Chapitre 14

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La nuit était chaude. Très chaude. Peut être pas autant que d'habitude, mais elle restait suffocante pour à peu près tout le monde. Peu d'air entrait dans la grotte à même le volcan où se trouvait un dragon gigantesque qui faisait de son mieux pour dormir là. Noir et gris, ses écailles reflètaient la lumières des petites flammèches qui parcouraient la cavité où il était retenu par des barreaux de pierres gravés. Dans son sommeil il remua un peu la tête, agité par un mauvais rêves qui fit sortir des petites flammes noires de ses narines. Trop fatigué, cela ne suffit pas à le réveiller, grognant alors dans sa torpeur révéler des dents plus aiguisées les unes que les autres. Nuls doutes qu'une seule morsure arracherait le bras d'un humain sans difficulté. Pourtant c'est un humain, du moins quelqu'un qui y ressemblait qui entra dans la grotte, portant un plateau énorme recouvert de viande fraîche. Il le lança sans précaution à travers les épais barreaux en touchant la bête au passage, la réveillant. Le dragon releva alors la tête en se dressant sur ses pattes avant, fixant l'homme de ses pupilles fendues à la cornée noire. Il cracha un torrent de flammes de la même couleur qui s'arrêtèrent contre les barreaux, comme si un mur invisible les y retenaient.

-Je finirai par te flamber un jour, sale traitre! Vous êtes tous des traîtres! Cria le dragon en donnant des coups puissants contre les parois qui ne bougèrent pas.

-Après toutes ces années tu ne comprends toujours pas que tu ne peux pas les détruires? Tu sais très bien que la fleur de sape te prive de toute ta force. Pourquoi perdre ton temps à essayer de me tuer ou de sortir quand tu peux penser à ce que tu as abandonné dehors dis moi Alcin?. Ces paroles eurent l'effet d'une douche froide avant que le dragon ne s'énerve davantage.

-Je t'interdis d'en parler en ma présence, tu n'as pas le droit! Tout mais pas ça! Dit il en frappant les barreaux de ses pattes. Si j'avais su ce qui allait se passer je t'aurai tué quand j'en ai eu l'occasion! Cria le dragon de sa prison en foudroyant de son regard noir l'homme qui lui souriait en croisant les bras.

-Dommage que tu ai été trop bête et aveugle. Maintenant c'est trop tard. Tu vas pourrir dans cette cellule sans jamais revoir la lumière du jour, ni même étendre tes ailes sous celle de Lunam. Prend le temps de réfléchir à tes actes, plutôt que de nourrir une haine qui ne te mènera nulle part. D'un rire mauvais l'homme tourna les talons. Le bruit de ses pas ricocha dans un écho détestable à travers la grotte, laissant Alcin à sa solitude.

Comme tous les matins Erieka vit le plafond de la cabane quand elle ouvrit les yeux. Sa nuit avait été paisible, plus que les précédentes. Les éléments de la veille avaient légèrement apaisé sa conscience, bien qu'ils n'étaient pas vraiment rassurant à y repenser. Pourtant elle était contente d'avoir au moins une piste et de pouvoir assister à la naissance de sentiments chez son frère. Bien sûr que sa condition lui importait mais la douceur et le développement d'une chose aussi belle que l'amour avait toujours eu à ses yeux plus d'importance que tout le reste. Peut être qu'Ankê ne le vivait pas comme ça, il avait plutôt l'air d'en avoir peur mais Erieka était prête à tout pour préserver ce bourgeon. Elle ne forcerait pas son frère à faire quoique se soit cependant. Personne n'avait ce droit. D'un mouvement de tête elle le regarda d'ailleurs, toujours allongé le visage tourné vers le dos de Rohork qui lui aussi n'était pas réveillé. Ce spectacle arracha un rapide sourire à la jeune fille qui s'assura que l'image resterait gravée dans sa mémoire avant qu'elle ne se lève pour prendre une pomme et du pain qui restaient des provisions d'Urma et quitte la cabane. Solem se levait doucement. "encore levée au aurores", marmonna Erieka avant de croquer dans sa pomme. La journée s'annonçait plutôt bonne, plus fraîche également. Aujourd'hui Rohork avait dit qu'ils arriveraient à une station équestre pour accélérer le mouvement et arriver plus vite au port. Enfin, prendre le bateau avait été hors de question pendant un long moment jusqu'à ce qu'Ankê le supplie également d'accepter. A deux contre un il ne put résister longtemps et céda. Tout comme voyager aussi loin, chevaucher allait être une première pour la jeune fille et son frère. Elle avait essayé étant jeune, mais avait été rapidement déçue et apeurée par l'animal. Surtout sachant que Gavriil s'était amusé à le faire galoper en le tenant par une grande longe. Un souvenir impérissable dans sa mémoire, mais pas pour les bonnes raisons. On lui avait souvent répété que les chevaux sentaient la peur de ceux qui les montaient. C'est d'ailleurs pour ça que tout en finissant son petit déjeuner, elle essayait de se convaincre que tout allait bien aller cette fois-ci. Gavriil n'était pas là pour lui faire une mauvaise blague après tout. Chassant finalement ces pensées si peu convenables pour un matin si magnifique, Erieka préféra relever la tête et fixer le ciel qui devenait de plus en plus clair en remerciant la nuit d'avoir rafraîchi le sol et les environs. Elle ne sut pas pendant combien de temps elle resta plantée là mais Solem avait bien avancé dans sa course céleste quand Rohork sortit de la tente en baillant, se cachant un peu les yeux face à la lumière qui lui faisait mal. Erieka ne le remarqua pas sur l'instant, bien trop occupée à contempler son collier qui brillait sous les rayons de lumière. La pierre violette laissait les réfractions de la même couleur parcourir la peau sombre de la jeune fille qui trouvait cet effet naturel magnifique. Si le naga n'avait pas fait du bruit en marchant sur une brindille qui traînait là, Erieka l'aurait sans doute ignoré jusqu'à ce qu'elle se soit tourné. Rassurée de voir que c'était son ami et qu'elle avait eu peur pour rien elle le salua simplement. Rohork lui rendit son bonjour alors qu'il la rejoignait en regardant avec une certaine curiosité ce qu'elle faisait.

Reflets d'Obsidienne Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant