Chapitre 59 Le char d'Apollyon

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Isabelle était venue me chercher afin de poursuivre notre enquête à la tombée du soir. Nous devions tous nous retrouver sous l'arc de triomphe du Carrousel. Irina avait usé de ses relations au ministère pour que nous puissions approcher à titre exceptionnel les chevaux.

« Enfin vous voila ! S'exclama Charlotte.

—Il faut nous dépêcher, repris Irina. Le ministère ne nous donne qu'une heure. En principe, personne n'est autorisé à monter au sommet. »

Irina nous guida à travers un étroit escalier en colimaçon. Nous arrivâmes alors sur le toit du monument, d'où nous pûmes pendant quelques minutes contempler l'impressionnante vue sur le Louvres. Avec le vent du soir, les sons tumultueux de Paris parvenaient jusqu'à nous comme une symphonie interprétée dans le lointain.

« Tout a tellement changé ! Soupira Isabelle.

Elle s'appuya contre le muret, les cheveux au vent, laissant ses yeux baigner dans la lumière de la Lune.

—Ah oui, cette pyramide n'était pas là, de ton temps. Dis-je.

—Non, effectivement mais notre intérêt pour l'orientalisme est plus ancien que moi.

—Debout les rêveurs ! Cria Charlotte. Alexandre, tu prends le cheval de droite, je prends celui gauche. Étienne et Isabelle, vous prenez ceux du centre. Inspectez chaque recoin au maximum.

—Whoa ! Ils sont immenses ! Déclara Isabelle. »

Pendant qu'Irina déployait du matériel électronique, nous, vampires, usions de tous nos dons de perception pour percer le mystère des chevaux.

À première vue, ils avaient l'air identique. Ils semblaient tirer un char occupé par une allégorie, habillée à la mode des empereurs romains. Deux gardiens plaqués de feuille d'or paraissaient retenir leur bride : La Paix et la Victoire. Disposés de chaque côté du char, ils semblaient inquiets de ce qui pourrait arriver si, par inattention, ils venaient à la lâcher et libérer les chevaux sur le monde.

Je m'approchais de mon cheval, le quatrième, je l'inspectais, mais je ne remarquais rien d'anormal. Aucune inscription, ni aucun symbole caché.

« Nous faisons fausse route. Dit Étienne. Je vous l'avais dit, aucun de ces bourrins n'était présent du temps de Lorenzo. De la contrefaçon, voila tout !

Pendant qu'il parlait, je pris quelques secondes pour observer le ciel étoilé. Isabelle vint me rejoindre.

—Tu ne leur as pas parlé de ce que tu as vu.

Je soupirai

—Non.

—C'est en priant que tu as des visions ?

Je ne répondis pas tout de suite. Je repensais à ce que m'avait dit Charlotte à propos de son époux.

—Tout comme Lorenzo ! M'exclamai-je. Mais oui, bien sûr, il priait ! C'est bien ce que m'a dit Charlotte, Lorenzo priait !

Isabelle me regarda avec des yeux ronds.

—Et alors ?

—Et alors ? Il gardait une Bible sur lui, pleine d'annotations. Et s'il priait pour avoir des visions comme j'en ai eu dans l'église ?

—Tu veux parler de divination ?

—Un truc dans le genre, oui. Avait-il ce pouvoir ?

—Je n'en sais rien. Ce n'est pas impossible. Tu penses qu'il a reçu des visions en touchant ces chevaux ?

—Il n'y a qu'un seul moyen de le savoir... »

Devant tous, j'étais prêt à mettre à l'épreuve ma théorie, quitte à revivre une seconde fois les minutes d'enfer de Saint Sulpice. Je me dirigeai résolument vers le quatrième cheval et posait ma main dessus. Je fermais doucement les yeux.

Lorsque je revins à moi, tous s'étaient réunis en cercle autour de moi afin de savoir ce que j'avais vu dans mes rêves.

« Du papier, un stylo. Exigeai-je. »

Irina s'empressa de me confier son carnet de note. Je dessinais tant bien que mal l'étrange forme que j'avais vue en rêve.

Cela ressemblait à un losange muni d'extensions au niveau des angles. Comme un tesson de verre. Je tendais le dessin à Charlotte qui le fit passer à Irina.

« Jeune homme, tu ne m'avais jamais dit que tu avais des visions. Tu as vu ce symbole rien qu'en touchant ce cheval ? Demanda Charlotte.

—J'ai senti que c'était son nom. Comme s'il voulait me le dire. Répondis-je.

—Il déraille ! Rétorqua Étienne. Cette figure ne veut rien dire, cela ne correspond à aucune langue connue...

—Si ! Répliqua Irina. Je sais ce que c'est...

—Vous connaissez cette écriture Madame Tchernova ?

—Pas écriture, non. Regardez plutôt derrière vous. Elle est là ce soir, cette jeune demoiselle.

Nous nous retournâmes tous ensemble, en direction du ciel étoilé. Face à nous, illuminant le ciel, se tenait la constellation de la Vierge, dont la disposition des étoiles était identique à mon dessin.

La reine de la nuit : La libération Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant