CHAPITRE 17 - Le temps n'est pas à perdre

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(NDA : Je vous recommande la musique !)

Point de vue de Seira

Je ressentais ma magie. Dans tout mon corps, toute mon âme ; imprégnant chaque parcelle de ma peau, traversant chacune de mes veines. Jamais encore je ne m'étais sentie aussi puissante, et soudain, je me souvins de ce que j'avais éprouvé la première fois que j'avais utilisé ma magie : une satisfaction immense, et cette sensation de liberté inégalable qui vous transporte et que vous ne pouvez comprendre que si vous l'avez vécu.

Au moment où je m'étais jetée vers les Ombres, ce fut comme si j'avais été enivrée par un instinct plus fort que nature, un instinct que j'avais en moi depuis toujours. À cet instant-là, une seule chose comptait : les protéger, quoiqu'il advienne. Cette pensée avait suffi à faire voler en éclat la peur qui me paralysait et qui comprimait mes pouvoirs, m'empêchant de les manipuler. J'avais senti la magie gonfler en moi pour prendre de plus en plus de place, ne demandant qu'à s'exprimer. Une violente aura s'était alors échappée, et je m'étais sentie décoller dans les airs, portée par ma propre magie. Autour de moi, une sphère lumineuse s'était formée, enfermant par la même occasion les dix Ombres. Elle ressemblait fortement à celle que j'avais créée pas même vingt minutes avant, sauf qu'elle en faisait trois fois la taille et qu'elle n'entretenait aucun contact avec le sol : elle flottait.

Puis, en un instant, tout vola en éclat. Le lien que j'avais réussi à établir avec ma magie se rompit et je sentis mon pouvoir échapper à mon contrôle. La sphère resta heureusement intacte, mais le mur qui empêchait les Ombres de m'approcher se désintégra. Prise de panique, je n'eus même pas le temps de réagir que sans crier gare, une souffrance immense frappa mon dos. Sans attendre, le venin contenu dans les griffes des Ombres envahit mes veines, se propageant dans tout mon corps. Mon cœur se mit à battre plus vite, saisi de frénésie. Je hurlais aussi fort que je le pus, seul moyen que je trouvai pour extérioriser la douleur. Le sang chaud coulant abondamment contre ma peau suffit à me faire comprendre que la blessure n'était pas superficielle. Les griffes de la bête m'avaient littéralement déchirée, et je ne savais pas par quel miracle j'arrivai encore à maintenir la sphère active.

La créature qui avait profité de ma brusque perte de contrôle pour m'approcher ne se fit pas attendre. Plus coriace que les autres, je la vis revenir à la charge. Luttant tant bien que mal contre la souffrance qui me rongeait peu à peu, je puisai dans la magie présente en moi pour essayer, vainement, de me protéger. Mais, quand je discernai les dix Ombres ouvrir leurs grandes gueules édentées afin de me carboniser toute entière, je pris peur. Mes mains se mirent à trembler, ma vie se brouilla. Reste forte, reste forte.

Ses yeux bleus surgirent tout à coup dans mon esprit, et je me sentis alors empreinte d'une énergie nouvelle, qui ne m'appartenait pas. J'inspirai un grand coup, résistant à l'envie de m'évanouir.

Je ne mourrai pas aujourd'hui.

***

Point de vue d'Elyon

Ce fut brusque et fugace. Une image, une impression, rien d'autre. Mais ce qu'il discerna suffit à faire redoubler de vitesse son rythme cardiaque.

Des yeux verts, du feu, du sang, une épaisse cuirasse d'écailles aussi noire que du charbon. Seira.

Il n'eut pas le temps de faire un mouvement qu'une minuscule boule de feu se matérialisa devant son nez. C'était de Lenora. Sans attendre, il la toucha du doigt et la fit imploser, libérant ainsi le message : à l'aide.

Les gestes qu'il effectua par la suite restèrent lointains : il se vit appeler Leven, retrouvé à peine quelques secondes plus tôt, puis les gardes, de cette voix abrupte qu'il prenait lorsque son sang bouillonnait dans ses veines. Il sentit sa gorge se serrer, puis ses ailes furent secouées d'un violent regain d'énergie qui le fit décoller dans les airs au quart de tour. Le brouillard paraissait s'incliner à son passage. Il entendait parfaitement son ex-ami lui crier de s'expliquer et de ralentir, mais les mots n'atteignaient pas son cerveau.

La Gardienne des Légendes ✷ Tome I. La Relève [REPENSÉ & RÉÉCRIT]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant