm ? »
« Hmm, » acquiesça Harry, « J'aime bien quand tu mets une cravate. Tourne sur toi pour moi ? »
Roulant des yeux, Louis tourna de bon cœur en un cercle, terminant avec une révérence légèrement moqueuse, et Harry l'applaudit.
« T'es magnifique, » annonça-t-il, « J'crois pas t'avoir déjà vu en costume. »
« Toi, » lui dit Louis, le toisant admirativement de haut en bas alors qu'il redressait son col, « t'es vraiment sexy. En fait, c'est vraiment très inapproprié de s'habiller de façon aussi provocante pour l'église. Tu devrais avoir honte. »
Harry sourit. « T'es un tel dragueur. Souviens-toi que je suis seulement sexy pour toi. »
« C'est seulement parce que je suis le seul à avoir du goût. Puis-je avoir le plaisir de vous escorter jusqu'à la salle à manger, Monsieur Styles ? » Il offrit à Harry son bras avec un sourire et chuchota, « ça veut dire, veux-tu descendre prendre le petit-déjeuner ? »
« Ça peut se faire, » répondit Harry, l'acceptant avec un sourire tout aussi éclatant, et ils descendirent les escaliers, rayonnant comme des chats de Cheshire.**
Au moment où la voiture d'Anne se gara à l'extérieur de l'église, aucun d'eux ne rigolait. Harry mordait tellement fort son piercing que Louis avait peur qu'il se casse un morceau de dent, et lui tordait nerveusement ses doigts, souhaitant qu'ils ne se soient pas aussi moites. Il jeta un coup d'œil à la foule de personnes s'affairant doucement à entrer dans l'église et se retrouva à fixer le manteau à motif léopard porté par une vieille dame, l'imprimé devenant bizarrement flou à force de le regarder si fortement.
Harry se pencha par-dessus son épaule pour voir ce qu'il était en train de regarder, et chuchota doucement, « Je sais exactement à quoi tu penses. »
Louis ne dit rien. Il en doutait sincèrement.
« Regarde le manteau de cette femme. Tellement démodé. Cette congrégation a un besoin urgentd'homosexualité, on va leur apprendre une ou deux choses pour avoir l'air fabuleux. »
Louis rigola, il ne put s'en empêcher, et il pencha sa tête contre celle de Harry pendant un moment avec un soupir. Puis, il inspira profondément, et sortit de la voiture.
Il resta près de Harry alors qu'ils se joignaient à la foule se dirigeant à l'intérieur de l'église, ne se tenant pas la main mais souhaitant légèrement que ce soit le cas. A son grand soulagement, personne ne les fixa alors qu'ils entraient, même si Harry sortait du lot avec ses cheveux magenta, sa lèvre percée et le fait qu'il était plus grand que la majorité des personnes autour d'eux. Mais ils étaient tous en train de parler ensemble avec animation, alors Louis, Harry et Anne réussirent à pénétrer à l'intérieur sans trop attirer l'attention. (Robin n'était pas un très grand pratiquant, et avait tendance à rester chez eux les dimanches pour faire des petites bricoles à la maison.)
Une fois à l'intérieur de l'église, l'air fut frais et avait l'odeur de la cire de bougie et de l'ancien (ce qui était tout une odeur en elle-même, sans même être attaché à quoi que ce soit en particulier), une odeur avec laquelle Louis avait grandi. Les compositions florales dégageaient également leur propre odeur musquée, presque irrésistible ; alors qu'ils passèrent à côté d'une colonne décorée avec des dahlias, il inspira avec bonheur. Puis, il commença à scanner du regard la pièce, essayant de trouver une bonne place pour s'assoir ; il ne voulait pas être trop au fond, parce que ça donnerait l'air qu'ils n'avaient pas vraiment envie d'être là, ni trop à l'avant, où les gens pourraient les fixer et ils pourraient donner l'air d'être impétueux. Louis ne voulait pas que quiconque pense qu'il était seulement venu à l'église pour supplier le pardon de Dieu pour sa relation supposée mal vue. Il venait pour présenter ses respects, et parce qu'il pensait que c'était important, pas parce qu'il se sentait mal au sujet de Harry.
Cependant, avant qu'il puisse commencer à se sentir stressé à ce sujet, quelqu'un assis quelque part au milieu se retourna, le repéra et commença à agiter sa main, il reconnut Liam assis avec ses parents, le saluant enthousiasment. Avec reconnaissance, Louis attrapa la main de Harry et le tira vers leur ami, Anne les suivant, et ils glissèrent tous dans le rang, Louis s'asseyant juste à côté de Liam et lui souriant avec soulagement.
« Je m'attendais pas à te voir là, » dit Liam avec enthousiasme.
« Ouais, si tout se passe comme prévu, j'espère en faire une chose régulière. »
« On espère en faire une chose régulière, » intervint Harry, et Louis rayonna et serra sa main. Il n'avait pas aimé supposer, évidemment, mais il avait espéré qu'Harry serait d'accord pour venir avec lui sur une base régulière.
Se penchant par-dessus son fils, la mère de Liam, Karen, sembla également ravie de voir Louis. « Ça fait une éternité que je ne t'ai plus vu, Louis ! » s'exclama-t-elle, « tu as l'air d'aller bien ! Ooh, bonjour, » ajouta-t-elle timidement en regardant Harry, puis de façon significative leurs mains liées, « qu'avons-nous là ? »
« C'est mon petit-ami, » lui dit Louis, rougissant un peu.
« C'est charmant ! Oh, trop mignon ! Ravie de te rencontrer, » s'enthousiasma Karen, tendant sa main pour serrer celle de Harry, ce qu'il fit avec beaucoup d'étonnement. « Harry, n'est-ce pas ? Je pense que Liam nous a déjà parlé de toi, hein, Geoff ? »
Son mari hocha de la tête et serra également joyeusement la main de Harry, puis recommença à fixer nerveusement le plafond, se perdant dans la musique de l'orgue.
« Ça fait plaisir de vous voir ici, » poursuivit joyeusement Karen, « entre vous et moi, je pense qu'un petit réveil ne ferait pas mal à beaucoup ici – ils sont tous coincés dans le moyen âge, ou même avant. Des personnes comme vous deux pourraient vraiment faire quelque chose de bien par ici – si vous voyez ce que je veux dire. »
Louis sourit modestement, et Harry ouvrit sa bouche – probablement pour commencer à proposer avec enthousiasme des suggestions sur la façon dont il pourrait convaincre des personnes de ses bonnes intentions, mais ensuite deux choses se passèrent : la musique commença crescendo à devenir plus forte, faisant savoir que le service était sur le point de commencer, et il y eut un sifflement outré venant de derrière Louis.
Se raidissant, il se retourna, ainsi que Harry, tous les deux ayant le même regard noir à jeter à quiconque s'étant offensé comme ça à leur présence – et ce fut à ce moment qu'il posa ses yeux sur son père et sa mère, tenant les jumelles par la main, et avec les deux filles plus âgées se tenant à côté d'eux dans leurs tenues habituelles pour l'église.
Louis déglutit et la main de Harry glissa immédiatement dans le bas de son dos comme pour apporter son soutien. Jay lança à Louis un regard tellement mauvais qu'il fut surpris qu'un tas de fumier ne se soit pas entassé au dessus de sa tête pour lui tomber dessus, puis elle fit un pas en arrière, tirant Daisy et Phoebe avec elle, tandis que son père le regardait avec consternation et recula à la hâte de quelques pas à une réprimande de sa femme. Felicite semblait impuissante et Lottie choquée, mais tout ce sur quoi Louis put se focaliser fut sur le dégoût sur le visage de sa mère à la vue de Harry et lui assis côte à côte, la main de ce premier dans son dos n'étant pas visible de sa position.
« Qu'est-ce qu'ils font là ? » murmura-t-elle dans un sifflement étranglé.
« Retourne-toi, » chuchota Harry, tournant son dos à la mère de Louis.
Louis lécha ses lèvres. Il ne pouvait pas enlever ses yeux de sur elle, brûlant sous son regard noir alors qu'elle pensait qu'il serait brûlé en enfer, chaud et tremblant. Elle avait honnêtement l'air de le détester, avec sa bouche crispée en une grimace de rouge à lèvres, le front froncé, retirant seulement son regard brûlant de sur lui pour jeter des poignards dans le dos de Harry.
« Retourne-toi, Louis, » chuchota Harry, mettant un bras autour de ses épaules et le tirant pour qu'il regarde devant.
« Mais – »
« On ne veut pas faire une scène ici, » lui rappela Harry, « pas dans l'église. »
Louis savait qu'il avait raison. Mais il ne put s'empêcher de jeter quelques regards furtifs derrière lui avant que le premier cantique ne commence, pour voir où sa famille était partie. Ils étaient assis de l'autre côté de l'église, assez près du fond, et Jay alternait entre les fixer méchamment et des petits coups d'œil à son livret de chant. Mark semblait malheureux mais n'avait apparemment aucune intention d'intervenir à propos de son comportement – quand l'avait-il déjà fait ? De temps en temps, elle tirait sur sa manche et glissait un commentaire à son oreille, le faisant grimacer et son front se plissant à chaque mot, mais il ne tenta pas de discuter avec elle, ou même de la dissuader en ignorant ce qu'elle pouvait bien dire. Felicite lui fit un sourire nerveux, et Lottie n'arrêtait pas de le regarder anxieusement, tandis que les jumelles étaient agitées, se plaignaient et continuaient de demander avec de petites voix innocentes pourquoi elles ne pouvaient pas dire bonjour à Louis, ce qui serra sa poitrine. Mais ensuite l'orgue atteignit son plus haut volume, les livrets de chant furent tournés à la bonne page et ils furent invités à changer. Louis ne les regarda plus.
Bien sûr, il était au courant qu'Harry savait chanter, mais une grande partie de la musique qu'Harry écoutait était principalement composée de, faute d'un meilleure terme, cris gutturaux (bien sûr, ce n'était pas vraiment des cris, et des paroles fantastiques étaient noyées dans les sons, mais il n'arrivait pas à trouver comment décrire ça autrement) alors il n'avait pas souvent eu la chance d'entendre Harry chanter correctement. Le cantique était 'I, The Lord Of Sea & Sky', l'un des préférés de Louis – il trouvait qu'il était beau, sans trop parler de sacrifice et de la mort de Jésus, ce qui était évidemment important mais pas exactement un sujet joyeux sur lequel chanter un dimanche. Quoiqu'il en soit, Harry chantait bien ; il avait une belle voix, et Louis oublia plusieurs fois de chanter pour uniquement rester immobile et bouche bée à cause de son petit-ami, qui remarqua ce qu'il faisait et n'arrêtait pas de lui jeter de petits regards amusés entre chaque verset.
Ils venaient juste d'atteindre la partie à propos du Seigneur du Vent et du Feu quand Louis sentit soudainement l'intense envie de tenir la main de Harry – et pourquoi le nier ? Il tira la manche de Harry pour attirer son attention, n'ayant pas l'intention de chuchoter pendant un cantique (il avait suffisamment été, sévèrement, grondé à ce propos par sa mère dans sa jeunesse pour ne plus le refaire) puis, au regard interrogateur de Harry, il poussa sa petite main dans la grande patte de ce dernier. Le mouvement fit se relever sa manche, exposant son tatouage au poignet, et ils sourirent tous les deux avant de laisser tomber leurs mains, les doigts entrelacés. Louis n'eut même pas besoin de regarder pour savoir que Jay était en train de les fixer.
Ils restèrent tranquillement assis pendant les sermons ; Harry était beaucoup plus attentif que ce que Louis avait prévu, écoutant chaque mot que le pasteur disait, et quand des morceaux avec lesquels il n'était pas d'accord surgissaient, autre que de froncer son nez comme un lapin, il ne donna peu d'indication sur son dégoût. En fait, c'était Louis qui se trouvait avoir la tête en l'air, alors qu'il admirait la lumière se répandre par les vitraux, révélant les anges et les saints représentés dessus. Ses yeux s'attardèrent sur les découpages raffinés de la croix à l'avant, sur les fils des tapisseries tombant sur les murs, sur le sol en pierre terne. Cet endroit lui avait beaucoup manqué. L'église était un endroit où il avait grandi, assistant à des kermesses, à des clubs et au catéchisme, avant que sa mère ne décide que colorier des dessins de Jésus était une utilisation de son temps moins productive qu'écouter des sermons que, à cet âge, il ne comprenait pas. Elle n'avait jamais été vraiment logique dans son approche – de quoi que ce soit.
L'un des plus jeunes membres de la congrégation, une fille qui avait probablement environ huit ou neuf ans et portant une tenue entièrement constituée de tricot de diverses couleurs, toutes plus moches les unes que les autres, était supposée faire la lecture d'un passage de la Bible, ce qu'elle essaya de faire avec un enthousiasme admirable, lisant de façon un peu décousue et butant sur certains longs mots – jusqu'à ce qu'elle lève son regard en plein milieu et repère Harry. Sa bouche s'ouvrit en grand et elle arrêta de parler pour le fixer, totalement dans la crainte.
Ça aurait pu être les cheveux violets, ou ses piercings argents, ou le gonflement de sa bouche qui avait considérablement diminué mais qui était toujours un mélange assez impressionnant de différentes nuances de violet (en fait, sa bouche était assez bien assortie à ses cheveux pour le moment), ou peut-être que c'était simplement parce qu'elle ne le reconnaissait pas, mais la petite fille continua de fixer Harry, bouche bée. Tout le monde tendit son cou pour voir qui l'avait distraite, puis ils eurent tous l'air mortifiés, mal à l'aise ou dégoûtés – plus particulièrement la femme qui était sans doute la mère de la petite fille, qui semblait terrifiée qu'Harry soit offensé par le regard de sa fille et prévoit une horrible vengeance de voyou contre elle. Mais Harry sourit simplement à l'enfant en signe d'encouragement, et après l'avoir regardé un peu plus longtemps de façon intriguée, le regard de la petite fille se baissa à nouveau sur le papier posé sur le pupitre devant elle et elle finit la lecture.
Toute l'église laissa échapper un soupir de soulagement. Louis aurait presque juré qu'il avait même vu les murs se détendre de soulagement, mais bien sûr, ce n'était que son imagination. Il tapota le genou de Harry et reçut un roulement d'yeux chaleureux en retour ; Harry était imperturbable face à l'attention qu'elle avait attiré sur lui. Louis supposa qu'il y était habitué.
Après ça, Louis se détendit relativement et était assez heureux d'avoir décidé de venir à la messe – jusqu'à ce que vint le moment de recevoir l'hostie et que les gens commencent à se diriger vers l'avant dans des lignes ordonnées pour avoir une bénédiction, ou du pain et du vin. Louis avait fait sa confirmation, alors il savait exactement quoi faire. Tout ce qu'il fallait faire était de s'avancer, accepter le pain en forme de comprimé et au goût de carton, l'arroser de vin aigre et sans alcool, et essayer très fortement de ne pas montrer à quel point il souhaitait avoir un rince-bouche à portée de main, et c'est tout. Mais Harry n'avait pas fait sa confirmation ; il avait tourné le dos à l'église peu avant de devoir commencer la procédure. Alors qu'ils se dirigeaient tous les deux vers l'avant, Louis sentit une boule de nerf dans son estomac comme un serpent qui serait en train de dormir ou de faire le mort, et d'une façon ou d'une autre, il pourrait se réveiller à tout moment et déchirer la muqueuse de son estomac en lambeaux.
Il passa devant Harry, et accepta son pain et son vin comme d'habitude – avec un nouveau goût aigre dans sa bouche qui était différent de celui qui s'accumulait habituellement après s'être forcé à avaler les substances désagréables. (Il ne comprendrait jamais pourquoi les choses qui étaient censées représenter le corps de Jésus, par nature une bonne personne et donc par conséquence sûrement une chose soi-disant bonne, avait un goût aussi ignoble, à moins que ce soit pour dissuader le cannibalisme.) Le pasteur lui sourit et hocha de la tête, comme pour dire « ravis de te revoir parmi nous », et Louis réussit à lui faire un sourire légèrement faible en retour, mais ensuite il dut se mettre sur le côté pour permettre à Harry d'avoir son tour, et son sourire s'effaça de son visage pour faire place à de l'inquiétude. La dernière fois que le Père Marshall et Harry avaient été face à face, il savait que ça ne s'était pas bien terminé. Le Père Marshall avait insulté le mode de vie de Harry ainsi que pratiquement toute sa personne, lui disant qu'il était un blasphémateur et qu'il avait besoin de s'amender et de l'aide de Jésus pour éviter un sort ardent en enfer, et Harry avait ri des croyances de l'homme et avait été plutôt malpoli envers lui, pour faire court, ils n'étaient de grands amis. Louis ne pensait pas que l'homme se déshonorerait en rejetant Harry de l'autel, mais à part cela, il n'était sûr de rien et il se balança nerveusement d'un pied à l'autre, à portée de voix, alors qu'Harry s'agenouillait devant l'homme.
Il y eut une hésitation visible. C'était dur de savoir quoi faire avec Harry, puisqu'il n'avait pas le droit à l'hostie, et il était vraiment trop âgé pour un tapotement sur la tête et une brève parole sur l'amour de Dieu que les enfants trop jeunes recevaient. Pendant un moment, le Père Marshall s'arrêta. La ligne de personne s'arrêta. Le temps, lui-même, s'arrêta – ou du moins, ce fut une impression.
« Aimerais-tu... une bénédiction ? »
« Oui, très bien, » dit doucement Harry.
Hochant de la tête, l'homme posa une main au sommet de ses boucles et dit doucement, « Que le seigneur te bénisse et te garde dans la vie éternelle. Amen. »
Tout le monde attendit en retenant son souffle, comme s'ils s'attendaient à ce qu'Harry explose alors que son corps était purgé d'un millier de démons odieux qui s'étaient cachés sous sa peau, comme si c'était une sorte d'exorcisme. Même le pasteur sembla se figer, sa main toujours posée sur la tête de Harry, et il y avait une expression très bizarre sur son visage. Louis le regarda avec suspicion, ressentant une drôle de vague de jalousie qui n'avait absolument aucun sens, jusqu'à ce qu'il mette le doigt sur ce qui le dérangeait ; l'homme n'était pas si âgé, pour un pasteur. Il devait avoir seulement la trentaine, voire très probablement dans les vingt-cinq ans, d'après son physique, sans une seule touche de gris dans ses cheveux. En fait, il avait l'air assez jeune, relativement attirant, même si un petit peu trop barbu, et Louis n'arrivait pas à comprendre l'émotion dans ses yeux foncés jusqu'à ce qu'il l'examine un peu plus longtemps. Même alors, il n'arrivait pas à être certain. Mais il pensait que l'homme avait l'air envieux. Et ça n'avait absolument aucun sens.
Après ce qui sembla être trente ans, le pasteur ayant l'air secoué enleva sa main de la tête de Harry, et ce dernier se redressa immédiatement. Cependant, alors qu'il tendait sa main pour que Louis la prenne, son regard émeraude s'attarda sur l'homme devant lui, qui semblait légèrement transpirer dans son faux col. Regardant droit devant lui, il avait l'air épuisé, comme si bénir Harry lui avait faire perdre toute son énergie. Plus que ça, il avait l'air vulnérable – comme si Harry s'était débarrassé de sa robe et l'avait laissé nu devant l'autel avec seulement un calice à la main pour préserver sa pudeur.
Les doigts de Louis glissèrent entre ceux de Harry, s'entrelaçant avec eux comme le verrou d'une porte, et son anxiété s'évapora. Un petit sourire courba le coin de la bouche de Harry, jouant avec puis se contractant en un presque sourire, et alors qu'ils retournaient à leurs places et s'asseyaient, il regarda Louis et il se transforma en un vrai.
« C'était quoi ça ? » murmura Louis contre son oreille, les boucles chatouillant son nez. Il espérait que le pasteur regardait. C'était ridicule – pourquoi l'homme serait-il intéressé par Harry, à part comme étant une cause perdue intéressante à essayer de convertir au catholicisme strict ? – mais il voulait réaffirmer ce qu'il lui appartenait. Ce drôle d'éclair brûlant de jalousie était toujours en train de se consumer quelque part dans ses intestins.
Harry haussa des épaules. « J'sais pas. » Il y eut quelque chose dans son expression qui impliquait de la réflexion, et peut-être que c'était l'imagination de Louis mais il eut l'impression que peu importe ce que c'était, Harry ne voulait pas en parler pour le moment, alors il décida de laisser tomber.
Le reste de la messe passa remarquablement rapidement, avec très peu de différence par rapport aux nombreuses autres auxquelles Louis avait assisté au fil des années. C'était agréable de revenir à l'église, et il était heureux de voir qu'un nombre surprenant de personnes lui souriait, ou le saluait de la tête, et quelques uns l'avait même fait avec la main. Certaines personnes, au moins, semblaient heureuses de le revoir.
Le service se termina avec un autre cantique, et Louis quitta la bâtisse avec la main de Harry dans son dos et un sourire sur son visage, heureux d'avoir prouvé qu'ils pouvaient se rendre à une messe sans causer un quelconque dérangement. Sauf qu'il n'aurait peut-être pas dû crier victoire trop tôt, parce qu'au moment où ils étaient sur le point de franchir les portes de l'église, Louis sentit une main sur son bras, le tenant dans une poigne en forme de griffe, comme un étau autour de son biceps. Abasourdi, Louis se retourna brusquement pour voir qui avait posé la main sur lui, seulement pour rencontrer le regard plein de colère de sa mère.
Elle semblait plus petite, d'une certaine manière. Il ne savait pas vraiment si un truc psychologique, puisqu'il n'avait plus peur d'elle, ou s'il avait grandi, ou peut-être qu'elle avait véritablement un peu rétréci. Peu importe, ça lui donnait l'air moins intimidante. Cependant, sa prise était toujours désagréablement ferme, ses doigts se repliant dans la courbe de son biceps. Ses yeux avaient toujours cette couleur bleue mer, qui devait avoir l'air fragile mais portait une étrange ressemblance avec un océan dans lequel il risquait une noyade imminente. Elle le regarda de haut en bas, apparemment mécontente de ce qu'elle voyait.
« Qu'est-ce que tu fais ici ? » siffla-t-elle.
« Aïe ! » protesta Louis, essayant de libérer son bras.
Le son et la résistance contre sa main, puisque Louis s'était arrêté de marcher, alertèrent Harry que quelque chose n'allait pas, et il se retourna. Quand il remarqua Jay s'accrochant au bras de Louis, ses yeux s'assombrirent, verts et glaciaux, comme des brins d'herbe gelés dans de la glace.
« J'en ai plus que marre de vous, » dit-il froidement, posant sa main par-dessus la sienne sur le bras de Louis. Elle tressaillit comme si son regard vert-ortie l'avait piqué, mais maintint sa prise avec détermination. « Pourquoi ne pouvez-vous pas le laisser tranquille ? » continua tristement Harry, « vous pouvez ne pas être d'accord avec ses choix de vie, mais vous pourriez au moins les respecter. »
Elle fronça ses sourcils. « Je veux parler avec la marionnette, pas le singe. »
Louis fronça à son tour des sourcils, dégageant son bras de l'un et l'autre. « Et je préférerais qu'on ne parle pas de moi comme si je n'étais pas là, merci beaucoup ! »
Harry eut l'air embarrassé. « Désolé, » marmonna-t-il, baissant ses yeux au sol. Il semblait si désolé que Louis ne pouvait pas rester en colère contre lui et il sourit un petit peu pour lui faire savoir qu'il était pardonné.
Jay ne sembla pas du tout s'en soucier. « Qu'est-ce que tu fais ici ? » répéta-t-elle méchamment. « T'as pourtant clairement montré que tu n'es plus intéressé par le fait de poursuivre cette foi. Tu as résolument tourné le dos à l'église et a refusé d'entendre raison. Alors quelle est exactement la raison de ta venue ici ? Tu crois que c'est une plaisanterie maintenant ? »
« Non, » dit patiemment Louis, « Je n'ai pas clairement montré que je tournais le dos à ma foi – en fait, je pense même t'avoir dit l'exact opposé. Le simple fait que j'ai tourné le dos à ce que tu crois que ma foi implique ne veut pas dire que j'ai tourné le dos à tout ce en quoi je crois, maman. »
Sa bouche s'ouvrit et se ferma à plusieurs reprises, comme un poisson portant du rouge à lèvres. Puis, elle essaya une approche différente ; la manipulation. « Louis, » roucoula-t-elle, « ce n'est pas grave. Je comprends. Tu es confus. Tu ne sais pas ce que tu veux. »
Rigolant, Louis répondit. « Non, tu ne comprends pas. Non, je ne suis pas confus. Et si, je sais ce que je veux. Pourquoi est-ce si dur pour toi de comprendre ? Je sais exactement ce que je veux ! J'ai un petit-ami qui m'aime et que j'aime. Oui, peut-être qu'il y a eu des insinuations comme quoi Dieu ne voudrait pas ça, mais les choses changent, et je ne crois honnêtement pas qu'il s'en soucie. Je suis heureux de la vie que je mène ! La seule chose qui n'est pas merveilleuse à ce propos est que des personnes comme toi essaient de m'empêcher de faire la seule chose dans ma vie dont je ne suis pas complètement satisfait ; exprimer ma religion. »
« N'es-tu pas inquiet, Louis ? » demanda-t-elle désespérément. « Et si Dieu ne veut pas ça pour toi ? Et si c'est l'exact opposé de ce qu'il veut, et que ta ténacité aboutit – aboutit à toi allant en enfer ? » L'idée même donna l'impression qu'elle pourrait s'évanouir.
Louis commençait à comprendre un petit mieux, maintenant. Bien sûr, il savait que sa méchanceté avait purement été par dépit ou ignorance, il avait eu l'inclination que, pour une quelconque raison, elle semblait honnêtement croire qu'elle lui faisait du bien en l'éloignant de Harry, mais le regard craintif dans ses yeux lui faisait effectivement commencer à comprendre.
« Alors je ferai face aux conséquences quand le moment sera venu, et pas avant, » dit-il doucement, « parce que, maman, en toute franchise, je préfère vivre trente, quarante, cinquante années de bonheur avec Harry contre la volonté de Dieu et souffrir éternellement par la suite, parce que ces années que j'aurais passé avec lui en vaudront la peine. Et je ne pourrais jamais vraiment être maudit, pas tant que je peux toujours me souvenir de lui. »
L'expression faciale de Harry s'adoucit et il regarda Louis comme si c'était la première fois qu'il le voyait véritablement – comme s'il avait été à moitié aveugle toute sa vie, les yeux embués par de la brume, et que c'était la première fois qu'ils n'étaient pas obscurés.
« D'ailleurs, » continua Louis, « si ce qu'on fait est vraiment si mauvais, il sera brûlé avec moi. »
Les lèvres de Harry commencèrent à bouger, tellement légèrement que ce fut presque impossible de voir qu'il marmonnait dans sa barbe, mais Louis remarqua les bribes plus faibles d'un son familier, et il vit le petit sourire en coin mauvais sur le visage de Harry, et il se rendit compte qu'il était en train de murmurer, « burn, baby burn, disco inferno » presque silencieusement. Louis le frappa et Harry s'arrêta docilement de chanter, mais son sourire en coin en devint un énorme coquin.
« D'accord, disons pendant un moment que Dieu ne s'en soucie pas, » commença Jay, ce qui surprit immensément Louis. Il ne s'était jamais attendu à ce qu'elle soit d'accord de parler de la possibilité théorique. « S'il ne se soucie pas de ta sexualité, alors il pourrait se soucier de... d'autres choses. Suis-je en droit de penser que vous deux vous avez... avez... n'êtes plus vierges ? »
Louis rougit à l'horreur de devoir parler de sa vie sexuelle avec sa mère, et surtout sur le parvis d'une église avec autant de personne passant à côté d'eux en faisant semblant de ne pas écouter. Il baissa sa voix. « Non, on ne l'est plus. »
Instantanément, elle baissa ses épaules comme une fleur qui n'avait pas été arrosée. « Oh. Louis. Je pensais t'avoir mieux éduqué que ça. »
Il fut immédiatement irrité. « Oh, franchement, s'il te plaît ne commence pas avec toute cette merde de 'le sexe est seulement pour la procréation, ne couchez pas avec un homme comme vous le feriez avec une femme', parce que je ne suis vraiment pas d'humeur. »
Secouant sa tête, elle dit tristement, « J'ai toujours pensé que tu attendrais jusqu'au mariage. Comme je l'ai fait. Comme ton père l'a fait. Mais je suppose que ce n'est pas une option pour toi, hein ? »
« Le mariage homosexuel est légal dans ce pays maintenant. »
« Ce n'est pas ce que je voulais dire... je supposais qu'il n'attendrait pas. » Elle hocha de la tête de façon significative vers Harry.
« En fait, il a suggéré que je devrais attendre. » Louis était même plus qu'ennuyé à présent, n'appréciant pas l'implication qu'Harry ait fait pression sur lui au sujet du sexe.
Jay fut surprise ; c'était écrit partout sur son visage, mais elle lutta fortement pour l'effacer. « Allez-vous vous marier ? J'veux dire... un jour ? »
« J'aimerais beaucoup. »
« Et lui ? »
Louis regarda Harry qui hocha de la tête et dit, « Sans aucun doute. Pas avant quelques années, on est encore jeune... mais un jour, j'emmènerai votre fils sur le seuil de notre maison avec une bague à son doigt et... j'espère que vous serez heureuse pour lui. »
Pendant un moment, elle ne dit rien, mordillant simplement sa lèvre. Elle avait du rouge à lèvres sur les dents, et ça lui donna un air étrangement fragile, et Louis eut envie de lui faire un câlin – de poser sa tête sur son épaule comme il avait l'habitude de le faire quand il était petit et de blottir le sommet de sa tête dans son cou, ses cheveux tout doux flottant contre son cou. Il voulait l'appeler 'mamounnette' et lui dire qu'il était désolé et que tout irait bien, comme lorsqu'il était petit et qu'un câlin pouvait tout arranger. Ces moments-là lui manquaient. Elle lui manquait. Croire aveuglément en chaque mot qu'elle disait lui manquait en quelque sorte, aussi bizarre que ça puisse paraître. Plus que tout, être son fils lui manquait.
Elle interrompit ses pensées mélancoliques. « Je ne peux pas faire semblant d'aimer ça, » lui dit-elle, « ni d'être accord avec. Mais tu as raison sur une chose, » dit-elle à Harry, « se battre avec vous à ce propos ne donnera rien de bon. Faites ce que vous voulez. » Elle fit à Louis un pâle sourire, hocha sèchement de la tête vers Harry puis passa à côté d'eux, regardant par-dessus son épaule pour s'assurer que sa famille la suivait.
Elle avait presque atteint les portes de l'église quand Louis cria, « Tu me manques ! »
« Tu me manques aussi, » répondit-elle, si doucement qu'il put à peine à l'entendre. Puis elle se redressa et passa les portes, son mari et ses enfants se précipitant derrière elle.
Louis les regarda partir en se sentant incroyablement abattu ; pendant un moment, il avait eu l'espoir qu'il y aurait peut-être une sorte de pacification – peut-être pas être accepté à nouveau dans sa famille, parce qu'il ne voulait plus entièrement ça, mais au moins être autorisé à voir ses petites sœurs parfois, et que sa mère arrêterait d'avoir si aveuglément des préjugés. Il supposait qu'il devrait déjà être très reconnaissant qu'elle ait finalement été d'accord de cesser de lui crier dessus à chaque fois qu'elle se trouvait dans un rayon de dix mètres de lui et son petit-ami, mais ce n'était pas tout à fait suffisant. Ce n'était pas comme l'étreindre après une longue journée. Ce n'était pas comme jouer à des jeux de société avec ses petites sœurs et lancer délibérément le jeu de sorte que l'une des jumelles gagne mais ait l'impression de l'avoir battu uniquement par elle-même. Ce n'était pas comme s'assoir avec ses parents les dimanches soirs après avoir aidé à faire la vaisselle, en buvant du chocolat chaud en silence avec eux. C'était toutes ces petites choses qui lui manquaient, les anciennes habitudes dont il n'avait pas parlé à Harry parce que, malgré toute l'énergie qu'il mettrait pour les imiter, ce ne serait pas la même.
« Ça va ? » demanda doucement Harry. Maintenant que la possibilité d'assister à un spectacle avait disparu, les gens marchaient à nouveau plus vite, ne s'attardant pas assez longtemps pour entendre leur conversation. Louis en était heureux. La douceur dans le ton de Harry était à lui, et à lui seul.
« Ouais. »
Ils restèrent silencieux. Harry mordillait sa lèvre, sa bouche plus sombre que d'habitude à cause de la fleuraison d'ecchymoses, ses yeux toujours aussi verdoyant, un magnifique vert. Il avait ridiculement l'air pimpant dans ce costume, comme un gangster tout droit sorti d'un film, amoché mais beau ; tout ce dont il avait besoin était de passer une main à travers sa frange teinte en violet et porter un chapeau melon, et il serait un parfait mafieux.
« T'as envie d'une glace ? » demanda-t-il par la suite.
Le visage de Louis s'illumina comme des bougies sur un gâteau d'anniversaire, crépitant alors que son petit sourire triste éclata en un large épanoui. « Ouais. »
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Turning From Praise [Traduction - Larry Stylinson - Terminée]
FanficLouis a reçu une éducation chrétienne stricte contre laquelle il ne s'est jamais rendu compte avoir du ressentiment jusqu'à ce qu'il rencontre Harry Styles, un garçon qui vit pour se rebeller et se fout de ce quiconque puisse penser. Mais plus il ap...