Chapitre 2

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Dire qu'Andrea n'était pas en confiance était un euphémisme. Clairement, Jimin ne pouvait que comprendre son comportement.

Comment faire confiance à des adultes dans ce monde ? À des hommes ? Comment pouvait-elle vivre sereinement en portant un visage comme le sien dans un pays ou les différences sociales de l'époque dépassaient de loin celles du monde moderne ?

Néanmoins le jeune homme ressemblant à Yoongi n'était pas tout à fait un homme, son visage avoisinait celui d'un enfant, il ne semblait pas avoir de pouvoir de décision et n'être rien d'autre qu'un domestique dont le devoir était de servir son maître jusqu'à la fin de son existence.

Alors il n'était pas dangereux et c'était sûrement à cela qu'Andrea avait pensé en lui remettant le katana.

Elle le fixait de manière à l'analyser, comme un animal craintif mais dangereux, prêt à bondir à la moindre attaque.

Mais lorsque le dénommé Mr Jung s'approcha, elle recula et ne répondit à aucune des questions, des interrogations ou des menaces que l'adulte laissait entendre à travers ses mots.

Le petit maître Min lui, tentait de s'approcher, de poser un millier de questions comme si la présence d'une non-coréenne dans la demeure où il vivait était un cadeau répondant à sa curiosité démesurée. Néanmoins, le petit aristocrate demanda à ce qu'on la garde pour la nuit devant le regard offusqué et inquiet de Mr Jung et de ses hommes.

-Si votre père et votre grand-père l'apprennent...

-Ils ne l'apprendront pas ! Scanda l'enfant avec une autorité presque comique aux yeux de Jimin. On verra ça demain. Il est tard.

L'ordre était donné et Andrea recula, cherchant des yeux le katana pour se défendre avant qu'elle ne résiste aux mains qui voulaient l'attraper. On la guida vers une grange dans laquelle on l'enferma. Le sol était fait de terre battue et de foin.

Elle se recroquevilla dans un coin alors que Mr Jung entrait, l'air contrarié, et il la toisa :

-Tu dors là. Demain le jeune maître voudra sûrement te poser des questions, fais tout ce qu'on te demandera de faire. Estime-toi heureuse de passer la nuit ici.

Elle ne bougea pas, le sondant avant qu'il ne claque la langue :

-Le jeune seigneur fait gage de bonté, tu pourrais au moins dire pourquoi ces hommes te poursuivaient !

Mais elle ne répondit pas plus et il devint encore plus irrité. Derrière lui, dans l'entrebâillement de la porte, le petit domestique à la peau très pâle observait la scène avec curiosité et empathie.

-Portes-tu un nom ? Cracha l'adulte.

Elle n'ouvrit pas la bouche, et ne détacha pas son regard non plus. Face à ce silence, il finit par aboyer :

-Demain tu seras réveillée à l'aube et les seigneurs de cette demeure décideront de ce qu'on fera de toi.

Il la laissa là et referma la porte dont il tourna le verrou à double tour. Dans le noir, Andrea avisa un peu de foin pour s'allonger. Ses quelques contusions avaient arrêté de saigner et les rares rayons lunaires qui passaient entre les planches de bois donnaient une certaine luminosité à la pièce.

Sa respiration était toujours saccadée et ses mains tremblaient, accrochées à sa tenue. Lentement et en grimaçant, elle se laissa aller à l'angoisse, à la panique, avant de prendre sur elle pour se calmer.

Jimin la voyait en proie à la sidération et à la confusion alors qu'elle regardait ses mains tâchées du meurtre qu'elle avait commis.

Entre cette angoisse et cette incertitude concernant son devenir, elle ne put trouver le sommeil. Elle ne parvint qu'à s'assoupir d'épuisement sur le matin, comme si elle s'attendait à chaque seconde de la nuit à ce qu'une attaque surgisse ou que les hommes japonais reviennent.

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