Chapitre XI

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J'avais l'impression d'avoir à peine fermé les yeux quand je sentis qu'on me secouait doucement par l'épaule. Quand j'émergeai enfin, Tarkal était déjà prêt pour notre journée d'achats.

– Préparez-vous et rejoignez-moi dans la grande salle, je vais veiller à ce qu'on nous prépare un solide petit déjeuner.

Sur quoi il sortit de la chambre. Je m'assis dans le lit, j'entendais l'animation de la rue monter jusqu'à la fenêtre. J'écoutais tous ces sons inhabituels en essayant d'imaginer à quoi ils pouvaient correspondre.

Je fermai les yeux et m'imprégnai de cette vie que je ne connaissais pas. Puis je pris une grande inspiration et me levait. Je cherchais mes vêtements que j'avais laissés en tas par terre un peu plus tôt. Tarkal les avait soigneusement déposés sur un fauteuil dans le coin de la pièce, ce qui me fit sourire car c'était exactement le genre de chose qu'il ne pouvait pas s'empêcher de faire. Il aimait l'ordre plus que tout et quelque chose qui ne serait pas à sa place le perturberait sincèrement, il était incapable de travailler dans un environnement dérangé.

J'attrapai mes vêtements que j'enfilai rapidement et me retrouvai en bas des marches de l'escalier à chercher Tarkal des yeux. Je l'aperçus au fond de la pièce là où nous nous étions installés la veille au soir. Il avait en effet prévu un copieux petit déjeuner. Je me rendis compte en le voyant et surtout en sentant les effluves qui en émanaient, à quel point j'avais faim. Les événements de la nuit m'avaient creusés. Je salivais rien qu'à voir notre table.

Il avait commandé de la charcuterie, du pain, du miel, toute sorte de fruits, du gruau d'avoine et des biscuits secs. Je traversai la pièce et m'installai en face de lui. Il eut l'air amusé devant mes yeux pétillants et mon air de petite fille gourmande. Pendant qu'on se restaurait, il passa en revue toutes les échoppes dans lesquelles on devrait se rendre dans la journée, il espérait que tout serait disponible de suite afin qu'on puisse repartir rapidement.

Nous étions en train d'emballer les reliefs de notre repas quand l'aubergiste vint nous voir pour nous informer qu'un membre de la noblesse avec toute sa suite viendrait passer la nuit à l'auberge et que si nous souhaitions y passer une nuit de plus il faudrait payer d'avance la chambre afin de la réserver. Tarkal décida qu'il valait mieux être prudent et réserva la chambre, bien que visiblement cette information le contraria. Une fois que l'aubergiste se fut éloigné j'en profitai pour l'interroger :

– Qu'est ce qui vous énerve autant, le fait de rester une nuit de plus, ou le fait qu'un membre de la noblesse vienne passer la nuit ici ?

– Les deux à vrai dire, j'aurais aimé ne rester qu'une seule journée et vous n'imaginez pas les complications qu'apporte avec eux les nobles qui se déplacent. Ils sont toujours accompagnés d'une foule de personnes qui les servent et de tout un tas d'autres personnes encore, pas toujours bien intentionnées. On a tout intérêt à redoubler de prudence, mais au moins ce sera plus facile de passer inaperçus. Par contre nous devrons regagner notre chambre suffisamment tôt ce soir pour éviter la cohue.

Tout en discutant, nous étions sortis de l'auberge et nous dirigions vers la première échoppe, celle d'un couturier que nous avions croisé la veille. Nous y pénétrâmes. La pièce n'était pas très grande, mais particulièrement lumineuse. Un étalage central présentait divers coupons de tissus, les murs quant à eux étaient encombrés de nombreuses étagères sur lesquelles étaient disposés les rouleaux d'étoffes correspondant aux échantillons présentés. Un homme sans âge se retourna et nous sourit. Il était plus petit que nous et paraissait tassé par le poids des années, mais son visage parcheminé était souriant et doux.

– Noble damoiselle, noble sire, je vous salue. Je suis le maître tailleur de cet établissement. Comment puis-je vous satisfaire ?

Tarkal s'avança vers lui :

Astria Tome I MétamorphoseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant