15. délit.

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Le reste de la nuit a été très agréable pour Annekee. Ils ont bu du thé, mangé des stroopwafels—Matthijs est passé dans une boulangerie sur la route pour venir la chercher—mais ils ont surtout discuté et pris une bonne dose de fous rires. Annekee a eu l’impression de s’être dévoilée en sa présence, et ressentir un attachement aussi fort en à peine une seule soirée l’effraie. Pourtant, elle peut pas se se résoudre à lui dire au revoir lorsqu’il la dépose devant la maison de Sigrid.

— J’ai vraiment passé une bonne soirée, Matthijs déclare, sourire aux lèvres. 

— Moi aussi, Annekee répond en essayant de rester dans la retenue. 

— Est-ce que tu serais d’accord pour qu’on se revoit une autre fois ? Matthis demande, les mains serrées sur le volant sous le coup de la nervosité. Je veux dire, pour un autre rendez-vous. 

Annekee ne réfléchit pas une seconde avant d’acquiescer. Matthis est vraiment un jeune homme doux et sécurisant, bourré de charme et d’humour. Il trouve toujours des choses intéressantes à dire—il est aussi diplômé avec succès d’un établissement d’enseignement pré-universitaire—mais il reste modeste et ne cherche pas à se mettre en avant. Matthijs ne ressemble pas à la plupart des garçons de leur âge. Puis, sa fossette sur son menton, son sourire adorable et son regard métallique sont des raisons de plus d’accepter un nouveau rencard. 

— Cool, Matthijs hoche la tête, et ses joues se colorent de rouge. Euh, je pourrai avoir ton numéro de téléphone s’il te plaît ?

Annekee le lui dicte sans hésiter, attendrie par son trouble. Matthijs enregistre avec beaucoup de soin ses coordonnées sur son iPhone, s’empresse ensuite de le poser au-dessus de son tableau de bord. 

— Merci, Matthijs sourit en plongeant ses yeux dans les siens. Je t’appellerai.

Ses mots sonnent comme une promesse, et Annekee ne peut pas s’empêcher de rire. 

— J’attendrai, alors. 

À ce moment-là, Matthijs semble enfin prêter attention à l’environnement qui les entoure. 

— C’est ici que tu vis ?

Se penchant sur son tableau de bord, le capitaine de l’Ajax Amsterdam examine longuement la luxueuse demeure devant laquelle il a arrêté sa voiture. Annekee se mord les lèvres, consciente de ce qu’il doit bien penser. Matthijs tenait absolument à la déposer devant chez elle, malgré son insistance pour qu’il la laisse devant le De Vier Pilaren. Elle comprend ses intention, car les rues ne sont pas très sûres à cette heure avancée de la nuit. Mais maintenant, elle se sent comme obligée de lui expliquer la situation—ce qui la met terriblement mal à l’aise.

— Non, Annekee secoue alors la tête, et devant son expression confuse, elle se reprend. Si. 

Elle comprend qu’elle a encore plus perdue Matthijs puisque ses sourcils blonds se froncent. Annekee prend donc une petite inspiration, tente ensuite un sourire mais qui ressemble davantage à une grimace qu’autre chose. 

— C’est assez compliqué. Ce n’est pas ma maison c’est celle de ma mère. Je ne vis ici que temporairement, le temps de réunir assez d’argent pour partir. C’est pour cette raison que je travaille au restaurant, Annekee se pince ensuite les lèvres, lâche un rire gêné. Désolée, je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça.

— Parce que je te l’ai demandé, Matthijs hausse les épaules, comme pour lui signifier qu’il ne la juge pas et qu’elle n’a pas besoin de se sentir embarrassée.

C’est mission réussie étant donné que Annekee finit par se détendre. Elle saisit son sac à main posé à ses pieds en déclarant qu’il se fait tard et qu’elle doit y aller, puis pose sa main sur la portière, prête à sortir. Mais avant d’esquisser un autre geste, elle se retourne vers Matthijs et dépose un baiser sur sa joue. Annekee ne sait pas ce qui lui prend, elle a juste envie de le remercier pour le moment exquis qu’elle a passé en sa compagnie, pour avoir trouvé et lui avoir rendu son collier, pour être si compréhensif et délicat dans ses paroles. Elle ne lui laisse cependant pas le temps de réagir. 

— Bonne nuit, Matthijs, Annekee souffle avant de quitter le véhicule. 

Elle est encore sur le trottoir, à un mètre de son portail lorsque son téléphone se met à sonner. Intriguée par le numéro inconnu qui s’affiche sur son écran, elle décroche.

— Allô ?

— J’ai dit que j’appellerai.

Ses lèvres s’étirent lentement tandis qu’elle pivote pour constater avec une certaine surprise que la voiture de Matthijs n’est pas encore partie. Le footballeur, téléphone collé à l’oreille, sourit comme un imbécile devant son volant. Cette vision réchauffe le cœur de Annekee. Pourtant, elle tente de cacher du mieux qu’elle peut son amusement et prend une expression réprobatrice. 

— Téléphoner au volant est un délit.

Matthijs éclate de rire à son ton, et Annekee sent sa poitrine se comprimer. Leurs yeux ne sont pas quittés un seul instant. La jeune femme ne comprend vraiment pas ce qui peut bien lui arriver. Elle se sent bizarre, et surtout, elle ne parvient pas à arrêter de sourire. Annekee est consciente qu’elle doit probablement ressembler à une folle, avec ses cheveux décoiffés, ses joues rendues roses à cause du froid, et ses lèvres incurvées.

— Tu veux bien déjeuner avec moi demain ? Matthijs lui propose, et Annekee grimace parce qu’elle aurait adoré pouvoir accepter. À treize heures. 

— Je serai à l’université, je ne pourrai pas te rejoindre.

— Je passerai te prendre alors, Matthijs décrète, comme si ce n’était pas un problème. Bonne nuit.

— Bonne nuit.

Matthijs démarre enfin après de longues secondes à la fixer, et Annekee reste devant son portail à le regarder partir. C’est une fois qu’elle ne distingue plus la carrosserie de sa grosse Berline noire au bout de la rue qu’elle se décide à rentrer. Essayant de faire le moins de bruit possible—il est tout de même près de quatre heures du matin—, Annekee se glisse doucement dans la maison de sa mère. Elle referme la porte derrière elle avec le plus de délicatesse possible, mais elle ne peut pas faire un pas vers les escaliers qui mènent à sa chambre sans que les lumières du salon adjacent s’allument. 

Lorsque Annekee se retourne, elle trouve Sigrid, assise confortablement en peignoir sur un fauteuil moelleux, un verre de vin à la main.

— Tu rentres bien tard.

KETTING┃m.de ligt (✓)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant