Challenge a.fanarts.promise, thème de la semaine 5 : Les objets animés
Roseline dormait paisiblement depuis longtemps lorsque Berenilde réapparut au petit matin, toute sa prestance perdue, le regard vide et le sourire aux lèvres. Le premier sentiment qui assaillit Thorn fut la honte de voir sa tante se mettre dans cet état pour obtenir l'affection d'un être incapable de se souvenir de son nom et encore moins de réaliser qu'elle porte son enfant. Le second sentiment fut la pitié et il entreprit de la mettre au lit malgré sa taille et ses douleurs.
Thorn avait passé une soirée épouvantable et n'avait pu approcher le Livre de Farouk, trop occupé à éviter les gendarmes qui recherchaient Mime. Il avait dû se résoudre à emprunter une tenue de soubrette, et pour se faire, se déshabiller. Quelle sensation étrange de découvrir les formes de celle qui hantait malgré lui ses pensées.
Allongé inconfortablement sur une méridienne damassée de la chambre de sa tante, les petites jambes ramenées près de lui et les côtes douloureuses, Thorn avait eu beaucoup du mal à trouver le sommeil.
Il rêvait, ou plutôt faisait un cauchemar étrange, interminable et particulièrement réaliste.
Il vit et sentit successivement les événements qu'Ophélie lui avait racontés mais ils étaient bien plus effrayants qu'il ne s'y attendait. La geôle lugubre, les gendarmes qui ne cessaient de le frapper avec une telle animosité, le panier d'oranges et Hildegarde allongée par terre à la fin d'une célébration funèbre à laquelle Thorn n'avait pas assisté. Il apercevait ensuite les mesquineries incessantes de Berenilde. Il ressentait un manque permanent de chaleur autour de son cou.Dans son rêve, il rencontra Renard et une étrange domestique prénommée Gaëlle.
Puis d'autres images vinrent à ses yeux dans un ordre confus. Freija qui le gifle, Archibald dans un champs de coquelicots, son propre visage qui le fixe, le froid glaçant dans un traîneau volant, le chaud d'un feu qu'on ne peut approcher. Il reconnut le voyage en zeeplin mais il ne supportait point le tangage de l'engin qui lui donnait la nausée. Il se rassura, les mains glissées dans une écharpe qui l'entourait, affectueuse et solidaire.À chacune de ses émotions que le cauchemar lui faisait ressentir par un réalisme très troublant, Thorn remarqua qu'une ambiance colorée y était attachée. Sombre pour la colère, bleue pour la peur, verte pour la gêne...
Il se revit en face de lui-même, vêtu de cette peau d'ours qui lui semblait tout à coup ridicule et inappropriée. Il ressentit la gêne d'une famille trop fantasque et trop empressée. Il vit Ophélie devant un miroir alors que sa sœur Agathe lui proposait des robes les plus ridicules les unes que les autres.
Dans son rêve, il vit beaucoup Ophélie. Tantôt en train de câliner ou tricoter une écharpe, tantôt en train de se regarder à travers un miroir ou le traverser. Il ressentait profondément l'affection que lui témoignait le grand oncle dont il ne comprenait pourtant qu'un mot sur deux. Il resta longuement isolé dans un musée, agencé avec patience et passion. C'était son sanctuaire, le seul lieu où il semblait être heureux.
Il eut ensuite devant ses yeux un homme grassouillet aux yeux gourmands, pâtissier sur Anima, auquel Thorn, dans son songe, repoussait péniblement ses avances.
Puis un second cousin apparut, d'un physique plus avenant mais qui exprimait avec amphase toutes les exigences qu'il s'attendait trouver chez son épouse idéale. Dans son rêve, Thorn lui affirma fermement qu'il n'existât sur cette arche aucune femme qui ne puisse l'agréer.
Et enfin un troisième, au fasciés sympathique mais qui n'aimait ni les livres, ni l'histoire et qui de surcroît exigeait de sa future épouse qu'elle travaillât auprès de lui dans sa manufacture de porcelaine.Puis une panique le prit alors qu'un des parents tirait sur ses bras dans le salon alors que l'autre le poussait dans sa chambre. Un accident de miroir. C'est alors qu'il ne vit plus du tout Ophélie de la même manière, ses cheveux devenaient de plus en plus roux à mesure qu'elle rajeunissait, quelques taches de rousseur coquines apparaissaient mêmes sur ses pommettes rebondies. Et enfin le rêve prit fin lorsqu'un homme, à la chevelure éparse, se penchait vers lui en ajustant ses lunettes.
Thorn fut réveillé en sursaut par une sonnerie stridente et répétitive. Un téléphone. Il se redressa mais l'appareil se tut. La tête encore engourdie par ce rêve étrange, Thorn se frotta le visage et passa ses doigts sous ses lunettes afin de masser ses tempes. C'est alors qu'il s'aperçut qu'une de ses mains était gantée l'autre non. Les lunettes ! Il s'était endormi la main nue posée sur la monture qu'il portait. Il comprit alors que ce qu'il croyait être un cauchemar n'était en vérité que la lecture involontaire des lunettes d'Ophélie. Et quelle lecture!
Il se leva, ramassa le gant esseulé à terre et l'enfila. Confus, il se dirigea vers la psyché de Berenilde pour se regarder - pour la regarder - de la tête au pied. Ainsi donc la petite fiancée avait subi bien des choses dont il n'avait pas idée. Sa vie au Pôle, tellement pénible, et celle sur Anima qui n'avait pas été aussi idyllique qu'il ne l'avait cru. La relation mitigée avec ses proches. Les prétendants qu'elle avait éconduits. Le musée qu'elle avait quitté à regrets...
Qu'avait-il fait? Déraciner Ophélie de sa vie sans éclats pour l'amener ici au Pôle où elle avait subi bien pire encore. Certes, elle n'était pas la pauvre petite animiste maladroite qui ne passerait pas l'hiver et elle l'avait bien amplement détrompé par sa ténacité impressionnante mais cette lecture lui en disait bien plus long sur elle. Elle était courageuse, honnête et déterminée. Son cœur était pur, bien plus que le sien.
Il se passa les mains sur sa gorge nue et frissonna. L'écharpe même lui manquait. Cet horrible chiffon hideux et usé qui n'avait jamais jusqu'alors quitté sa maîtresse n'était plus là pour la rassurer et la protéger.
Il fallait qu'il reprenne ses esprits et chasse de ceux-ci tous les tourments dans lesquels l'avait plongé sa lecture involontaire. Il entreprit de se faire un café, bien fort, mais une première tasse lui échappa des mains et tomba mollement sur le tapis. La cafetière elle-même se mit à reculer telle une proie face un potentiel prédateur à la maladresse imprévisible.
Le téléphone se remit à sonner et il faillit renverser une deuxième tasse sous l'effet de la surprise. Alors qu'il se dirigeait vers la console où était posé le bruyant appareil, il vit Roseline se réveiller et se redresser d'un bond alors que la tête de Berenilde émergeait à peine de ses moelleux oreillers.
Thorn se racla la gorge et décrocha.
- Allo?
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La Passe Miroir Challenge A Fanarts Promise 1.0
FanfictionAfin de patienter jusqu'à la sortie du tome 4 de La Passe-miroir, La Clique sur Instagram à décidé de lancer le challenge A Fanarts Promise. Chaque semaine un thème. J'ai commencé cette fanfiction pour ma participation au 3ème thème : Les personnag...