Chapitre 28 ✓

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PDV Jack Frost:

La semaine passe assez lentement.
Aujourd'hui, c'est mercredi. Je décide, ce matin, d'aller dans un parc aquatique de l'autre côté du pays.
Je repère assez rapidement un groupe scolaire. Tous les enfants sont habillés en bleus. Je me mêle aux bambins et m'accroupis devant un garçon.

-Tu me connais?
-Jack Frost! hurle un enfant derrière moi.

Je me retourne vers un garçon un peu rondouillard. Il pointe d'abord mes cheveux du doigt puis mon bâton avant de froncer les sourcils lorsqu'il montre mon sweat.

-Depuis quand tu as des nuages ?

Je frappe le sol avec mon bâton. De l'eau en jaillit et s'insère entre les pavés. Plein d'yeux s'arrondissent et des bouches s'ouvrent d'étonnement.

-Où est passé ta glace?!
-Elle est toujours là. Elle a juste... fondue.

Les accompagnateurs des enfants les appellent alors ils vont tous les rejoindre. Je les suis lentement, ne sachant trop quoi faire. Le garçon de toute à l'heure vient se mettre à ma hauteur.

-Il t'est arrivé quoi?
-Comment tu me connais? demandé-je sans répondre à sa question.
-Je ne sais pas. C'est comme le Père Noël, je l'ai en tête depuis que je suis né et toi aussi ! Tu l'as déjà vu, toi, le Père Noël?

Je fronce les sourcils.

-Comment ça? Bien sûr que je l'ai déjà vu! On a arrêté Pitch!
-Ah bon? Tu y étais toi aussi ? On m'a toujours dit qu'il y avait le Papa Noël, le Lapin de Pâques, le Marchant de Sable et la Fée des Dents!

Totalement alarmé, je vais poser les mêmes questions à d'autres enfants mais j'obtiens toujours la même réponse.
Ils ont oublié. Pour eux, je ne les ai jamais sauvé. Je n'ai eu aucun rôle pendant la bataille avec Pitch. Je suis juste Jack Frost, le garçon de l'hiver qui a perdu sa glace. Même mon nom ne veut plus rien dire. Frost c'est le givre. Comment je dois m'appeler maintenant? Water? Rain? Lost?
Je ris sans joie. Jack Lost, ce serait parfait non?
Je commence à partir mais une main me retient.

-Tu restes pas jouer avec nous?
-A quoi?
-On peut faire une bataille d'eau. La maîtresse nous a pris des pistolets.

J'hésite un instant à rester mais les regards suppliants posés sur moi font que je reste.
L'accompagnateur accepte de donner les pistolets que les enfants vont remplir dans une fontaine non loin de là. Une fois que tout le monde a chargé son arme, la bataille commence. Je mets du temps à rentrer dedans mais, après avoir reçu quelques jets, je décide de leur renvoyer la balle.
Presque timidement d'abord, j'envoie des filets d'eau sur quelques petites têtes. Et petit à petit, je me prends au jeu. Je génère des salves d'eau qui mouillent des tee-shirts déjà trempés. Les rires éclatent de partout et je me surprends même à rigoler avec eux.
Je rattrape une petite qui manque de tomber à la renverse avant de repartir à l'attaque. Lorsqu'un enfant me touche, j'en touche trois en retour.
J'entends la maîtresse appeler plusieurs fois ses élèves mais je ne m'en préoccupe pas et eux non plus. Sauf qu'au bout d'un moment, excédé, elle se poste au milieu de la bataille, rouge comme une pivoine et en criant:

-Ça suffit maintenant !

Sauf qu'elle reçoit deux jets d'eau: celui du petit rondouillard et le mien. Abasourdie, elle reste muette un instant. Autour d'elle, plus personne ne bouge.
Je fais apparaître une jolie goutte d'eau entre mes mains et souffle dessus comme je l'aurai fait avec un flocon. Comme par magie, la perle s'envole pour aller s'écraser sur le bout du nez de la femme. Elle se radoucit presque aussitôt.

-Les enfants, on va bientôt manger. Il faudrait que vous soyez secs. Vous pensez que c'est possible?
-Oui! hurle toute la classe.

Tous les pistolets se retrouvent dans des poches et les enfants se mettent au soleil pour sécher.

-Merci, dis-je au petit garçon rond.

Il ne semble pas trop comprendre mes répond tout de même:

-Merci à toi. On s'est bien amusés !

Je lui fais un signe de tête et m'envole pour rentrer.
J'arrive quasiment en même temps qu'Aurélien. Il va directement manger alors je l'attends à la fenêtre. A la fin du repas, lorsqu'il vient m'ouvrir, il a une assiette de risotto à la main.

-Tu as faim?
-Un peu oui.

Je m'assois sur le bureau pour manger avec gourmandise.

-C'est super bon!
-Ma maman le réussit toujours, dit-il en hochant la tête.

L'adolescent s'assoit sur le lit.

-Tu as passé une bonne journée ?
-C'était mal parti mais, après une bataille d'eau, ça allait mieux.
-Pourquoi c'était mal parti?
-Ils ont oublié mon rôle de Gardien. Pour eux, j'étais juste Jack Frost, le garçon de l'hiver. Et maintenant, je suis Jack Frost, le garçon du jet d'eau.

J'ouvre la bouche pour dire autre chose mais je me ravise. Et finalement, je le dis quand même:

-Enfin, je suis plutôt Jack Lost.

Aurélien fronce les sourcils.

-Qu'est-ce que tu racontes?
-Parfois, je me sens perdu. J'ai l'impression d'être incomplet sans ma glace.

Une boule se forme dans ma gorge alors qu'une lueur inquiète passe dans les yeux d'Aurélien. Je repose l'assiette.
L'adolescent vient s'agenouiller devant moi et prend sa main dans la mienne.

-Qu'est-ce que je peux faire pour t'aider?
-Tu fais déjà beaucoup pour moi. Tu m'offres un toit, de quoi dormir et même la nourriture. Et moi, qu'est-ce que je t'apporte en retour?

Aurélien se redresse et sa bouche vient capturer la mienne. Sa main droite se glisse contre ma joue alors que l'autre se faufile dans mon cou. J'attrape ses hanches que je serre en répondant à son baiser innattendu.
Mon adolescent s'assoit sur mes cuisses et approfondit le baiser. Je sens sa langue contre mes lèvres alors je m'empresse de la caresser avec la mienne. Sans le vouloir, mes doigts se glissent sous le tee-shirt d'Aurélien. Sa respiration se coupe quelques instants avant de repartir de plus belle. Ses joues sont rouges et je n'imagine même pas l'état des miennes.
Les lèvres de mon garçon se faufile jusqu'à mon cou pour déposer une bonne dizaine de baisers. Puis plus rien.
Je reprends lentement mon souffle et Aurélien aussi. Et là, très doucement, il murmure:

-Je t'aime...

C'est à mon tour d'avoir le souffle coupé.

-Tu dis que tu ne m'apportes rien, mais c'est faux. Je suis heureux quand t'es là, je me sens toujours bien. J'aimerai moi aussi pouvoir te rendre heureux.

Je glisse ma main dans ses cheveux et les caresse distraitement.
Je prends une grande inspiration et lui dis tout bas:

-Moi aussi, je me sens bien quand je suis avec toi.

Une autre inspiration. La voix tremblante, les yeux fermés, je conclus tendrement:

-Je t'aime.

Je sens le regard d'Aurélien sur ma peau puis sa main caresser mon visage. Il m'embrasse à nouveau, beaucoup plus chastement cette fois-ci.

-Tu t'en sortiras, me promet-il. Ensemble, on y fera face.

Mon cœur bat vite et, pourtant, je me sens totalement apaisé. Je me raccroche au tee-shirt de mon Aurélien. Tout ira bien.

...
Deux chapitres en deux jours ! 😆

Le froid glace le tempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant