7 - La (sur)protection

640 25 4
                                    

** 24 décembre 2019, à Paris. **

* Regina *

Le repas du réveillon poursuit son cours. Il est environ vingt-deux heures au moment où Emma apporte la bûche de Noël après avoir insisté longuement auprès de ma mère pour lui venir en aide. Ma compagne est extraordinaire, je ne le dirai jamais assez. Elle dépose le dessert au centre de la table, avant de se rasseoir à ma gauche. Les discussions et les verres se sont enchaînés depuis le début de la soirée, si bien que je dois garder un œil sur ma blonde. Je ne tiens pas à ce que Henry la voit dans un état d'euphorie proche de la folie, chose qui arrive dés qu'elle boit un peu trop. Une fois, j'ai dû la sortir de force d'un bar pour lui éviter une terrible bagarre avec un tabouret. Alors désormais je prends mes précautions, voulant éviter de me sentir ridiculisée à nouveau.

– Tu penses à quoi? questionne la principale intéressée, remarquant un rictus germer sur mes lèvres.

– Ta première cuite avec moi, lâché-je dans un ricanement.

Ses yeux s'écarquillent un instant puis elle se met à rigoler quelques secondes plus tard. Ma franchise naturelle lui fait toujours le même effet de surprise, malgré les nombreuses années passées ensemble. Sept ans. Sept ans que cette femme remplit mon quotidien de joie et de réussite. Lorsque ma partenaire m'a accosté cet hiver là, j'étais à des kilomètres de m'imaginer plus qu'une aventure d'une nuit avec elle. Et encore moins que nous aurions un enfant ni même un logement commun.

– Je ne m'en rappelle pas vraiment, tout ce dont je me souviens c'est que j'ai passé dix minutes à discuter avec une chaise vide.

Nos rires se déversent dans la salle à manger mais ne sont que d'infimes chuchotements mêlés aux conversations environnantes. Notre fils savoure sa part de gâteau et le bonheur qui est lisible sur ses traits me comble au plus haut point. Mes parents et ceux de ma bien-aimée échangent avec ma sœur aînée sur des sujets divers auxquels j'avoue ne pas prêter d'attention particulière. Je préfère mettre ma dulcinée mal à l'aise en la dévorant avec intensité du regard. La prenant en flagrant délit de contemplation, je hausse un sourcil aguicheur. Elle dégage son œillade enflammée de ma personne et ses joues adoptent une couleur rougie par la gêne. Pourtant, elle n'a aucune raison de l'être. Ce n'est pas comme si nous ne faisions que nous reluquer depuis notre arrivée ici. Vraiment pas.

– Si j'ai bonne mémoire, il me semble que tu m'as materné en m'aidant à me mettre en pyjama et en me bordant comme un bébé, me charrie-t-elle avec gaieté.

– Pour ma défense, tu étais complètement soûle. Et puis c'était pour les fois suivantes où tu m'as assisté sans relâche.

– Je ne me suis jamais comporté ainsi.

Je toussote en avalant une bouchée de travers tant sa mauvaise foi est ironique. Elle qui est toujours aux petits soins pour moi, peut-être un peu trop parfois. Cet aspect de sa personnalité me plaît autant qu'il m'agace et ma petite-amie est loin de l'ignorer. Je lui adresse un coup d'œil accusateur auquel elle répond en m'embrassant la joue. M'amadouer avec ses marques d'affection a toujours été son moyen de détourner un événement à venir, ce que mon âme-sœur espère réussir ce soir. Hélas, je ne suis pas décidé à ce qu'elle me fasse fléchir avec facilité. J'enlace donc ma main à la sienne avant de prendre la parole.

– Mon chéri, débuté-je en m'adressant à notre progéniture, voudrais-tu que je te raconte le jour où ta maman s'est occupée de moi comme si j'allais mourir alors que j'avais juste attrapé un vilain virus?

Le concerné opine du menton pour témoigner son enthousiasme. Sa réaction ainsi que ma tournure de phrase amuse les autres convives attablés autour de nous. Emma, quant à elle, me tire la langue telle une enfant à l'évocation de ce souvenir.

Au pied du sapin [SWANQUEEN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant