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𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 10

Ils étaient rentrés à l'appartement en silence, sur un nuage, comme encore hypnotisés par le moment aux reflets de luxure qu'ils avaient adoré partager.

Taehyung avait les yeux brillants, comme des obsidiennes sous le soleil, bordés du velours de ses cils outrageusement longs, rivés sur les pieds de Jungkook.

Ils s'étaient couchés dans le même lit, celui de Taehyung, après avoir mangé. Oui Taehyung avait pris un repas complet, et il avait bu. Et Taehyung toute la nuit s'était collé à la chaleur de Jungkook, son dos contre la torse du plus grand.

Après ce moment, Taehyung sembla à nouveau avoir envie de faire autre chose qu'écrire. Le noiraud eut cette peur soudaine que le châtain utilise leur moment pour s'en inspirer. Lorsqu'il commença à nouveau à revenir plus souvent à la maison il coïncida avec son besoin croissant d'attention. Jungkook trouvait ça étrange mais en même temps ça lui faisait tellement de bien de voir du plaisir sur le visage du garçon qu'il aimait plutôt que le stress et la fatigue qu'il ne faisait même pas attention au caractère peu commun de la scène.

Il arrivait à Taehyung d'écrire quelques pages puis de soudainement déranger Jungkook écrivant ses articles en retard dans sa chambre en s'asseyant sur ses genoux pour lui offrir de langoureux baisers, profonds, ce genre de baisers qui donnaient au noiraud envie de croire que ses sentiments ancrés depuis longtemps avaient peut-être un côté réciproque.

Parfois, plutôt que de rester sans rien dire à Jungkook au théâtre, il lui envoyait un message, souvent juste un visage joyeux accompagné d'un petit mot comme "faim" qui voulait finalement dire "mange avec moi" de manière à ne pas perdre trop de temps.

Il ne disait rien de superflu, si il voulait embrasser Jungkook, il le faisait, s'il voulait le câliner, il le faisait, si il avait une soudaine et ardente envie de lui faire du bien, il le faisait. Il abusait peut-être un peu avec le noiraud mais celui-ci était tellement heureux de pouvoir partager tous ces moments avec le plus petit qu'il ne voyait même plus le potentiel mal.

Le noiraud se sentait comme sur un petit nuage, aux reflets rosés, percé de flèches aux embouts significatifs en forme de coeur, celles ensorcelantes de l'arc mystique de Cupidon, aveuglé littéralement par l'amour.

Il ne voyait aucun défaut au châtain soudainement, plus les fois où il devenait froid lorsqu'il écrivait, plus les fois où il lui mentait ouvertement.

Peut-être qu'il ne s'était pas passé tant de moments entre les deux depuis qu'ils avaient quitté la bulle de cet autre monde quelques jours auparavant, à même le sol boisé de la scène. Peut-être que Jungkook, au fond, ne voyait plus que ceux-là et qu'ils lui paraissaient devenir une habitude.

Ils devenaient au bon vouloir du plus petit dans le meilleur de cas courants, mais de là à devenir des habitudes tendres, sûrement pas. Et Taehyung n'était plus tendre très souvent d'ailleurs. Plus le temps passait et plus un démon semblait infecter tel un virus horriblement nocif les cellules de Taehyung, détruisant sauvagement sa personnalité aux reflets d'ange descendu trop tôt de ses cieux chaleureux.

Il était une partie du temps un meilleur ami gentil, attentionné, observateur et doux, et l'autre moitié du temps, il était un jeune homme arrogant, froid, sans particulièrement d'empathie pour le monde, dédaigneux de tout, de ceux dont le sentiment de supériorité croît et énerve. Il ressemblait à une représentation allégorique de la déesse nordique Hel, celle de la mort, celle aux deux visages.

Si Jungkook n'avait pas été aveugle pour cause d'amour trop puissant floutant ses pupilles vivaces d'origine, il ne lui aurait peut-être pas fallut beaucoup de temps pour s'apercevoir que Taehyung avait justement, tel un criminel aguerri, monté tout un plan aux échafaudages ingénieux pour l'empêcher de le déranger dans son travail d'écriture. Un rapprochement physique si radical et si soudain, tellement incompréhensible après des années d'amitié ne pouvait pas avoir été instauré de manière complètement désintéressée, même si Jungkook était un homme parfait aux yeux du châtain.

Donc, même s'il manquait effectivement cruellement d'affection telle que Jungkook lui en offrait, même s'il appréciait plus que de raison la sensibilité de son épiderme soyeux sous la pulpe des doigts du plus grand, même s'il adorait cette impression dévorante d'être le plus important, la prunelle de ses yeux lorsqu'il possédait seul la place dans ses bras, même si le visage du noiraud atteignant l'extase était la plus belle de toutes les images que le monde avait à offrir à ses yeux d'artiste, tout était réfléchi. Là, il voulait juste, utilisant sa peau contre la sienne à la manière d'un anesthésiant, ankyloser sa capacité à prendre en charge la situation, tranquiliser son sang chaud prêt à le protéger, bloquer son instinct de chevalier servant.

Le problème dans tout ça, était que depuis que ça avait commencé, non seulement Taehyung ne semblait plus ressentir d'empatie, mais surtout, il ne ressentait pas de culpabilité. Il ne regrettait pas de se servir de l'amour pur du noiraud à des fins opportunistes, il ne regrettait pas non plus d'aimer tout de même leurs moments bercés par les étoiles, il ne regrettait rien, rien du tout.

Il ne se rendait même pas compte qu'en faisant cela, il modifiait leur amitié si durement acquise à tous jamais, peut-être était-elle déjà perdue. Si il s'en rendait compte, ses pensées le ramèneraient à sa pièce, à sa place.

Il n'y avait plus que sa pièce qui comptait vraiment. Saejong, Junhong, Hyoseong et Saeron étaient les seules personnes qui avaient réellement de l'importance à ses yeux. Saejong surtout. Saejong était lui. Saejong était lui si jamais un jour quelqu'un lui volait son travail artistique, qu'il aurait souffert à faire, qu'il aurait passé des heures et des heures à faire, un travail qui lui aurait appartenu corps et âme et auquel il aurait appartenu. Saejong était la symbolique de lui-même qu'il imaginait si jamais un jour quelqu'un lui prenait sa raison de vivre, ses oeuvres. Même si dans ce cas, les oeuvres volées étaient celles de son père et non de lui même.

Il l'avait créé avec une dualité assez terrifiante dans son genre, qui était en fait la sienne, cette façon qu'il avait de pouvoir, en cas de moment important, devenir un garçon mauvais et exécrable, sans aucun respect pour les gens qui peuplent le monde.

Dualité qu'il avait cependant toujours cachée à Jungkook, jusqu'à ce que son désir de perfection dans son oeuvre ne se manifeste, en même temps que l'opportunité que la vie lui avait offerte. Opportunité qui agissait finalement de la même manière qu'un obstacle dans son existence à surmonter. Il était triste qu'il ne se rende pas compte que les choix qu'ils faisaient là possédaient une portée toute particulière, décisive.

Il écrivait à nouveau la nuit, puis lorsqu'il sentait que l'heure à laquelle Jungkook se réveillait approchait, il venait discrètement se faufiler dans son lit, pour le voir au réveil, et lui faire croire qu'il avait passé sa nuit avec. Il mettait du correcteur, celui de la comédienne qui allait jouer Saeron dans sa pièce, parce qu'elle l'oubliait toujours et qu'il lui permettait de cacher les terrifiantes fosses bordeaux qui envahissaient son regard. Il ne mangeait que très peu, mais juste assez pour que Jungkook le voie entrer quelques aliments dans sa bouche, pour qu'il croie qu'il mangeait vraiment. Il lui mentait et il le faisait bien.

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Le comportement de Taehyung vous en pensez quoi ?

-𝐃𝐑𝐀𝐌𝐀𝐓𝐔𝐑𝐆𝐄 ᵏᵛOù les histoires vivent. Découvrez maintenant