1- La rencontre

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** 24 décembre 2019, à Paris **

* Regina *

Comme tous les ans, notre famille est réunie pour le réveillon du vingt-quatre décembre. Je soupire en tournant la tête vers chacun de nos invités, et un large sourire se dessine sur mon visage. Je me situe en bout de table, ce qui m'offre une belle vue sur tout le monde. À ma droite, se trouvent mes beaux-parents, installés l'un à côté de l'autre. Mary-Margaret m'octroie un regard tendre, avant de reporter son attention à la conversation de groupe. Face à moi, ma mère occupe le coin opposé au mien, et sirote son verre de vin tout en blaguant avec mon père, qui se tient entre elle et David. Ma sœur aînée, est placée entre Cora et mon fils. Notre fils.

À cette pensée, je pose les yeux sur ma femme. Celle qui partage ma vie depuis sept années, rit à ma gauche en racontant l'un de nos souvenirs. Le petit brun âgé de huit ans, réclame les bras de sa mère la plus proche, et celle-ci lui rend son étreinte. En remarquant mon œillade sur elle, Emma se tourne vers moi. Mon cœur se met à battre plus rapidement, quand ses lèvres frôlent les miennes, avant d'y déposer un doux baiser.

– Em, râlé-je en la nommant par son surnom, je n'aime pas lorsque tu fais ça devant d'autres personnes.

– Je sais, Gina, chuchote-elle à mon oreille, avant de s'éloigner un peu de moi.

J'ai toujours été gênée de montrer une quelconque marque d'affection envers elle, en présence de nos proches. Contrairement à ma compagne, qui s'amuse souvent à me provoquer en m'embrassant devant eux, comme à l'instant. Heureusement, ils sont bien trop pris dans leur discussion pour faire attention à nous. Seul Henry, notre enfant portant le même prénom que mon géniteur, remarque notre rapprochement et se met à sourire. Je lui ébouriffe les cheveux, le faisant rire aux éclats. Je ne pourrais pas être plus heureuse qu'en ce moment.

– Maman, maman, vous pouvez nous raconter votre histoire? quémande le garçon, d'un ton joyeux.

Nos convives nous observent, moi et Emma, tour à tour. Ma bien-aimée me consulte en silence, sachant que je ne suis pas à l'aise à l'idée de parler de notre vie. Non pas que j'en ai honte, bien au contraire. Je suis simplement assez pudique à ce sujet. Néanmoins, en voyant les prunelles suppliantes d'Henry, ainsi que la curiosité sur les faciès qui m'entourent, je finis par abdiquer.

– Si tu veux chéri, et dans ce cas je pense que nous devrions commencer par notre rencontre. C'était il y a tout juste sept ans...

** 22 novembre 2012 **

Je grogne à nouveau, lorsque mes pieds s'enfoncent dans la neige tapie au sol. Nous ne sommes que fin novembre, et voilà que la ville de Paris est déjà recouverte d'un manteau blanc. Les toits des maisons, les arbres et même les routes, tout est aux couleurs de cette période l'année. Une période qui, comme tout les ans, me met dans une colère noire. Et j'ai su que cette journée démarrait mal, lorsque j'ai dû dégivrer le pare-brise de ma voiture avant de partir au travail. Imaginez un peu le tableau; une jeune femme pas en avance, en train de lutter pour ne pas se casser la figure sur une plaque de verglas, et le tout avec un grattoir à la main. Finalement, le moteur de la Mercedes offerte par mon père quelques années plus tôt, a accepté de coopérer et je suis arrivé au cabinet dentaire, avec vingt minutes de retard. Ne vous méprenez pas, je ne suis pas dentiste, mais secrétaire. Le métier de mon patron m'a toujours fasciné, je me demande même comment l'on peut faire autant d'études pour voir des molaires abîmées toute la journée. Très peu pour moi.

Mr Andson est un employeur plutôt gentil, alors malgré la pénibilité de mon poste, je ne vais pas m'en plaindre. D'autant plus que je vis seule, ce qui m'arrange considérablement en terme de salaire. Une vie de couple, avec des enfants qui courent dans tous les sens, voilà encore une chose pour laquelle je ne suis pas faite. La simple idée de partager mon quotidien avec un autre être humain me fait grincer des dents, et je ne me sens pas prête à le faire. Je me plais bien dans mon petit appartement au cœur de Paris, ce n'est pas pour que quelqu'un vienne m'y importuner. Du haut de mes vingt-huit ans, je ne ressens toujours pas le besoin de trouver l'homme de ma vie. Ou plutôt la femme, dans mon cas. Mon homosexualité est claire pour moi depuis mon adolescence, et j'ai toujours enchaîné les relations sans lendemain. Pas plus tard qu'avant-hier, où j'ai dû m'éclipser de la chambre de ma dernière conquête, dont j'ai déjà oublié le nom.

Au pied du sapin [SWANQUEEN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant