III

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𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 3

<<Taehyung qu'est ce que tu fous ?

Il releva la tête. Il était terrifiant. Ses beaux traits angéliques étaient enlaidis méchamment par la fatigue, ses yeux s'ouvraient à peine et il avait l'air d'être complètement parti dans une dimension parallèle.

Jungkook accourut vers lui comme s'il avait été en danger et prit son visage entre ses mains pour instaurer un contact visuel, pressé de comprendre.

-Je dois écrire, tu comprends pas. Je n'ai fait que l'équivalent de vingt minutes de pièce alors qu'elle doit en faire une heure et demie. Je suis trop lent, je peux pas perdre de temps à faire autre chose comme par exemple-

-Mais hey petit coeur tu as déjà écrit VINGT MINUTES ! VINGT MINUTES ! TU AS COMMENCÉ HIER ! C'EST ÉNORME ! Est-ce que tu te rends compte de ça au moins ?

-Je-il soupira-...tu... ramène-moi à ma chambre Kook s'il te plaît...>>

Le noiraud ne dit rien de plus, nicha seulement la tête et le porta sans réfléchir plus que de raison à la manière singulière d'une princesse pour l'emmener dans sa chambre. Il dormait déjà. Il était littéralement tombé de fatigue dans ses bras.

Venant de la part d'un jeune homme qui faisait toujours attention à tout ce qu'il mangeait et à bien respecter la longueur interminable de ses nuits de sommeil profond, c'était très bizarre. Même pour une pièce passant à la télévision, aussi fantastique soit-il, il ne se couchait pas plus tard.

C'est la tête pleine de questions qui posaient tout leur poids sur son coeur qu'il entama la création d'un repas pour remplir le ventre sûrement vide de son meilleur ami, dont l'état de mort-vivant l'inquiétait. Il n'était pas sûr, en presque dix ans d'amitié, d'avoir déjà vu ce visage chez lui. Il espérait ne plus le revoir.

Ce qui était relativement impossible.

Il eut la gentillesse inouïe de lui faire un plateau repas, avec tout le nécessaire pour rattraper le vide de la journée. Le plateau sentait terriblement bon. En temps normal, Taehyung aurait accouru rien qu'en sentant l'odeur, mais là, non.

Jungkook ne voulait pas le réveiller mais il fallait qu'il mange. Alors doucement, il s'occupa de ses cheveux comme s'il s'occupait d'un chat, pour le réveiller sans être brusque. Il lui tendit le plateau lorsque l'un de ses yeux s'entrouvrit.

<<Je n'ai pas faim. Laisse-le sur ma commode, je le mangerais plus tard.

-T'es sûr ?

-Oui oui je le mangerais plus tard. >>

Le noiraud fronça ses sourcils, dessinés au fusain comme sur une feuille de papier qui aurait été son front. Il était très expressif. Et pourtant le châtain ne remarqua pas l'énervement mêlé aux prémices de peur dans l'expression de son meilleur ami.

Jungkook rêva de la mort de Taehyung, qui aurait été projeté violemment par un train dont le conducteur aurait été lui-même. Ça lui avait fait si peur qu'il s'était levé en sursaut pour rejoindre, sa peau recouverte dans sa presque intégralité d'un voile de moiteur, sa cuisine, encore.

Il passa devant la chambre de Taehyung. Une avidité de curiosité, malicieuse et calculatrice, lentement, peint un filtre sur ses yeux et sa capacité à voir la limite avec l'intimité complète de son meilleur ami. Jamais il n'était entré dans sa chambre ainsi tel un voleur. Il entrouvrit la porte. Le dîner n'avait pas bougé, il était seulement devenu froid. En revanche, Taehyung, lui, n'était pas dans son lit.

En trombe, il arriva dans le salon pour le voir à nouveau devant ses feuilles, à nouveau ses doigts pleins d'encre, à nouveau visiblement atteint par un charme mystique qui l'empêchait de se rendre compte de la présence de Jungkook.

<<Hé Taehyung qu'est-ce que tu fais ?

-Ça se voit pas ? J'ÉCRIS.

-Tae il est trois heures et demie et tu l'as déjà fait hier toute la journée abuse pas tu vas trop loin.

-Non mais j'avais des idées tu sais...Et il faut pas que je les oublie...>>

Il lui avait dit ça deux jours de suite.

Le suivant, il annonça que certains détails à rajouter le hantaient.

Le jour d'après encore, il lui dit que c'était une question d'artiste et que ces horaires lui convenaient mieux.

Ce fut comme si les cauchemars de Jungkook au milieu de la nuit l'alertaient tu réveil de Taehyung pour écrire sa pièce de théâtre. Comme s'ils lui insufflaient l'heure du danger.

Puis il commença à devenir légèrement plus violent, agressif dans ses réponses. Comme pour lui faire mal, comme pour le toucher réellement dans son amour pour lui, pour le rendre plus faible, pour le dissuader de s'inquiéter. Alors qu'il avait toujours été d'une douceur folle avec le noiraud, et que sa belle bouche rouge d'ange irréel ne lui avait jamais dit d'injures.

Jungkook avait eu droit à un "Mais laissez-moi écrire putain !" et à un "Merde tu comptes vraiment pas me laisser tranquille ?", en l'espace d'une semaine et demie. Ça lui faisait mal. Horriblement mal. Il le dégageait pratiquement à chaque fois qu'ils se trouvaient dans la même pièce pour que son ' air d'artiste' ne soit pas pollué. Il souffrait, en fait.

Il venait seulement lui dire que c'était bien trop tard, et que ce rythme de vie était dangereux. Qu'il s'inquiétait pour lui. Qu'il était son meilleur ami et qu'il tenait à lui comme à la prunelle de ses yeux alors le voir se tuer à petit feu lui faisait mal. Et lui il le jetait sans penser à rien d'autre qu'à sa pièce, la seule chose qu'il avait en bouche.

Ses personnages, le faux écrivain, Saejong, le fils du vrai, Junhong, les amies du vrai, Saeron et Hyoseong. Ces gens fictifs semblaient vivre avec eux, vivre en eux, en Taehyung. Après réflexion et en écoutant les paroles de son meilleur ami, Jungkook avait finit par comprendre que Taehyung adoptait les comportements de ses personnages sans le vouloir, notamment Junhong, de nature violente, et Saejong de nature opportuniste et colérique.

Il refusait de plus en plus souvent de manger. Regardant la nourriture comme si elle était avariée parfois, alors qu'en contrepartie, certains matins, il se nourrissait pour quatre. Il ne semblait plus se préoccuper de la nourriture que lorsque Jungkook allait se rendre au travail, ce qui lui fendait peu à peu le coeur. Tout ça avait un mauvais effet sur le corps du châtain, il avait perdu un peu trop en deux semaines totales de travail. Ses joues étaient bien plus creusées et ses cheveux poussaient. Il avait presque un mulet, avec son ancienne coupe dans une version légèrement plus longue.

Les seuls moments où il retrouvait l'objet de ses pensées comme il l'avait toujours connu étaient ces moments lorsqu'il s'évanouissait presque sur ses feuilles et que son esprit, peut-être plutôt son inconscient, l'appelait au secours. Il tombait dans ses bras et le tenait contre lui certaines parties de la nuit, l'empêchant de dormir dans sa propre chambre. Avant de se lever à nouveau pour aller écrire, malgré les protestations de son meilleur ami de plus en plus effrayé par l'état de son protégé.

Jungkook vivait un réel ascenseur émotionnel, oscillant entre la joie prononcée de dormir tout contre son petit ange, et la tristesse de le voir si obsédé par son travail.

Obsédé.

1206.

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Je devais tenir jusqu'à demain mais j'ai pas pu oups

Jme déteste je sais pas tenir mes décisions nevvdcf.

-𝐃𝐑𝐀𝐌𝐀𝐓𝐔𝐑𝐆𝐄 ᵏᵛOù les histoires vivent. Découvrez maintenant