CHAPITRE 3

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Pendant qu'il me raconte ces légendes, je prends le temps de trier le vrai du faux dans ma tête.

Oui, c'est vrai que j'ai vécu il y a trois-cents ans. Non, je n'ai pas réduit l'Empire Carmin à un tas de ruines en partant. Non, je n'étais pas fou de colère. Oui, j'étais proche du peuple. Attends, moi ? Proche du peuple ? Je n'en ai aucun souvenir...

Et ainsi de suite tout au long de sa narration. Au bout d'un moment, il a dû se rendre compte que je n'écoute pas et s'interrompt

— Et donc, Finnéas, pourquoi portez-vous le même nom que lui ?

Devrais-je lui dire la vérité ? Ou mentir ? Me croira-t-il si je lui dévoile tout ? J'hésite longuement avant de décider de lui mentir pour le moment.

— Mes parents m'ont nommé comme lui, sans doute pour m'encourager dans ma vie, lui répondis-je, pourquoi donc cette question ?

— Vous comprendrez si je vous raconte la fin de la légende.

— Alors je t'écoute.

Il reprit son récit

"Le mage Finnéas, fou de rage, détruisit l'Empire d'un seul sort. Le seul bâtiment encore debout était le château. L'Empereur, voyant ça, le maudit et le condamna à la vie éternelle.
On raconte encore aujourd'hui d'étranges histoires d'enlèvements. Des enlèvements ayant lieu dans la plus grande forêt du Royaume Bleu, perpétrés par une silhouette blanche immortelle."

Il me regarde droit dans les yeux avant de reprendre

— Je trouve que vous correspondez bien à cette "silhouette blanche". Et le lieu concorde. Si vous êtes bien le mage Finnéas dont il est question, deux choix s'offrent à moi: vous écouter démêler le vrai du faux de ces légendes ou vous arrêter et vous traîner devant le Roi.

— Et que souhaites-tu faire ?

— Vous écouter, pour le moment...

Et j'ai passé le reste de l'après-midi à donner ma version des légendes. À la fin, il me posa une seule et unique question:

— Pouvez-vous me prouver que vous êtes le vrai Finnéas ? Si vous c'est le cas, vu votre âge, vous êtes effectivement Archimage ! Et je ne parle pas de votre puissance !

—La monnaie qui a cours dans l'Empire actuellement, quelle est-elle ?

— Le Farian

— ah... zut... Je sais ! M'écriais-je

Je me lève d'un coup et part fouiller ma cape. Je jure tout bas car je ne trouve pas immédiatement ce que je cherche. D'un coup, je me fige. Ma main a rencontré un bout de papier. Je reviens alors vers le siège où se tenait Léod d'un pas vif, un grand sourire fixé sur le visage.

Je lui tends le papier, jaunit par le temps mais parfaitement conservé. Il le déplie et le lit, ses yeux s'écarquillant peu à peu en découvrant ce qui y est écrit. Il me regarde et le lit à haute voix pour être sûr.

— "Moi, le sixième Empereur Carmin, Fulor quatrième du nom, délivre ce sauf-conduit à l'ancien Mage Impérial Finnéas.
J'ordonne à quiconque le lis, dans les quatre pays de Jereatha, de prêter assistance au Mage s'il en a besoin."

Un long silence suit cette tirade. Il me regarde, je le regarde et je sens un peu d'admiration et beaucoup d'interrogations dans ses yeux. Avant qu'il ne pose ses questions, je remarque qu'il fait nuit.

— Finnéa...

— Il fait nuit. Je t'offre l'hospitalité de ma caverne pour la nuit si tu le désir.

— Je... Vous ne voulez pas de questions, c'est ça ?

— Non, effectivement. Alors tu te décides ou je te met dehors ? Dis-je en plaisantant, un grand sourire aux lèvres

— J'accepte avec joie !

Puis à nouveau ce silence

— Dîtes...

— Une question, pas plus !

— Je doit apporter une missive au Roi, vous pourriez venir avec moi s'il vous plaît ?

— Je....

Je n'avais pas de réponse à lui fournir. J'étais partagé entre l'accompagner pour voir le Royaume, moi qui n'étais pas sorti depuis longtemps, et refuser, de peur de causer un désastre.

— Vous ne voulez pas, c'est ça ? Ce n'est pas grave, merci pour cette journée et pour votre hospitalité, dit-il déçu.

Je le guide vers sa chambre dans un silence de mort. Je l'apprécie, ce gamin. En plus, il est perdu! Je devrais l'aider. Et puis sortir ne me fera pas de mal. Mais si jamais je suis la cause d'une catastrophe, je m'en voudrais pour toujours... Une fois arrivé, je le laisse devant sa chambre en lui disant bonne nuit.

— Bonne nuit, Finnéas.

Je sens la tristesse dans sa voix. Je le comprends aussi. En une journée, il a rencontré le personnage principal de sa légende favorite.

Je pars me coucher aussi, pesant le pour et le contre dans ma tête. La nuit porte conseil, après tout. Je verrais demain.

Le lendemain

Je me réveille avant Finnéas. Je pense que je vais partir sans le réveiller. Ce n'est pas très poli, mais ça m'évitera d'espérer jusqu'à la dernière seconde qu'il parte avec moi.

Je mange une ration dans ma chambre sans faire trop de bruit, revêt mon armure et m'apprête à sortir par le corridor d'où je l'espionnais la veille quand je suis arrêté dans mon élan par une voix. Sa voix.

— Alors gamin, on fausse compagnie à son camarade de voyage ?

Je me retourne et vois Finnéas, prêt à partir, portant sa cape de voyage blanche sur les épaules et une besace en bandoulière.

L'Archimage des LégendesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant