CHAPITRE 11 - Survivre

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Il y eut un long instant de flottement, durant lequel on dut prendre conscience de cette nouvelle perte. Puis, le Meridiem prit mon amie par les épaules, et la confronta à lui :

— Xerys.

La jeune fille releva les yeux, ses cils trempés et les joues encore rouges. Jamais je n'avais vu de telle détresse dans le regard de quelqu'un. Elle était pâle comme la mort.

Tout à coup, son front s'illumina d'une lueur dorée, discrète ; une tiare d'or, la même que celle portée par Isira, se matérialisa contre sa peau. Elyon recula, surpris. Un faisceau de magie s'échappa de l'objet, et alla se planter dans son dos, d'où sortirent deux longues ailes de lumière dorée, grandes et majestueuses, frôlant le sol. Un sceptre surgit ensuite devant la jeune fille ; il était reconnaissable entre mille : c'était l'Arcesso lui-même, levé il y a une heure encore par Isira.

Xerys porta une main tremblante sur le bâton d'or. On retint notre souffle. À peine ses doigts effleurèrent la relique, que celle-ci disparut, se réfugiant dans la tiare. Mon amie se laissa tomber au sol, les ailes pendantes. Avec Elyon, nous restâmes muets, bien trop assommés pour pouvoir réagir d'une quelconque façon.

— Tu es une Messagère, maintenant, c'est bien cela ? soufflai-je tout bas.

Elle hocha la tête, les mèches de son chignon qui s'étaient échappées retombant sur son visage. Les larmes revinrent à la charge, et Xerys lâcha un sanglot. Elyon s'accroupit en face d'elle.

— Meryl et ta mère ne souhaiteraient pas que tu te laisses abattre à cause d'elles. Elles ne voudraient pas qu'Archaos nous retrouve alors qu'elles se sont sacrifiées pour nous permettre de nous enfuir. (Il releva son menton, avec douceur) Tu es la seule à pouvoir nous guider, lui dit-il. Tes pouvoirs de Xemehys et de Messagère vont augmenter ton instinct, tu trouveras la sortie.

Tel un automate, elle hocha la tête et se redressa, titubante. Je lui tins le bras, l'aidant à garder l'équilibre.

Qu'Elyon prenne en main la situation me rassura bien plus que je ne compterais jamais l'avouer ; dans de pareilles circonstances, je n'aurais pas eu la présence d'esprit dont il faisait preuve à cet instant. 

— D'accord, bredouilla mon amie.

— Archaos est déjà en train de nous chercher, et l'on ne sait pas de quoi il est capable. Je n'aimerais pas voir apparaître ici un portail... on doit courir.

Il posa ses yeux sur Xerys, refermée sur elle-même.

— Tu penses pouvoir y arriver ?

Elle opina, sans lâcher un mot. Je lui caressai la main de mon pouce et, Saphir, ronronnante, frotta sa tête contre les jambes de sa maîtresse.

— Alors, on y va.

J'ôtai mes chaussures, et Xerys m'imita ; mes pieds me faisaient atrocement souffrir et je ne me voyais pas courir avec des talons, aussi petits soient-ils.

— On va y arriver, nous encouragea Elyon. Quoiqu'il se passe, on s'en sortira, affirma-t-il.

Puis, on s'engouffra dans un des nombreux couloirs, talonnant Xerys de près. La jeune fille, si elle semblait hésiter à certains croisements, nous faisait progresser dans le souterrain à une vitesse hallucinante. J'aurais presque pu croire qu'elle l'avait déjà emprunté.

Ma respiration était hachée, mes jambes étaient en feu. Mon cœur battait comme il ne l'avait jamais fait ; l'angoisse habitait chaque parcelle de mon corps. On courait sans réfléchir, se contentant d'avancer. Juste avancer, s'enfuir. Partir d'ici. Cela sembla durer une éternité : le jour était-il déjà levé ? Elyon, derrière moi, gardait le rythme et fermait la marche. Il était bien mieux entraîné que nous, et ne paraissait même pas s'essouffler. Pour notre part, on commençait sérieusement à fatiguer, et les points de côté se faisaient de plus en plus tenaces. La Nocturnale, elle, continuait de fouler le sol avec une agilité féline, ne quittant pas Xerys d'une semelle.

La Gardienne des Légendes ✷ Tome I. La Relève [REPENSÉ & RÉÉCRIT]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant