17 - Les doutes

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** 24 décembre 2019, à Paris. **

* Regina *

La main de ma conjointe s'appose sur ma cuisse sans le moindre sous-entendu coquin. Je le devine avec facilité puisqu'elle ne cherche en rien à me déstabiliser. Aucune œillade malicieuse, aucune caresse langoureuse. Son unique objectif consiste à obtenir du réconfort, du soutien. J'ai conscience que ma présence à ses côtés représente une véritable vitalité à ses yeux. Je le sais car son sentiment s'avère réciproque. Ce besoin de la savoir près de moi, de m'accrocher à elle telle une moule à son rocher ne m'est pas inconnu. A l'inverse, j'en suis victime sans cesse. La peur de me noyer me foudroie parfois. Et en comparaison à l'ancre d'un bateau, je me rattache à mon pilier le plus solide. Le plus fort, le plus beau. Mon Emma.

Son contact dénué d'une quelconque réflexion salace m'arrache tout de même des frissons. Il n'y a qu'elle pour faire réagir ma peau aussi vite sous ses attouchements; c'est l'un de ses nombreux super-pouvoirs sur ma personne. Un parmi tant d'autres, plus surprenants et merveilleux encore.

– Tu te rappelle du début? m'interroge la demoiselle à ma gauche. J'étais si incertaine à propos de notre relation, jamais je n'aurais imaginé que nous en serions là sept ans plus tard.

– Mon manque de confiance et mon hésitation constante ne t'y ont pas aidé mais je te suis reconnaissante de m'avoir laissé une chance. A cette période de ma vie, tu as cru en moi alors que peu de gens l'ont fait.

Un sourire illumine son doux faciès en un instant. Sa joie communicative se répercute sur moi et ce d'autant plus en me remémorant les premiers semaines de notre couple. Un commencement ponctué de hauts comme de bas, de plaisirs comme de doutes.

** 29 janvier 2013 **

Ma partenaire grogne contre la sonnerie provenant de mon téléphone, mécontente de la musique qui surgit dans la pièce. En un mois et demi d'union, son cerveau a pris l'habitude du réveil à huit heures tapantes lors de mes journées de travail. Pourtant, son corps ne parvient pas à s'y acclimater. J'en suis convaincue parce qu'elle râle en permanence sur l'engin électronique qui interrompt ses rêves. Il faut dire qu'à l'accoutumée, les grasses matinées lui correspondent plus qu'à moi. Je supporte avec difficulté de dormir trop longtemps – excepté avec elle, je dois l'admettre. Qui plus est, je suis persuadé que ma copine ne songe à rien de tout cela lorsqu'elle me rejoint à mon appartement. Ce n'est qu'à l'aube et après des ébats ardents que la réalité refait surface. D'ailleurs, c'est en raison de nos agitations nocturnes que je préfère les calmes retrouvailles du week-end.

Bien sûr, elle et moi nous voyons à diverses opportunités en dehors de nos moments intimes. Des dîners, des après-midi au cinéma, quelques échanges par-ci par-là. Toutefois, je me réjouis davantage dès qu'une soirée entière s'offre à nous. Souvent, nous mangeons devant un film ou une série que l'on apprécie visionner ensemble. Puis, qu'importe la manière dont ceci se produit, ma petite-amie finit toujours nue et en sueur entourée de ma silhouette. Pour mon plus grand bonheur.

– Reste un peu, réclame-t-elle d'un ton suppliant quand j'entreprends de m'extraire de mon lit.

– J'aimerais beaucoup mais je ne peux pas, réponds-je à contrecœur.

Comme je m'y attendais, elle tire sur la couverture dans le but de m'empêcher de m'en défaire. Je soupire, attendrie face à son attitude enfantine. A chaque occasion, un scénario similaire se réitère. Ses tentatives visant à me garder auprès d'elle sont réfléchies à l'avance. En général, la compassion ne suffit pas à me donner envie de succomber. En revanche, je peine régulièrement à résister à sa deuxième technique d'approche. A la seconde où mes pensées dérivent vers ce sujet, j'observe justement sa paume droite remonter le long de mon bras. Mes prunelles scrutent ses mouvements calculés à la perfection, je me fais violence pour ne pas craquer immédiatement.

Au pied du sapin [SWANQUEEN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant